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Les marathons de programmation offrent aux étudiants une chance de briller – sommeil facultatif!

Mille étudiants consacrent 36 heures épuisantes à créer un programme ou un projet dans le cadre de Hack the North à l’Université de Waterloo.

par BECKY RYNOR | 09 NOV 16

Samedi matin, 5 h 30. Le marathon de programmation Hack the North dure depuis une douzaine d’heures en comptant l’inscription, le dîner, la présentation des projets, les échanges informels et les exposés des entreprises de haute technologie qui se sont déroulés la veille. Les six étages du bâtiment d’ingénierie sont remplis d’étudiants programmeurs penchés sur leur clavier, concentrés devant leur écran ou tapant et jouant de la souris, les yeux hagards au point qu’on se demande depuis quand ils n’ont plus cligné des yeux ou dormi. Pendant ce temps, d’autres sont affalés sur ou sous les tables, lovés dans des fauteuils ou allongés sur des chaises pliantes. Beaucoup portent des bas de pyjamas amples et des t-shirts promotionnels à l’effigie d’entreprises de haute technologie.

Hack the North est le plus important marathon de programmation au Canada. Sélectionnés parmi 5 000 candidats, 1 000 étudiants du monde entier participent à l’édition de cette année, organisée du 16 au 18 septembre à l’Université de Waterloo. C’est pour eux l’occasion de passer 36 heures à créer des logiciels ou du matériel informatique visant à protéger l’environnement, à aider l’humanité ou simplement à commander une pizza au moyen d’une application mobile qui propose formats, garnitures et modes de livraison. L’objectif de l’exercice : développer un programme ou concevoir un projet qui sera soumis au jury dès le dimanche matin, à 10 h 30.

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Un participant à Hack the North porte le Microsoft HoloLens, un casque de réalité virtuelle. Photo par JK Liu.

« Je n’ai pas dormi de la nuit, mais je veux tellement que ça marche », lance James Hryniw, 19 ans, étudiant en génie civil à l’Université de l’Alberta, avant de remettre son casque de réalité virtuelle et d’éclater de rire : « J’ai l’entrejambe de l’avatar pile devant les yeux! » Ce n’est pas le résultat escompté, avoue Nathan Doraty, 21 ans, qui poursuit un baccalauréat en génie informatique à l’Université de l’Alberta. Au côté de Nicholas Westbury, 20 ans, et de Nathan Liebrecht, 19 ans, MM. Hryniw et Doraty cherchent à connecter leur casque à une veste de réalité virtuelle, dite « haptique » (sensible au toucher).

« Il suffit qu’une personne porte le casque et la veste de réalité virtuelle en se tenant devant un capteur de mouvement Microsoft Kinect, qui est aussi une caméra, pour qu’on puisse déterminer la position de tous ses membres, explique M. Doraty. Si, par exemple, la personne est touchée au cours d’une partie de ballon-prisonnier, elle peut voir et sentir où le ballon l’a heurtée. Malheureusement, comme on utilise deux systèmes de captation (Microsoft Kinect et Oculus Rift), on a du mal à les synchroniser sans provoquer de nausées dues aux mouvements. » Ou une danse involontaire…

L’équipe estime que le fruit de ses efforts aura des applications en matière de formation médicale, et plus tard en chirurgie. « Même s’il se trouve à l’autre bout du pays, un chirurgien pourra pratiquer une chirurgie et sentir ce qu’il fait, explique M. Doraty. Le toucher est très important dans un tel cas. »

À l’étage au-dessus, trois étudiantes de l’Université de Waterloo (Jamie Kim, 21 ans, ainsi qu’Emily Lam et Anna Dong, toutes deux âgées de 20 ans) attendent qu’une imprimante 3D finisse d’imprimer des éléments de leur projet. « On crée un dispositif qui permettra aux enfants atteints de handicaps moteurs de dessiner seuls », explique Mme Lam. Elle réfléchissait depuis deux mois à ce dispositif quand elle s’est dit que Hack the North était sa chance de le développer en compagnie de programmeurs et d’experts en logiciels, et de disposer de technologies en libre accès.

« C’est tellement gratifiant de guider un enfant handicapé pour lui permettre de dessiner, explique Mme Lam. Nous souhaitons pouvoir guider le dessin non plus à partir du dessus de la surface, mais par en dessous. » Le dispositif de guidage qu’imagine Mme Lam repose sur un outil de dessin magnétisé couvrant l’écran. « Compte tenu de la neuroplasticité du cerveau, ce dispositif permettrait aux enfants d’acquérir de nou¬velles aptitudes motrices fines, précise-t-elle. Il pourrait aussi venir en aide aux enfants atteints de paralysie cérébrale depuis la naissance, ou permettre aux victimes d’AVC de réapprendre à dessiner. »

Les projets de ce type sont la norme, non l’exception, d’après Shy Ruparel, commissaire adjoint au sein de la ligue Major League Hacking, qui participe à l’organisation de marathons de programmation pour les étudiants, partout dans le monde. « Tout le monde pense que les programmeurs ne pensent qu’à concevoir des jeux, mais seule une minorité s’y emploie. Beaucoup d’étudiants travaillent à des sites Web, des applications et des robots. Les marathons de programmation permettent de faire de la résolution de problèmes. »

Les prix décernés dans le cadre de marathons de programmation sont impressionnants. Hack the North, par exemple, distribue 46 050 $ en argent et en matériel informatique, mais ce n’est pas ce qui attire les étudiants programmeurs, précise M. Ruparel : « Le côté compétitif de l’événement contribue à le structurer, mais les participants sont plutôt là pour créer, apprendre et partager. Ils sont les prochains Mark Zuckerberg, le talent de demain. »

Les entreprises de haute technologie comme Bloomberg, Microsoft, Google ou Shopify le savent et se font un devoir d’être présentes dans les marathons de programmation. « Avant tout, nous sommes là pour recruter », explique Kirusha Srimohanarajah, développeuse à Synaptive Medical, une entreprise spécialisée dans les technologies neurochirurgicales. Diplômée de l’Université de Waterloo en génie électrique, elle été embauchée par Synaptive au terme d’un stage travail-études. « Des milliers de candidats pos-tulent chez nous, mais les évaluer juste en fonction de leur CV n’est pas simple, précise-t-elle. Les marathons de programmation nous permettent de discuter avec les étudiants qui ont pris l’initiative d’y participer. »

Ingénieure en logiciels, Gloria Kimbwala est présente à Hack the North en tant que recruteuse pour Square, une entreprise qui propose un système de paiement mobile par carte de crédit. « C’est plus facile de trouver de bons candidats dans ce genre d’événements, car les participants sont passionnés par la résolution de problèmes, souligne-t-elle. Les marathons de programmation attirent des étudiants non seulement en informatique, mais issus de toutes les disci-plines : chimie, mathématiques, sciences appliquées, psychologie… Des gens passionnés par la technologie et l’invention. »

Ces marathons permettent aussi aux entreprises de confier leurs nouveaux produits à de futurs développeurs pour qu’ils les utilisent, les déboguent et, idéalement, les adoptent. Les entreprises de haute technologie distribuent gracieusement ou prêtent beaucoup de matériel et de logiciels dans le cadre de ces événements.

Dimanche matin, 6 h. Fini de rire. L’heure n’est plus aux plaisanteries. Dans un peu plus de quatre heures, le jury se prononcera. Les participants dont les circuits cérébraux ou électroniques n’ont pas flanché travaillent d’arrache-pied. Devant son écran, un programmeur qui tombe de sommeil répète d’un ton monocorde et légèrement frustré : « Alexa, demandez à l’infirmier de me passer la scie… »

De son côté, Brad Moon, 23 ans, de l’Université de l’Alberta, apporte calmement la dernière touche à la grosse horloge inspirée de celle de la famille Weasley chère à Harry Potter, qu’il a réalisée avec Michelle Mabuyo, 22 ans. Dans la saga de J. K. Rowling, l’horloge des Weasley est magique. Elle indique à tout moment où se trouve chacun des membres de la famille : à l’école, au match de quidditch… ou en danger de mort. La version de M. Moon et de Mme Mabuyo utilise, elle, le système d’exploitation d’un téléphone mobile pour suivre les allées et venues des gens. Douze indications peuvent s’afficher : à l’école, au travail, en déplacement, invisible, etc.

« Par exemple, alors que vous vous dirigez vers la maison, vous pouvez voir que votre colocataire est en train de faire les courses, et éviter ainsi de passer à l’épicerie pour rien, explique Mme Mabuyo. On peut en plus se rendre invisible si on ne veut pas qu’on sache où on est. »

Michelle Mabuyo et Brad Moon de l'Université d'Alberta présente leur Weasley Clock. Photo par JK Liu.
Michelle Mabuyo et Brad Moon de l’Université d’Alberta présente leur Weasley Clock. Photo par JK Liu.

« Hack the North met l’accent sur l’apprentissage, affirme Danielle Strachman, membre du jury et associée au sein de l’entreprise de capital-risque 1517 Fund. On se demande si les participants ont appris quelque chose, vraiment tenté de relever un défi, ou s’ils se sont contentés de faire une chose qu’ils maîtrisaient. C’est en grande partie le but des marathons de programmation : faire en sorte que les gens essaient de nouvelles choses et se surpassent. »

L’excitation des participants à un événement comme Hack the North met évidemment du temps à retomber. Après le verdict du jury, de nombreux participants sont toujours là, errant entre les kiosques, s’emparant d’un dernier petit truc ou discutant avec de relations potentielles. « Je me promène et parle avec les gens, explique Alex McVitte, 22 ans, qui vient de se rappeler qu’aujourd’hui c’est son anniversaire. On ne sait jamais à quoi une conversation peut mener. Et puis, je suis encore sous l’effet de toute la caféine et des boissons énergisantes que j’ai ingurgitées… »

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