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L’Université McGill abandonne le nom d’équipe Redmen

Comme d’autres universités canadiennes, McGill revoit sa position au sujet d’un nom offensant.

par TERRI COLES | 12 AOÛT 19

En avril dernier, l’Université McGill a annoncé que le nom Redmen ne serait plus utilisé pour désigner ses équipes sportives masculines. C’est le dernier des établissements à laisser tomber une appellation associée à des stéréotypes dégradants pour les peuples autochtones.

Selon Fabrice Labeau, provost adjoint à la vie étudiante et aux études, la décision a reçu un accueil favorable jusqu’ici, en partie grâce à la déclaration officielle de la principale Suzanne Fortier. Dans son message, Mme Fortier explique avoir demandé l’avis de divers membres de l’établissement, dont des étudiants, des professeurs et des anciens, et tenu compte des recommandations d’un groupe de travail.

« La liberté universitaire, l’intégrité, la responsabilité, l’équité et l’inclusion constituent les valeurs et les principes fondamentaux de notre établissement. Ils nous définissent. C’est pourquoi ma décision concernant l’appellation Redmen doit en être le reflet », explique Mme Fortier dans son communiqué. Ces principes et ces valeurs font en sorte que l’Université ne peut conserver un nom qu’elle ne choisirait pas aujourd’hui en raison de ses connotations négatives pour les peuples autochtones, ajoute-t-elle.

Photo de Gabriel Helfant / The McGill Tribune.

« En fin de compte, beaucoup de gens sont d’accord avec la décision, et une grande part de ceux qui ne le sont pas la comprennent malgré tout », affirme M. Labeau.

La décision de l’Université McGill fait suite à une période de manifestations et de militantisme étudiants. Tomas Jirousek, un athlète universitaire de la nation Kainai, de la Confédération des Pieds-Noirs, était aux premières lignes de la campagne #ChangeTheName coordonnée par l’Association étudiante de l’Université McGill (AÉUM).

Il souligne que les efforts pour changer le nom Redmen étaient largement soutenus par les professeurs, les étudiants et le personnel, autochtones et non autochtones. Il ajoute que 80 pour cent des étudiants représentés par l’AÉUM appuyaient le changement. « Tout le monde s’est mobilisé, les Autochtones comme les non-Autochtones. Nous avons réclamé ce changement tous ensemble. »

L’effet néfaste du statu quo

L’Université McGill a commencé à utiliser la mascotte et le nom des Redmen dans les années 1920. Certains opposants au changement ont soutenu que l’appellation ne constituait pas une insulte raciste, mais qu’elle faisait plutôt référence à la couleur des uniformes portés par les athlètes de l’Université. M. Jirousek affirme toutefois que ses recherches sur les origines du nom contredisent cette affirmation. Il a en effet découvert que des noms comme « McGill Squaws » et « McGill Indians » avaient été utilisés avant l’adoption du nom Redmen.

« Cela détruit l’argument voulant que le nom n’ait rien à voir avec les peuples autochtones. L’histoire du nom le démontre, comme les chants et les uniformes associés à l’équipe au fil du temps. »

De multiples établissements au Canada et aux États-Unis ont abandonné des noms et des mascottes perçus comme racistes et offensants par des étudiants autochtones et non autochtones. Une nouvelle étude réalisée par des chercheurs de l’Université Yale démontre même que le fait de conserver des mascottes véhiculant des stéréotypes péjoratifs peut diminuer le sentiment d’appartenance des étudiants et la somme des dons versés aux établissements concernés. Un constat qui va donc à l’encontre d’une raison souvent invoquée pour le maintien de ces mascottes, soit la crainte de nuire aux campagnes de financement menées auprès des anciens fortement attachés à ces symboles.

Les chercheurs, dont les travaux portaient sur les mascottes autochtones, ont conclu que compte tenu de la hausse des crimes racistes aux États-Unis (une hausse aussi constatée au Canada), le moment semble particulièrement bien choisi pour retirer ce genre de mascottes des établissements d’enseignement.

Un précédent canadien

L’Université Memorial a décidé de laisser tomber le nom d’équipe Beothuks il y a près de 30 ans déjà. Mais à l’époque, ce n’était pas une simple question de vertu, explique Ralph Wheeler, professeur retraité et ancien étudiant-athlète de l’Université.

L’établissement, qui n’avait pas d’attachement particulier envers le nom Beothuks, souhaitait revitaliser l’image de ses équipes en leur donnant un nouveau nom et un nouveau logo. C’est le nom proposé par M. Wheeler, les Sea-Hawks, qui a été retenu.

Celui-ci croit toutefois que si le nom n’avait pas été abandonné à l’époque, il le serait aujourd’hui. Selon lui, le mouvement se poursuivra, surtout maintenant que les changements touchent les hautes sphères du sport. « Si les équipes professionnelles décident de changer, les universités et les ligues mineures leur emboîteront le pas », croit-il.

Noms unisexes

Le choix du nom Sea-Hawks illustre un autre motif de changement : le désir d’adopter un même nom et une même mascotte pour les équipes masculines et féminines. Mais même si l’Université Memorial utilise le nom et le logo des Sea-Hawks pour toutes ses équipes sportives, les médias locaux donnent parfois le surnom de Lady Hawks aux équipes féminines.

M. Wheeler ne croit toutefois pas qu’on rende service aux athlètes féminines en employant ce nom.

M. Labeau précise que l’Université McGill entreprendra le processus de sélection d’un nouveau nom et d’une nouvelle mascotte cet automne, et que tout McGill sera invité à y prendre part. M. Jirousek espère que l’établissement suivra l’exemple de l’Université Memorial et d’autres écoles qui ont opté pour des noms d’équipe unisexes. (Les équipes féminines de McGill se nomment les Martlets.)

« Il n’y a que deux universités au pays qui utilisent des noms différents pour les équipes masculines et féminines, conclut M. Jirousek, nous pourrions en profiter pour régler cette autre question par la même occasion. J’espère que la décision de l’Université ira en ce sens. »

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