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Manning: un improbable allié politique?

Preston Manning est depuis longtemps un avisé défenseur de la science

par DANIEL MCCABE | 11 JAN 10

Les relations entre le gouvernement fédéral et les chercheurs universitaires ne sont pas des plus cordiales ces derniers temps. Les scientifiques critiquent vivement les compressions mineures apportées aux budgets des principaux organismes subventionnaires de recherche fédéraux, tandis que le gouvernement conservateur s’indigne de ne pas recevoir suffisamment de crédit pour les milliards de dollars consacrés à la recherche universitaire dans son dernier budget.

Au cœur de cette tourmente, un homme se positionne comme un possible médiateur et en surprend certains. Il s’agit de Preston Manning, fondateur du défunt Parti réformiste et figure de proue de longue date des cercles politiques conservateurs.

Les propos tenus par M. Manning lors de la Conférence sur les politiques scientifiques canadiennes qui s’est déroulée à Toronto en octobre ont plu à un grand nombre de scientifiques présents. En mai dernier, à la suite d’une conférence que M. Manning a donnée lors d’un autre forum sur les politiques, Paul Wells, chroniqueur au magazine Maclean’s, a écrit que plusieurs universitaires ont été surpris de constater que l’ex-politicien tenait des propos aussi informés et sensés, mais que quelques anciens du Parti réformiste et même quelques journalistes présents n’en étaient pas du tout surpris.

M. Manning s’intéresse depuis longtemps à la science. Lors de ses études au premier cycle à l’Université de Calgary, il a flirté avec la physique avant de se tourner vers l’économie. Il a déjà été porte-parole de l’opposition officielle en matière de sciences et de technologie et, après avoir quitté la politique fédérale, il a donné un cours à l’Université de Toronto sur les ramifications politiques de la génétique. M. Manning est encore actif dans les cercles scientifiques et technologiques; il préside le conseil d’administration de l’Institut national de nanotechnologie et siège à celui du Conseil des académies canadiennes.

En fait, M. Manning est l’un des rares hommes politiques du Canada susceptibles de laisser traîner le plus récent numéro de la revue Nature sur sa table de chevet (il y est abonné). Selon lui, c’est là une partie du problème : « Je trouve inquiétant que très peu d’élus au Parlement possèdent une formation scientifique quelconque ». Il aimerait voir plus de scientifiques embrasser une carrière politique.

M. Manning estime que seuls huit députés fédéraux sur 308 possèdent plus qu’une vague connaissance des dossiers scientifiques. Ce manque d’expertise empêche la tenue de débats constructifs sur la démarche du Canada en matière de sciences. « Les gens évitent de parler de sujets qu’ils ne maîtrisent pas », souligne M. Manning. Cependant, bon nombre des questions nationales les plus urgentes ont une dimension scientifique, qu’il s’agisse des soins de santé, de l’environ-nement ou de l’économie axée sur le savoir, affirme-t-il.

Lors d’une activité organisée à Montréal récemment par Media@McGill, un nouveau centre de l’Université McGill qui se penche sur les médias, la technologie et la culture, M. Manning a affirmé que « les partis politiques modernes sont d’abord et avant tout des machines électorales ». Il leur reste donc très peu d’énergie à consacrer à une réflexion approfondie sur des questions politiques, en particulier sur celles qui relèvent des sciences.

Dans le cadre des travaux du Centre Manning pour le renforcement de la démocratie, une ONG à l’idéologie conservatrice qu’il a cofondée en 2005, M. Manning a identifié 120 sujets « qu’il faut connaître pour diriger un gouvernement provincial ou fédéral ». Dans la plupart des cas, il existe des groupes de réflexion ou des instituts politiques que les partis peuvent consulter, mais très peu offrent un apport constructif en sciences.

Le milieu universitaire a l’occasion de combler ce vide, mais il doit bien jouer ses cartes, estime M. Manning. Tout d’abord, les scientifiques qui offrent des opinions d’experts doivent faire attention de ne pas faire valoir leurs propres intérêts : « Si on demande de l’argent en même temps qu’on formule des conseils, le gouvernement risque fort de remettre en question la pertinence de ces conseils », explique-t-il.

Les scientifiques doivent également se mettre à la place de leurs destinataires en laissant tomber le jargon, en communiquant clairement leur message et en évitant de passer par quatre chemins. Lorsque le gouvernement a élaboré le cadre de sa politique en matière de sciences et de technologie, les mémoires qu’il a reçus du milieu scientifique ne répondaient que rarement à ces critères, se désole M. Manning.

On accuse les politiciens de manifester peu d’intérêt pour le travail des chercheurs, mais M. Manning estime que les deux parties ont leur part de responsabilités : « Lorsque j’étais politicien et qu’on m’invitait à m’exprimer devant des universitaires, la plupart des invitations provenaient de personnes en journalisme, en droit ou en science politique. Les politiciens sont très rarement invités à prononcer des discours devant des biologistes, des physiciens ou des chimistes. »

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