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Le Canada ne souffre d’aucun déséquilibre entre la demande et l’offre de compétences en STGM

Au contraire, selon un nouveau rapport, le marché du travail canadien fonctionne comme il se doit.

par LÉO CHARBONNEAU | 06 MAI 15

Les employeurs canadiens déplorent depuis des années la rareté de candidats possédant les compétences qu’exigent certains postes, particulièrement des compétences en STGM (sciences, technologies, génie et mathématiques).

En 2013, par exemple, le Conference Board du Canada estimait que l’Ontario risquait de voir son activité économique annuelle amputée de quelque 24 milliards de dollars par année en raison de la pénurie de compétences observée. Interrogés au sujet des types de travailleurs dont ils ont le plus besoin, les employeurs citent les diplômés en sciences, en génie et en technologies, ainsi qu’en gestion des affaires et en finances.

Même le premier ministre, Stephen Harper, déclarait en novembre 2012 que la formation d’un nombre accru de travailleurs compétents était le plus grand défi auquel notre pays est confronté, ajoutant : « On sait que les choix des gens en matière de parcours d’études conduisent le Canada vers une pénurie chronique de certaines compétences, notamment en génie et en recherche ».

Un nouveau rapport du Conseil des académies canadiennes (CCA) remet toutefois en cause cette prétendue pénurie de compétences en STGM. Intitulé Assemblage requis : Compétences en STGM et productivité économique au Canada, le rapport conclut qu’il n’existe « aucune preuve d’un déséquilibre actuel entre la demande et l’offre de compétences en STGM sur le marché du travail national ». Il estime plutôt, après étude de divers indicateurs parmi lesquels les données en matière d’emploi et de salaires, que le Canada « semble profiter d’un marché du travail efficace, où les gens choisissent leurs champs d’études et leurs métiers en fonction de facteurs tels que les signaux qu’envoie le marché et leurs préférences ». Le rapport conclut en outre que le problème dont souffrirait le Canada en matière de productivité ou d’innovation, ne serait pas lié à une pénurie de compétences avancées en STGM.

Préparé par un comité d’experts issus des milieux de l’enseignement supérieur et des affaires, et présidé par David Dodge, ancien gouverneur de la Banque du Canada et actuel conseiller principal au sein du cabinet d’avocats Bennett Jones d’Ottawa, le rapport du CCA a été commandé par Emploi et Développement social Canada pour répondre à la question suivante : « Dans quelle mesure le Canada sera-t-il prêt à satisfaire aux exigences futures dans les domaines des STGM? »

Selon le rapport, il est impossible de prédire avec certitude quelles seront les compétences et les connaissances exigées en matière d’emploi dans l’avenir. Le comité d’experts souligne toutefois que les compétences en STGM sont des « outils essentiels » qui permettent de s’adapter à l’évolution du marché du travail et de faire face à l’incertitude. Selon le rapport, compte tenu de l’évolution constante du marché du travail et des technologies, il serait judicieux d’investir de manière stable et à long terme au profit de l’acquisition de compétences en STGM, dès l’enseignement préscolaire et jusqu’au secondaire.

Le comité d’experts souligne par ailleurs que les compétences en STGM, bien que nécessaires, ne suffisent pas à renforcer l’innovation et la productivité. Il existe de nombreux types d’innovation, et toutes ne dépendent pas des compétences en STGM. Le rapport précise en effet que « les compétences complémentaires, comme les habiletés en communication, l’esprit d’équipe et le leadership, sont aussi importantes », que les diplômés des domaines des STGM n’occupent pas nécessairement des postes à forte concentration en STGM, et que de nombreuses compétences en STGM se révèlent utiles dans d’autres domaines.

Des conclusions semblables se retrouvent dans un récent rapport de la National Science Foundation des États-Unis, selon lequel les titulaires de postes en STGM ne se limitent pas aux seuls titulaires de diplômes en STGM, mais sont plutôt issus d’un large éventail de disciplines et d’antécédents professionnels. Selon ce rapport américain, il serait plus pertinent de se demander si les États-Unis s’emploient à se doter d’une « main-d’œuvre capable d’occuper de postes en STGM », et si « chacun a accès à une éducation de grande qualité, qui comprend les domaines des STGM ».

Le rapport du CCA insiste particulièrement sur l’importance des compétences en design pour l’innovation, affirmant que « le design, un aspect de nombreuses disciplines comme l’architecture, les arts visuels, l’urbanisme, le stylisme vestimentaire et l’esthétique, est de plus en plus considéré comme le principal processus de résolution des problèmes liés au développement technologique ». M. Dodge affirmait ainsi lors d’un entretien : « Les aptitudes créatrices sont vraiment importantes. Ainsi, des établissements comme l’Institut Emily Carr d’art et de design et l’École d’art et de design de l’Ontario (OCAD), non associés aux STGM, se révèlent d’une importance fondamentale. »

Peter Taylor, professeur de mathématiques à l’Université Queen’s et membre du groupe d’experts, abonde dans le même sens : « Le théâtre, le cinéma, la littérature [… ]Toutes ces disciplines sont beaucoup plus importantes qu’on ne l’admet généralement. Il n’y a pas que les passionnés de technologie. »

Selon le rapport du CCA, le Canada pèche entre autres par la sous-représentation de certains groupes parmi les titulaires de compétences avancées en STGM. Les femmes, par exemple, sont dûment représentées en sciences, mais non en technologie et en génie. Les Autochtones, pour leur part, se heurtent avant tout à un apport insuffisant de compétences de base en STGM au primaire et au secondaire, souligne M. Dodge. « Les conséquences de ces graves disparités sont dramatiques pour la société, l’économie, la science et l’innovation », souligne le rapport.

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