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Un jugement réaffirme la confidentialité des données de recherche

La Cour supérieure du Québec est revenue sur sa décision d’obliger la chercheuse Marie-Ève Maillé à dévoiler ses données de recherches confidentielles.

par PASCALE CASTONGUAY | 02 JUIN 17

La Cour supérieure du Québec a tranché en faveur de la chercheuse Marie-Ève Maillé qui n’aura pas à divulguer ses données confidentielles colligées en 2010 dans le cadre d’une recherche. Dans son jugement rendu public le 31 mai 2017, le juge Marc Saint-Pierre a rétracté sa précédente décision datant du 13 février 2016 obligeant la chercheuse de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) à partager ses données brutes avec une entreprise qui a développé un projet éolien au Québec, Éoliennes de l’Érable.

Mme Maillé n’a pas caché son soulagement à l’effet que la décision du juge lui soit favorable. « J’étais convaincue de la justesse de ma cause, mais c’est rassurant de voir que le système de justice reconnaît, lui aussi, la nécessité de protéger la confidentialité des données de recherche », affirme-t-elle. Malgré cette victoire, la chercheuse s’est dite  « déçue de ne pas avoir pu éclairer le juge avec des éléments de ma recherche ». Celle-ci estime que « notre devoir de chercheur est de diffuser, au-delà des cercles universitaires, les connaissances que nous contribuons à produire ».

Rappelons les faits saillants de cette affaire. En 2010, alors que Mme Maillé était doctorante, elle a recueilli les témoignages de 93 résidents de la région d’Arthabaska, à l’est de Montréal. Son étude portait sur la cohésion sociale entre les résidents de deux villages divisés par un conflit environnemental entourant le grand parc éolien de l’entreprise Éoliennes de l’Érable. Mme Maillé a ensuite publié les résultats de son étude et achevé son doctorat en 2012. La même année, en raison des inconvénients provoqués par la construction et l’exploitation du parc éolien, un groupe de résidents a intenté un recours collectif contre l’entreprise propriétaire de ce parc.

C’est en 2015 que le groupe de résidents a demandé à Mme Maillé de témoigner devant le tribunal à titre d’expert. Celle-ci, croyant qu’elle n’aurait qu’à lire quelques passages de sa thèse, a accepté. En octobre 2015, elle apprenait que le juge de la Cour supérieure souhaitait qu’elle communique à la défense l’ensemble des résultats de son étude. Ayant promis la confidentialité aux 93 participants, elle s’est adressée au juge pour qu’il revienne sur sa décision visant la divulgation de ces données. Devant l’échec de sa requête, elle a retiré son nom de la liste des témoins dans cette cause.

En dépit de ce retrait, en mars 2016, elle a reçu une ordonnance la sommant de produire les données brutes de son étude. Une fois de plus, en juin 2016, elle a déposé une requête invitant le juge à reconsidérer sa décision. Cette tentative est ce qui a mené à l’audience en mai dernier où Mme Maillé a pu prendre la parole, donnant au passage l’occasion à l’UQAM, aux Fonds de recherche du Québec et à l’Association canadienne des professeures et professeurs d’université d’exposer leur position sur l’importance de protéger la confidentialité des données de recherche.

Réactions de la communauté scientifique

La communauté de la recherche du Québec s’est réjouie de l’issue de l’affaire Maillé. « Les chercheurs ont une obligation légale et un devoir éthique de confidentialité envers les participants, explique Rémi Quirion, scientifique en chef du Québec, dans un communiqué. Pour que les citoyens acceptent de participer à des projets de recherche, ils doivent se sentir en confiance. Si ce lien de confiance n’est pas préservé, la participation et la qualité des recherches pourraient être mises en péril. Cette décision réaffirme l’importance de la protection de l’identité des participants pour l’intérêt supérieur de la science ».

Même son de cloche du côté de la Fédération québécoise des professeures et professeurs d’université (FQPPU). « Si Mme Maillé avait été forcée de révéler ses sources, cela aurait entrainé des conséquences néfastes pour tous les chercheurs, qui auraient dorénavant peiné à recruter des volontaires pour participer à leurs recherches », précise Jean-Marie Lafortune, président de la FQPPU, qui s’est dite satisfaite de la décision de la cour.

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