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Les cotutelles internationales gagnent en popularité, surtout au Québec

Le nombre d’étudiants au doctorat qui se font superviser dans deux pays différents augmente.

par OLIVIER ROBICHAUD | 06 FEV 13

Une nouvelle tendance se dessine sur la scène universitaire canadienne. De plus en plus d’étudiants au doctorat choisissent la cotutelle de thèse, c’est-à-dire qu’ils se font superviser par deux établissements de pays différents. Ce sont surtout les étudiants des universités francophones du Québec qui choisissent cette option, le plus souvent avec les universités de France.

C’est ce que révèle un sondage récemment effectué par Fred Hall, ancien doyen de la Faculté des études supérieures de l’Université de Calgary, pour le compte de l’Association canadienne pour les études supérieures (ACES). Pour en savoir davantage sur les programmes de doctorat bidiplômants et conjoints, dont les cotutelles de thèse, M. Hall a sondé 68 établissements, parmi lesquels 48 ont répondu.

Une cotutelle est une entente ponctuelle entre deux universités par laquelle un étudiant partage ses activités académiques entre chacune d’elles. L’étudiant s’inscrit aux deux universités et doit satisfaire aux exigences des deux programmes de doctorat. Il a également deux directeurs de thèse, mais ne se soumet généralement qu’à une seule soutenance devant un jury nommé par les deux établissements. Dans la plupart des cas – et c’est le modèle le plus apprécié des étudiants –, il reçoit deux diplômes et chacun mentionne habituellement la parti-cipation de l’autre institution. Certaines universités préfèrent toutefois le modèle conjoint, où un seul diplôme reconnu par les deux établissements est accordé.

L’Université de Montréal est de loin le leader canadien des cotutelles de thèse, comptant 175 étu-diants qui suivent ce type de formation, selon le rapport de l’ACES. Les cotutelles occupent aussi une place importante à l’Université Laval et à l’Université de Sherbrooke, souligne M. Hall.

« Les ententes qui ont été signées entre le Québec et la France après 1995 ont beaucoup facilité les cotutelles », explique Hélène David, vice-rectrice aux relations internationales, Francophonie et partenariats institutionnels, de l’Université de Montréal.

Les étudiants français qui étudient au Québec paient les mêmes frais de scolarité que les Québécois (soit environ 2 500 $ par année), alors que les autres étudiants étrangers paient près de 6 000 $ par semestre, ajoute Mme David. Dès 1996, la Conférence des recteurs et principaux des universités du Québec (CRÉPUQ) a aussi établi une convention-cadre concernant les cotutelles de thèse avec ses deux homologues français, ce qui accélère le processus administratif. La bourse Frontenac a également été créée pour financer les études à l’étranger de 10 Qué-bécois et de 10 Français par année inscrits dans une cotutelle de thèse.

Émilie-Jade Poliquin fait un doctorat en études anciennes à l’Université Laval et à l’Université Toulouse II. « J’avais fait deux échanges en France pendant mon baccalauréat, alors j’étais consciente de ce qu’on pouvait m’offrir là-bas », explique Mme Poliquin, qui a obtenu une bourse Frontenac. C’est aussi à Toulouse II qu’elle avait trouvé la meilleure codirectrice de thèse pour son sujet de recherche. « J’avais fouillé la liste des auteurs que je citais le plus souvent dans mon mémoire de maîtrise, et c’était Mireille Armisen-Marchetti, à Toulouse, qui était ressortie », explique-t-elle.

Depuis quelques années, l’engouement pour les cotutelles ainsi que pour les autres formes d’études transnationales s’étend au reste du pays. La moitié des répondants offrent de tels programmes. Le rapport indique notamment que les établissements qui accueillent plus d’étudiants étrangers sont celles qui font le plus de cotutelles.

En 2008, l’Université d’Ottawa a été le premier établissement hors Québec à se doter d’une politique officielle concernant les cotutelles de thèse. « Cela permet aux étudiants d’obtenir de l’expérience dans deux laboratoires différents », affirme Martin Bouchard, doyen associé de la Faculté des études supérieures et postdoctorales de cet établissement. « Parfois, il y a des possibilités dans l’autre laboratoire qui n’existent pas ici », dit-il.

Autre que la France, d’importants partenariats se créent en Allemagne, en Chine et en Belgique, rapporte M. Hall. Mme David, de l’Université de Montréal, note aussi l’intérêt de son établissement pour les cotutelles au Brésil. Elle ajoute que les cotutelles ouvrent les perspectives d’emploi et de recherche pour ces étudiants sur la scène internationale et que les professeurs en bénéficient aussi puisqu’ils peuvent renforcer leurs réseaux de recherche et se faire publier dans des périodiques étrangers.

Les cotutelles ont certainement leur lot de défis, autant pour l’étudiant que pour l’établissement. Le rapport de M. Hall indique que la langue de travail peut poser problème, sauf le français. Le temps passé à chaque établissement doit être négocié. La perception des frais de scolarité peut mener à des conflits et les processus d’inscription et d’approbation sont souvent très longs.

De plus, chaque province présente ses difficultés propres. Par exemple, l’Université d’Ottawa a opté pour le modèle bidiplômant pour ne pas avoir à demander chaque fois l’accréditation au ministère de la Formation et des Collèges et universités de l’Ontario.

Lors d’un exposé à la réunion annuelle de l’ACES en novembre dernier, M. Hall a souligné que la création de programmes conjoints et bidiplômants demande beaucoup d’efforts et de ressources. Les directeurs de thèse doivent obtenir l’approbation de leurs collègues, créer un nouveau programme et trouver des fonds pour les déplacements à l’étranger. Le modèle des cotutelles permet aux universités d’utiliser un programme existant, mais les processus administratifs demeurent très lourds pour les employés et les étudiants parce que les dates li-mites d’inscriptions coïncident rarement.

Étant donné les exigences des cotutelles, le rapport recommande ce genre d’études aux étudiants les plus doués. M. Hall souligne aussi que quelqu’un doit s’occuper du dossier de l’étudiant dans chaque établissement. Il affirme que la meil-leure pratique révélée par le sondage consiste à établir des cotutelles à partir des collaborations internationales préexistantes entre chercheurs.

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