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À mon avis

Coup dur pour l’image du Canada à l’étranger

L’élimination du programme Comprendre le Canada est une offense affligeante et énigmatique portée aux études canadiennes dans le monde entier.

par PAUL MARTIN | 27 JUIN 12

J’ai passé les derniers mois à essayer de saisir pourquoi le gouvernement de mon pays voudrait, d’un simple coup de crayon, nuire autant à ma discipline et aux milliers de spécialistes des études canadiennes qui travaillent sans relâche pour promouvoir l’étude du Canada dans le monde. Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international du Canada (MAECI) a annoncé le 30 avril dernier (PDF) qu’il abolissait le programme Comprendre le Canada (également connu sous le nom de Programme d’études canadiennes), un coup dévastateur pour tous ceux qui ont consacré leur carrière avec enthousiasme à l’étude du Canada et à la prestation de cours sur le Canada à l’étranger.

Au fil des 41 dernières années, ce programme d’une incroyable efficacité — malgré son modeste budget annuel de cinq millions de dollars — s’est révélé l’un des piliers de la diplomatie publique au MAECI. Grâce à ces fonds, des programmes et des cours d’études canadiennes existent dans 50 pays et plus de 7 000 spécialistes des études canadiennes travaillent à l’extérieur du Canada, souvent en association avec l’un des 290 centres d’études canadiennes établis dans le monde entier. Cette remarquable réussite n’aurait jamais été possible sans l’appui du MAECI sous forme de subventions annuelles aux 28 associations nationales et aux programmes d’études canadiennes, de parrainage direct de la recherche universitaire et de financement de conférences et de programmes destinés aux étudiants.

L’élimination du programme nuira profondément à la réputation internationale du Canada, dans les cercles universitaires et ailleurs. Certains de ces dommages seront immédiats, alors que presque tous les programmes et associations d’études canadiennes dans le monde seront forcés d’éliminer des cours ou de fermer définitivement. Les chercheurs qui utilisaient leurs subventions pour aider à financer leurs déplacements au Canada aux fins de recherche éprouveront beaucoup de difficulté à obtenir de leur université qu’elle assume en partie les coûts souvent prohibitifs associés à la recherche; les voyages annuels au Canada offerts aux étudiants seront annulés; les sommes qui permettent aux universités étrangères d’accueillir des conférenciers canadiens pour mousser l’intérêt des étudiants pour le Canada disparaîtront.

À plus long terme, cette abolition amputera radicalement la capacité des chercheurs et des étudiants étrangers à donner des cours et à parfaire leurs connaissances du Canada. Devant le manque d’intérêt évident du MAECI envers ceux qui, à l’étranger, tâchent de mieux « comprendre le Canada », les universitaires et les étudiants du monde entier pourraient bien déduire qu’il n’est après tout pas si important d’étudier notre pays.

À titre de directeur du programme d’études canadiennes à l’Université du Vermont, de 2006 à 2011, j’ai pu constater les énormes retombées pour le Canada de cet investissement minime du MAECI. Fondé en 1964, avant même la plupart des programmes d’études canadiennes au Canada, le programme de l’Université du Vermont a, au fil des ans, reçu la visite de premiers ministres et d’ambassadeurs, organisé une multitude de conférences et de colloques sur le Canada, hébergé le American Review of Canadian Studies et, plus important encore, fait découvrir les études canadiennes à des dizaines de milliers d’étudiants américains.

Grâce au financement d’environ 10 000 $ par année que nous avons reçu par l’entremise du programme Comprendre le Canada au cours de mon mandat de directeur, nous avons pu obtenir des fonds de contrepartie d’autres secteurs de l’Université et organiser la venue de politiciens canadiens, de dirigeants autochtones et d’écrivains comme Michael Ondaatje, Joseph Boyden et Alistair MacLeod. Ces expériences très formatrices ont donné corps au Canada dans l’esprit de nos étudiants et nous ont aidés à leur faire saisir toute l’importance que revêt le Canada pour les États-Unis.

Chaque année en octobre, nous organisions également un voyage de trois jours à Ottawa auquel participaient près de 100 étudiants. Le groupe visitait le Musée des beaux-arts du Canada et le Musée canadien des civilisations, en plus d’assister à la période des questions à la Chambre des communes et de rencontrer des députés comme l’honorable James Moore, aujourd’hui ministre du Patrimoine canadien et des Langues officielles. Les étudiants citaient le plus souvent leur expérience au Parlement comme le point fort de leur séjour. Le budget de notre voyage annuel, entièrement consacré aux frais d’hébergement, aux visites au musée et à d’autres activités culturelles, dépassait les 25 000 $, dont la totalité était dépensée au Canada.

À mon avis, cependant, la plus importante retombée de cet investissement provient des nombreux étudiants diplômés de l’Université du Vermont qui considèrent leur voyage à Ottawa comme la meilleure expérience de leur parcours au premier cycle. Certains de ces étudiants sont revenus au Canada pour étudier, et quelques-uns ont même choisi de s’y installer de façon permanente. Tous ont appris à voir le Canada d’une autre manière et à diffuser ce savoir dans le cadre de leur vie professionnelle et personnelle aux États-Unis. Cette forme de diplomatie publique est précieuse pour le Canada et son gouvernement. Pour nous, qui avons observé la réaction de nos étudiants à l’égard du Canada année après année, la décision d’abolir ce programme est totalement inexplicable et infiniment navrante.

Paul Martin était directeur du programme d’études canadiennes à l’Université du Vermont de 2006 à 2011. Depuis, il est revenu au Canada et s’est joint au corps professoral de l’Université MacEwan, à Edmonton.

COMMENTAIRES
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  1. Louise Brunette / 27 juin 2012 à 14:02

    Et ce n’est pas fini. Le Canada est sous le joug des capitalistes de l’Ouest, qui n’ont pas besoin de recherche ou de diplomatie vu qu’ils ont le pétrole.

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