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La fusion et l’allègement des collections sont des signes des temps

Les universités centralisent les collections des bibliothèques et font le tri pour laisser plus de place au travail en équipe, grâce à l’espace gagné par la numérisation des ouvrages.

par JESSE B. STANIFORTH | 04 DÉC 13

L’Université McGill affirme qu’elle n’a pas fermé sa bibliothèque des sciences de la vie, et précise que la collection d’ouvrages peu utilisés a simplement été transférée ailleurs sur le campus. Aux dires des nombreux bibliothécaires et membres du personnel opposés au changement, toutefois, le déménagement des ouvrages vers une autre bibliothèque à 10 minutes de là (au pavillon du gymnase de l’Université) équivaut à une fermeture. Trois semaines avant le début du transfert prévu le 1er septembre, les administrateurs du groupe Facebook « Save the McGill Life Sciences Library from closure » (plus de 1 500 adeptes) ont publié un éloge funèbre qu’ils ont conclu par un vibrant « repose en paix ».

Les changements qui s’opèrent à l’Université McGill font écho au mouvement observé dans plusieurs bibliothèques universitaires canadiennes, qui centralisent les collections peu consultées et font le tri de leurs ouvrages. L’an dernier, l’Université de la Colombie-Britannique (UBC) a fermé la bibliothèque du St. Paul’s Hospital ainsi que la bibliothèque Hamber du BC Children’s and Women’s Hospital. Cette année, l’Université de l’Alberta a intégré sa bibliothèque de musique à sa collection générale. En janvier, l’Université de la Saskatchewan a annoncé que 1,1 million d’ouvrages seraient retirés des rayons de quatre de ses bibliothèques (médecine vétérinaire, génie, droit, ainsi qu’éducation et musique) à compter de septembre. Des changements semblables ont eu lieu récemment dans des universités américaines et européennes.

« C’est un signe des temps, affirme Dean Giustini, bibliothécaire de référence à la bibliothèque biomédicale de la UBC et membre du comité directeur de l’Association canadienne des bibliothécaires académiques professionnels. La demande d’accès numérique aux collections et aux bibliothécaires augmente de manière évidente. »

Brent Roe, directeur général de l’Association des bibliothèques de recherche du Canada (ABRC), signale un autre facteur tout aussi important : on exige de plus en plus de libérer de l’espace pour les usagers dans les bibliothèques. Partout au pays, dit-il, « la population étudiante augmente, mais les nouvelles bibliothèques sont rares. On constate un besoin criant d’espace pour étudier, et pas seulement en silence – il faut un lieu où les étudiants peuvent travailler en équipe, se servir des logiciels et des ressources en ligne et utiliser du matériel spécialisé pour certains cours ».

M. Roe souligne la popularité croissante du nouveau modèle du « centre d’apprentissage », où la bibliothèque n’est plus autant une réserve d’ouvrages à consulter en silence, et devient de plus en plus un lieu de rassemblement accueillant différents types d’apprentissage. Ce nouveau modèle intègre davantage de personnel capable d’appuyer les étudiants dans leur apprentissage et leurs recherches : le personnel de la bibliothèque qui les aide à accéder à l’information et à utiliser les ressources, les employés du centre d’aide à la rédaction de l’université qui les aident à rédiger et à réviser leurs travaux, ainsi que les techniciens en informatique qui les aident à utiliser les ordinateurs et les logiciels. Les livres sont sans doute moins nombreux, affirme M. Roe, mais ils demeurent une partie intégrante de la bibliothèque en tant que centre d’apprentissage.

« Souvent située au centre du campus, la bibliothèque est un endroit plutôt confortable, accueillant et sûr, ajoute M. Roe. C’est l’endroit par excellence où aller étudier. L’achalandage des bibliothèques universitaires est très élevé et augmente constamment. C’est très impressionnant. »

Malheureusement, le modèle du centre d’apprentissage va souvent à l’encontre des collections imprimées, en particulier les recueils de revues et autres documents de référence, qui occupent beaucoup trop d’espace compte tenu de leur fréquence de consultation. Pour cette raison, explique M. Roe, nombre de bibliothèques et de bibliothécaires ont salué l’arrivée des publications numériques, notamment pour les revues savantes, qui contribuent à limiter les collections de documents imprimés peu consultés.

M. Giustini abonde dans le même sens, signalant que bien que la moitié seulement des documents nécessaires aux chercheurs et aux étudiants en science et en médecine soient offerts en format électronique, ces collections numériques répondent à une grande partie des besoins. « À mon avis, les collections numériques et imprimées sont complémentaires pour les universitaires, et les deux sont essentielles. »

M. Giustini soutient que les documents d’archives (les sources primaires et les éditions originales) doivent être conservés sous clé, mais qu’on ne devrait pas être obligé d’attendre pour les consulter. « Les bibliothèques universitaires, tout comme les établissements qu’elles desservent, doivent s’ajuster au nouvel écosystème de l’information qu’a créé Internet. Le personnel et les ressources des bibliothèques sont sollicités différemment. La décision prise par l’Université McGill est impopulaire et ce n’est pas celle que j’aurais prise, mais ce n’est qu’une parmi tant d’autres. »

Il est difficile de comprendre exactement ce qui s’est passé à l’Université, le caractère émotif et la polarisation du débat étant tels qu’aucune des deux parties n’a voulu officiellement le commenter. Néanmoins, les administrateurs ont récemment indiqué sur la page Web de la bibliothèque qu’ils lançaient une consultation sur le réaménagement de la Bibliothèque des sciences de la vie, invitant les usagers à envoyer leurs suggestions par courriel ou à les inscrire sur un tableau prévu à cet effet dans l’édifice abritant la bibliothèque.

Selon M. Roe, d’autres changements s’annoncent pour les collections dans les années à venir. « Depuis 20 ans, la tendance générale consiste à regrouper les collections dans de plus grands espaces. Chaque fois, on constate une certaine résistance. Théoriquement, rien ne disparaît, mais les ressources ne sont plus à portée de main, là où elles ont toujours été. »

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