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Des cibles plus ambitieuses en matière d’équité pour le Programme des chaires de recherche du Canada

Les changements touchent les quatre groupes désignés : les femmes, les personnes handicapées, les Autochtones et les personnes issues de minorités visibles.

par MATTHEW HALLIDAY | 13 SEP 19

Après 13 années de lents progrès vers l’atteinte des objectifs du Programme des chaires de recherche du Canada en matière d’équité, les efforts se multiplient pour accroître la diversité dans les établissements participants. Le 31 juillet, le Secrétariat des programmes interorganismes à l’intention des établissements – qui représente les trois organismes subventionnaires, dont le financement détermine l’attribution des chaires de recherche – a annoncé des cibles plus ambitieuses pour la représentation des membres des quatre groupes désignés : les femmes, les personnes handicapées, les Autochtones et les personnes issues de minorités visibles.

Les nouvelles cibles font partie d’un addenda à l’entente de règlement de 2006 conclue avec le Programme relativement à une plainte pour violation des droits de la personne. Cette plainte a été déposée en 2003 par huit chercheuses selon qui la faible représentation des groupes désignés était discriminatoire. Outre les cibles plus ambitieuses, l’addenda prévoit de nouveaux mécanismes de reddition de comptes, qui constituent « à la fois la carotte et le bâton » pour les établissements qui n’atteignent pas les nouveaux objectifs, selon David Robinson, directeur général de l’Association canadienne des professeures et professeurs d’université.

« Ces dernières années, nous avons constaté une stagnation, voire un recul de certains établissements par rapport à leurs objectifs, explique M. Robinson. De toute évidence, ils doivent en faire plus. »

Les cibles seront établies en fonction de la représentation de chaque groupe dans la population générale selon les données du recensement fédéral de 2016. Cela représente un bond considérable par rapport aux cibles actuelles, déterminées selon la disponibilité des membres de chaque groupe dans le bassin de chercheurs universitaires – une méthode qui, d’après ses critiques, aggrave la sous-représentation de divers groupes dans le milieu universitaire.

Les cibles passent de 31 à 51 pour cent pour les femmes, de 4 à 7,5 pour cent pour les personnes handicapées, de 1 à 4,9 pour cent pour les Autochtones et de 15 à 22 pour cent pour les personnes issues de minorités visibles.    

« Ce que j’apprécie particulièrement de ce changement, c’est que les nouvelles cibles rappellent que l’engagement touche les quatre groupes désignés, explique Malinda Smith, professeure en sciences politiques à l’Université de l’Alberta, qui s’est penchée sur les pratiques de recrutement équitable dans les universités canadiennes. De nombreuses personnes se sont concentrées sur le fait que la plainte initiale avait été déposée par huit femmes, ce qui en faisait une affaire d’équité entre les sexes. Les autres groupes ont souvent été écartés du débat. »

Selon Mme Smith, la faute revient en partie aux universités qui ont omis de recueillir des données prouvant leur progrès par rapport aux cibles des trois autres groupes désignés, et qui ont souvent utilisé des méthodes diverses ne pouvant être comparées entre les établissements. « Dans bien des cas, le personnel qui recueille les données n’est pas issu de la diversité et peut être mal à l’aise d’aborder les questions. Cette situation mène à l’intransigeance, et ces personnes évoquent la protection de la vie privée et d’autres préoccupations pour justifier l’absence des données. »

Depuis 2017, le Plan d’action en matière d’équité, de diversité et d’inclusion vise à résoudre ce problème. Il exige que les établissements se dotent d’un plan pour atteindre les objectifs initiaux, publient ce plan en ligne et atteignent les objectifs d’ici décembre prochain. Après la mise en œuvre du Plan d’action, dans les candidatures soumises, la représentation des quatre groupes désignés a augmenté considérablement. En juin, elle avait atteint, voire dépassé pour la première fois, les cibles initiales.

Toutefois, le succès n’est pas total. Par exemple, la diversité des titulaires est beaucoup moins grande pour les chaires de niveau 1 que pour celles de niveau 2. Seuls 24 pour cent des chaires de niveau 1 sont détenues par des femmes, 14 pour cent par des personnes issues de minorités visibles et moins d’un pour cent (5 sur 795) par des Autochtones. Pour réduire les écarts, les 15 plus grandes universités du pays, qui détiennent collectivement 70 pour cent des chaires de recherche, ne pourront plus regrouper les cibles et devront plutôt atteindre une diversité équivalente à chacun des deux niveaux.

L’addenda prévoit également les toutes premières mesures destinées à appuyer les membres universitaires de la communauté LGBTQ2+, par exemple par la collecte de renseignements autodéclarés et l’élaboration de pratiques exemplaires de recrutement et de maintien en poste des membres de ce groupe.

Les établissements qui ratent leurs cibles pourraient faire l’objet de mesures punitives. « Ils risquent de perdre leur financement, explique M. Robinson. Espérons que cela ne sera pas nécessaire, mais il s’agit d’un facteur important à prendre en considération. »

Les universités doivent atteindre les cibles au plus tard en 2029. Les résultats seront alors comparés aux plus récentes données de recensement.

Les opposants à cette démarche fondée sur l’équité lui reprochent entre autres de favoriser la diversité au détriment de l’excellence. Cet argument ne tient pas la route selon Alice Aiken, vice-rectrice à la recherche et à l’innovation à l’Université Dalhousie. Mme Aiken explique que l’Université Dalhousie collabore avec une entreprise de recrutement qui tente de ne pas recruter les candidats seulement aux « endroits habituels » afin d’accroître la diversité au sein de son corps professoral.

« Cela m’irrite au plus haut point lorsque les gens affirment que l’excellence devrait être la priorité, déclare-t-elle. Le Canada compte environ 2 000 chaires de recherche. Ceux qui n’arrivent pas à trouver 2 000 universitaires compétents issus de divers milieux ne se donnent pas beaucoup de mal dans leur recherche. »

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