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Anatomie d’un département

Quoi de mieux que de poser un regard sur l'évolution d'un département de sciences pour comprendre les différentes transformations vécues dans le milieu de l'éducation?

par MICHAEL SMITH | 05 OCT 09

Nous sommes en 1959. Il y a six ans à peine, James Watson et Francis Crick décodaient la structure de l’acide désoxyribonucléique, ouvrant la voie à une révolution biologique. Parallèlement, un petit groupe de visionnaires planifie l’ouverture d’une nouvelle université à Toronto, un établissement qui chamboulera les conventions et renouvellera l’enseignement et l’apprentissage.

Le lien entre les deux événements ne saute pas aux yeux, à moins de les envisager du point de vue de la biologie. À l’époque, la plupart des universités n’avaient pas de département de biologie. On y retrouvait des départements de botanique, de zoologie et, à l’occasion, de génétique. Autant de disciplines qui ne se croisent que très rarement.

« La biologie se présente à nos yeux sous forme d’organismes. Nous voyons des oiseaux, des plantes, des animaux, explique Ken Davey, un des plus éminents entomologistes du Canada. Pendant de très nombreuses années, l’organisation de la science a suivi cette logique dans les universités. »

Comptant une poignée d’étudiants et seulement trois scientifiques parmi son jeune corps professoral, la toute nouvelle Université York devient la première université au Canada à faire fi des vieilles divisions en ouvrant simplement un département de biologie. Et c’est en partie grâce à MM. Watson et Crick. Avant la publication de leurs travaux pionniers, les sciences biologiques se concentraient plutôt sur les différences entre les organis-mes. À la lumière de leurs découvertes, elles en viennent à s’intéresser davantage aux caractéristiques communes des espèces, explique M. Davey. La biologie, considérée comme l’étude des similarités, faisait son apparition.

L’Université York ouvre ses portes en 1960. À l’arrivée de Ron Pearlman en 1968, le département de biologie et ses huit membres s’installent tranquil-lement sur le nouveau campus, alors à peine construit. C’est justement un des aspects qui a séduit le jeune scientifique, se rappelle M. Pearlman. « Il n’y avait aucun précédent, personne pour dire “nous avons fait ça il y a 50 ans, alors vous ne pouvez pas le faire aujourd’hui”. »

Au cours de ses premières an- nées d’existence, le département de biologie de l’Université York est reconnu pour l’importance qu’il accorde à la biologie moléculaire, explique M. Davey, ancien directeur du département et ancien doyen de la faculté des sciences. La prochaine étape consiste alors à embaucher des professeurs intéressés par la biologie cellulaire qui appliqueraient les mêmes techniques que pour la biologie moléculaire, mais à un niveau d’organisation supérieur. M. Davey est recruté en 1974 lorsque le département décide de concentrer son étude au niveau de l’organisme, toujours du point de vue de la nouvelle biologie intégrée. Finalement, sous sa direction, l’Université recrute des chercheurs ayant un intérêt pour la biologie des populations.

L’Université devient alors un chef de file en matière de biologie au Canada, attirant certains des grands noms de cette discipline, mais la situation est éphémère. Malgré sa croissance spectaculaire, l’Université York ne possède pas les moyens financiers de certains établissements plus anciens et mieux établis. « D’autres universités venaient recruter nos professeurs en milieu de carrière » se remémore M. Davey.

Le département de biologie de l’Université York compte aujourd’hui 40 professeurs, ce qui en fait « un département de taille relativement importante par rapport aux normes nationales », estime Imogen Coe, sa directrice actuelle. La demande pour des cours de biologie a grimpé, une popularité en partie attribuable au rôle de plus en plus reconnu de la biologie dans la compréhension de la nature.

MM. Davey et Pearlman déplorent cependant la disparition de la méthode intégrée des sciences préconisée lors des premières années d’existence du département. Aujourd’hui, les étudiants de première année suivent des cours séparés dans diverses disciplines. Mme Coe affirme pour sa part que le département a toujours comme mission d’offrir une formation générale aux étudiants. C’est simplement la définition du mot « générale » qui a changé. L’acqui-sition de faits a été délaissée au profit de l’acquisition de principes fondamentaux. L’objectif consiste à amener les étudiants à aborder la biologie comme un tout pour comprendre l’unité de la vie plutôt que sa diversité, continue Mme Coe.

Cinquante ans plus tard, l’engoue-ment qu’ont suscité MM. Watson et Crick ne montre aucun signe d’essoufflement. « C’est l’âge d’or de la biologie », conclut Mme Coe.

Rédigé par
Michael Smith
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