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La dernière frontière

Un mégaprojet de recherche dévoilera sous peu les mystères des profondeurs océaniques

par ANNE MULLENS | 21 SEP 09

Au début, l’aventure était totalement hypothétique, mais NEPTUNE Canada est maintenant un projet concret de 125 millions de dollars. C’est le plus grand et le plus avancé des observatoires océaniques par câbles, et il révélera, en temps réel, au cours des 25 prochaines années, les secrets de l’océan.

Dirigé par l’Université de Victoria et établi au large de la Colombie-Britannique, le projet réunit 13 universités canadiennes, quatre universités étrangères, des instituts de recherche, des gouvernements et le secteur de l’industrie. Des centaines de scientifiques, de chercheurs, d’ingénieurs et de technologues ont contribué à mener le projet à terme cet automne. Baptisées Northeast Pacific Time-Series Undersea Networked Experiments, les installations recueilleront des données entre autres sur les mouvements des plaques tectoniques pour la surveillance des tsunamis et des tremblements de terre, sur le comportement et les migrations des baleines, sur la concentration de l’eau en nutriments, sur les dépôts d’hydrate de gaz et sur les effets des changements climatiques, comme l’acidification.

Chris Barnes, directeur du projet, estime que c’est en eau profonde, et non dans l’espace, que se trouve l’ultime frontière, et que NEPTUNE est l’équivalent sous marin du télescope Hubble. Il y a environ 15 ans, une poignée de chercheurs en sciences océaniques, incités par John Delaney, professeur d’océanographie à l’Université de Washington, ont commencé à rêver, autour d’un pichet de bière, à la façon d’utiliser les réseaux de câbles sous-marins pour recueillir des données en eau profonde.

« Les câbles transocéaniques ne sont pas nouveaux, ils existent depuis environ 150 ans, souligne M. Barnes, mais nous avons commencé à envisager la possibilité d’ajouter de nouveaux câbles de fibre optique à grande puissance et d’y raccorder nos instruments là où nous voulons recueillir l’information dont nous avons besoin. »

De ces modestes débuts est né un mégaprojet scientifique international, mais il aura fallu du temps pour trouver les fonds et mettre au point la technologie nécessaire pour passer du rêve à la réalité, rappelle M. Barnes, professeur émérite et expert des sédiments océaniques à l’Université de Victoria. C’est au Canada que les fonds de démarrage ont d’abord été rassemblés; les quelque 62 millions de dollars provenant du gouvernement fédéral et du gouvernement de la Colombie-Britannique en 2003 constituaient à l’époque la plus importante subvention de recherche jamais accordée au pays et ont permis aux chercheurs canadiens de procéder sérieusement à l’embauche et à la planification dans le cadre du projet. Les idéaux des débuts ont alors pris des dimensions plus réalistes. Plutôt que de couvrir 3 000 kilomètres aux États-Unis et au Canada et de compter des dizaines de nœuds, on a installé une boucle de 800 kilomètres de câbles et de cinq nœuds au large de la Colombie-Britannique. Un autre câble est en voie d’installation au large de l’État de Washington.

En 2007, l’équipe a commencé à installer la boucle au-dessus de la plaque tectonique Juan de Fuca à partir de Barkley Sound, sur la côte ouest de la Colombie-Britannique, à une profondeur atteignant parfois 2,6 kilomètres. Cinq grands nœuds jaune vif sont rattachés au câble principal par des câbles secondaires pouvant atteindre 20 kilomètres de long. Les nœuds fournissent l’énergie, permettent une communication bidirectionnelle et abritent les instruments de collecte de données. Le câble émerge sur l’Île de Vancouver, où il se poursuit sur 200 kilomètres pour transmettre les données à l’Université de Victoria.

Les données devraient commencer à arriver d’ici novembre. Déjà, on trouve à www.neptunecanada.ca du contenu vidéo en direct, des blogues et des messages Twitter qui permettent de suivre le déploiement délicat des nœuds et l’évolution du projet.

Les défis techniques ont été immenses; il a fallu notamment construire des instruments et des nœuds capables de résister aux grandes pressions marines, à l’effet corrosif du sel et même aux tremblements de terre et aux tsunamis. La majeure partie des infrastructures a été conçue, fabriquée et installée par Alcatel-Lucent, le géant français des télécommunications, ou ses sous-traitants.

Les frais d’exploitation s’élevant à 12 millions de dollars par année, le financement représente aussi un énorme défi, et les responsables du projet sont toujours à la recherche de financement à long terme au-delà de 2010.

Martin Taylor, qui dirige un organisme spécial mis sur pied pour gérer le volet financier et administratif du projet, affirme qu’il n’a jamais été plus important que maintenant de comprendre nos océans pour l’avenir de notre planète et de nos sociétés.

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