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Baisse des demandes d’admission à l’université dans certaines régions de l’Ontario

par ROSANNA TAMBURRI | 09 SEP 15

Les universités de certaines régions de l’Ontario se heurtent à des difficultés financières croissantes attribuables à la diminution du nombre de demandes d’admission des étudiants du secondaire. Le fait que le gouvernement ontarien ait entrepris une réforme du financement des 20 universités de la province ne fait qu’accentuer l’incertitude.

Selon le Centre de demande d’admission aux universités de l’Ontario, en 2015, le nombre de demandes d’admission des étudiants du secondaire a chuté pour une deuxième année consécutive. Il s’élève à 412 096, soit 0,6 pour cent de moins qu’en 2014 et 1,4 pour cent de moins qu’en 2013. Cette baisse reflète la diminution du nombre d’étudiants en âge de fréquenter l’université, une tendance qui devrait persister plusieurs années.

Bien que le nombre d’admissions d’étudiants de ce groupe d’âge ait légèrement augmenté pour atteindre 71 624, il existe d’importants écarts entre les établissements. Le nombre d’admissions a en effet progressé de manière stable dans les universités de Toronto et des environs, mais a chuté dans les régions les moins peuplées. Leur nombre a ainsi reculé de 17,2 pour cent à l’Université Algoma de Sault Ste. Marie, de 16,5 pour cent à l’Université Lakehead de Thunder Bay, de 14,3 pour cent à l’Université Laurentienne de Sudbury, et de 8,9 pour cent à l’Université de Windsor.

Le directeur de la recherche et de la planification au ministère ontarien de la Formation et des Collèges et Universités, Chris Monahan, prévoit une faiblesse des effectifs au cours des cinq prochaines années, ce qui posera problème à certains établissements. En 2020 toutefois, en raison de l’augmentation de la population jeune, il prévoit une progression des effectifs, mais moins forte qu’au cours de la dernière décennie.

Monahan a tenu ces propos lors d’un symposium tenu en mai à l’Université de Toronto par l’Institut d’études pédagogiques de l’Ontario. Il a précisé que les inscriptions à temps plein au premier cycle ont connu une hausse de plus de 40 pour cent en Ontario au cours des 10 dernières années, soit davantage qu’au cours des années 1960, en grande partie en raison de la hausse des taux de fréquentation. Il ne s’attend toutefois pas à ce que ce nombre progresse également à l’échelle de la province après 2020.

« Certains établissements vivent de ce fait une crise permanente », selon Alex Usher, président du cabinet-conseil torontois Higher Education Strategy Associates. Les établissements en question risquent d’après lui de se heurter à des difficultés financières considérables. En effet, environ la moitié des revenus de fonctionnement des universités proviennent des frais de scolarité, qui dépendent entièrement de l’ampleur de leurs effectifs.

Certaines universités ont toutefois réussi à contrer cette tendance. L’Université Nipissing de North Bay affiche cette année une hausse de 8,3 pour cent des admissions, imputable à ses importants efforts de recrutement dans la région de Toronto. L’Université d’Ottawa, dont les admissions viennent de chuter de 0,6 pour cent a choisi, selon M. Usher, de miser sur son statut bilingue pour attirer les étudiants québécois.

Pour contrer la baisse des effectifs, certaines universités ont décidé d’accepter davantage d’étudiants étrangers et aux cycles supérieurs. Ainsi, environ le tiers des revenus de l’Université de Windsor issus des frais de scolarité proviennent désormais des étudiants étrangers. C’est 15 pour cent de plus qu’il y a 5 ans selon son recteur, Alan Wildeman, selon qui cette évolution a contribué à stabiliser les finances de l’établissement.

Pour maintenir la dynamique amorcée, l’Université de Windsor tente maintenant de séduire les étudiants américains en abaissant leurs frais de scolarité à environ de 10 000 $, soit l’équivalent des frais des universités publiques du Michigan. Selon M. Wildeman, elle entend intensifier ses efforts de recrutement dans les régions voisines. Malgré la chute de ses effectifs, l’Université de Windsor s’est engagée à embaucher 50 professeurs à temps plein, en plus de ceux qui combleront les départs à la retraite. Ces embauches seront financées à même un fonds stratégique prioritaire de 45 millions de dollars. « Ça fait partie d’une stratégie qui vise à nous démarquer en tant qu’établissement mettant l’accent sur le parcours des étudiants », précise M. Wildeman.

Modification des programmes populaires

Selon M. Wildeman, ces tendances en matière d’effectifs ont eu une incidence sur la répartition des étudiants entre les disciplines. Comme beaucoup d’autres, l’Université de Windsor a vu ses effectifs s’accroître entre autres en gestion des affaires, en génie et en droit, et les a vus décroître en arts et en sciences humaines où ils sont passés de près de la moitié à environ un tiers. L’Université de Windsor prévoit donc opter pour un système budgétaire souple qui lui permettra d’allouer des ressources aux facultés dont les effectifs augmentent, sans mettre en péril les autres, précise M. Wildeman, tout en admettant que « ce ne sera pas facile ».

La baisse des effectifs menace non seulement les revenus des universités issus des frais de scolarité, mais également leurs subventions de fonctionnement provenant du gouvernement ontarien. L’Université Laurentienne a indiqué dans un communiqué de presse que 2015-2016 serait la neuvième année consécutive marquée par une baisse de ses subventions provinciales par étudiant, et la première où celles-ci représenteront moins de la moitié de ses revenus.

En mars, le gouvernement ontarien a entrepris une réforme de la répartition de ses subventions entre les universités de la province, qui totalisent 3,5 milliards de dollars par année – dont près de 80 pour cent sont alloués aux établissements en fonction de leurs taux d’inscription. Même si cette réforme ne vise pas à contrer les conséquences de la baisse des effectifs, elle survient alors que le gouvernement est « réellement préoccupé par l’état des finances de certains établissements attribuable aux problèmes d’effectifs », précise M. Usher.

Selon le président-directeur général du Conseil ontarien de la qualité de l’enseignement supérieur (COQES), Harvey Weingarten, en raison de la baisse des effectifs, le modèle de financement actuel est un désastre pour certains établissements. Depuis 10 ans, les universités ont pris l’habitude, pour couvrir leurs dépenses, de compter sur la solide croissance des effectifs, mais certaines ne pourront plus le faire. Le COQUES a donc appelé le gouvernement à revoir son modèle de financement pour qu’il tienne davantage compte des facteurs autres que les effectifs, lui laissant le soin de décider lesquels.

D’autres intervenants appellent à la prudence. Dans un article d’opinion paru dans l’Ottawa Citizen, la rectrice de l’Université Carleton, Roseann O’Reilly Runte, rappelle que, à l’étranger, les changements apportés aux modèles de financement ont engendré de l’instabilité et mis des établissements déjà fragiles dans une situation précaire.

Les problèmes d’effectifs sont encore plus prononcés au Canada atlantique où le gouvernement néo-écossais a récemment adopté une loi controversée qui autorise les universités aux prises avec de « graves problèmes financiers » à se restructurer, et donc potentiellement à suspendre le droit de grève et à faciliter la réduction du personnel.

Selon M. Weingarten, les gouvernements de l’ensemble du pays ont signifié qu’ils ne souhaitent pas augmenter le financement consacré aux établissements postsecondaires au rythme des dernières années. D’après lui, l’augmentation des effectifs « ne suffira pas ».

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