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Conduire, au crépuscule de sa vie

Des chercheurs canadiens travaillent à la conception d’un outil qui permettra d’évaluer la capacité de conduire des aînés.

par TIM JOHNSON | 09 JAN 12

Pour nombre de citoyens canadiens âgés, l’une des pires épreuves qu’ils devront traverser est le retrait de leur permis de conduire. Lorsqu’un médecin décrète qu’ils ne pourront plus prendre le volant, les aînés pensent perdre une raison de vivre. Cette décision ne touche pas seulement eux; elle peut avoir des répercussions majeures sur la qualité de vie de leur famille, et surtout leurs enfants.

« Il s’agit d’un deuil important », affirme le Dr Shawn Marshall, directeur médical du programme de réadaptation des victimes de traumatismes crâniens du Centre de réadaptation de l’Hôpital d’Ottawa et professeur agrégé de médecine à l’Université d’Ottawa, ajoutant que leur capacité à fonctionner en société est alors menacée et que cette situation est source de stress autant pour eux que pour leur famille.

Le Dr Marshall est coresponsable de l’initiative canadienne sur la conduite automobile chez les aînés, CanDRIVE, une enquête longitudinale quinquennale financée par les Instituts de recherche en santé du Canada et menée dans sept villes auprès de 932 conducteurs âgés de 70 ans et plus. Plus de quatre millions de Canadiens sont âgés de plus de 65 ans, et 2,8 millions d’entre eux détiennent un permis de conduire. Des études ont démontré que le taux d’accidents responsables grimpe en flèche à partir de 70 ans. CanDRIVE est l’enquête la plus complète jamais entreprise sur la conduite automobile des personnes âgées.

La responsabilité de déterminer l’incapacité à conduire d’une personne âgée revient essentiellement au médecin de famille, la plupart des provinces obligeant les médecins à retirer lepermis à un patient qui leur semble incapable de conduire une voiture. Il s’agit d’une lourde responsabilité susceptible de provoquer des conflits dans la salle d’examen, une expérience qu’a personnellement vécue le Dr Marshall.

Les méthodes employées jusqu’ici pour prendre cette décision ne sont pas fondées sur des données probantes et présentaient donc un très haut taux de résultats faux positifs. En effet, des conducteurs sont déclarés inaptes alors qu’un examen plus poussé dément ensuite ce verdict. Le principal but de l’enquête est de doter les médecins d’un outil de dépistage efficace et fondé sur des données probantes qui les aideront à prendre la bonne décision.

Tous les participants canadiens à l’initiative, qui arrive à mi-parcours, ont été recrutés, ainsi que 250 participants australiens et néo-zélandais. Les véhicules des participants ont été équipés d’un système de localisation GPS afin d’enregistrer des données sur différents éléments associés à la conduite, comme le freinage et le type de route choisi par le conducteur. Les chercheurs ont également recueilli de nombreuses données sur la santé ainsi que sur les fonctions comportementales et cognitives des participants.

Des projets connexes, sur lesquels travaillent des chercheurs des universités du Manitoba, de Victoria, de Waterloo et d’Ottawa ainsi que des universités Western Ontario, McGill et Lakehead, sont en cours dans les sept villes où se déroule l’enquête. Ils visent autant à évaluer les caractéristiques automobiles adaptées aux besoins des conducteurs âgés qu’à étudier les influences et les interactions de divers facteurs, comme la confiance, la motivation, les convictions et l’attitude, sur la prise de décisions en matière de conduite.

À l’Université Lakehead, Michel Bédard tente de concevoir un simulateur qui offrirait une méthode d’évaluation normalisée quel que soit l’endroit où le test est effectué. Cet outil reproduirait des difficultés concrètes dans un environnement sécuritaire, ce qui permettrait d’obtenir d’importants renseignements sur les habiletés de conduite d’une personne.

Bien que l’examen sur route soit considéré comme la méthode idéale, M. Bédard, directeur du Centre de recherche sur la conduite sécuritaire de l’Université Lakehead, est d’avis qu’il est très ardu d’obtenir des résultats homogènes en toutes circonstances avec un tel examen, compte tenu de l’inévitable variation des conditions routières. Il ajoute que le simulateur permet aux chercheurs de mettre les conducteurs à l’épreuve afin d’observer leurs réactions dans différents contextes.

Les deux chercheurs s’entendent pour dire que l’objectif est de maintenir sur la route les conducteurs âgés aptes à conduire. Lorsqu’ils ne souffrent pas de problèmes de santé ou de troubles cognitifs, tels que la diminution des fonctions motrices et de l’attention visuelle, ou de certaines maladies dégénératives comme la maladie d’Alzheimer, les aînés figurent parmi les conducteurs les moins dangereux sur la route.

Le Dr Marshall mentionne que l’enquête, dans l’ensemble, devrait permettre de déterminer quand des cours de remise à niveau sont suffisants ou quand la délivrance d’un permis de conduire conditionnel ou assorti de restrictions serait plus approprié que le retrait pur et simple du permis. Le recours à de meilleurs outils d’évaluation, conclut-il, sera utile à tous.

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