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Le perfectionnisme nuirait à la productivité en matière de recherche

Selon une nouvelle étude, ce trait défavorable pourrait nuire à la carrière d’un professeur.

par LÉO CHARBONNEAU | 12 JAN 11

Si le perfectionnisme est parfois considéré comme un trait positif qui est récompensé ou confirmé, Simon Sherry, professeur de psychologie à l’Université Dalhousie, croit pour sa part qu’il s’agit plutôt d’un comportement autodestructeur.

L’effet peut être particulièrement pernicieux chez les professeurs. Dans une récente étude, M. Sherry et ses collègues ont découvert que le perfectionnisme peut nuire à la productivité en recherche. D’après les résultats, il semble que les professeurs qui font preuve d’un grand perfectionnisme sont moins enclins à produire des publications, à recueillir des citations ou à pu-blier leurs recherche dans des revues qui ont un impact important.

« Nous avons découvert que le perfectionnisme est une embûche à la productivité. Le degré de productivité semble inversement proportionnel au degré de perfectionnisme », un trait qui peut avoir de graves effets défavorables sur le cheminement de carrière, affirme M. Sherry. L’étude a été publiée dans le numéro d’octobre 2010 de la Revue canadienne des sciences du comportement.

M. Sherry et ses collègues ont entrepris d’étu-dier la question en raison du débat continu et jusqu’à maintenant « principalement conjectu-ral », à savoir si le perfectionnisme est adaptatif, soit bénéfique, ou au contraire, mal adaptatif.

Il existe diverses mesures du perfectionnisme, mais la plupart reposent sur quelques-unes des principales définitions. « Les perfectionnistes ont tendance à exécuter les tâches à la perfection – ou pas du tout, explique M. Sherry. Ils ne sont satisfaits que lorsque la tâche a été parfaitement exécutée. Ils tentent d’atteindre la perfection dans tout ce qu’ils font, n’exigeant rien de moins d’eux-mêmes que la perfection en tout temps. »

Les perfectionnistes peuvent aussi éprouver des doutes paralysants par rapport à leurs propres capacités, ce qui donne lieu à des vérifications répétées et infructueuses, ainsi qu’à une réaction exagérée et extrême à l’erreur.

Ces traits de personnalité ne doivent pas être confondus avec ceux d’une personne consciencieuse, poursuit M. Sherry. « Je peux certainement reconnaître la valeur de la poursuite du succès, des objectifs précis, de l’organisation et de la discipline, mais ce ne sont pas des traits propres au perfectionnisme. »

Pour étudier la question, lui et ses collègues Paul Hewitt de l’Université de la Colombie-Britannique, et Gordon Flett de l’Université York, ont examiné le lien entre le perfectionnisme et la productivité en matière de recherche parmi les professeurs de psychologie des universités des États-Unis et de celles du Canada. Ils se sont limités à leur propre profession afin de simplifier la logistique, et ils ont restreint la recherche aux établissements qui offrent des programmes aux cycles supérieurs en psychologie.

Ils ont communiqué avec 10 000 professeurs, parmi lesquels 1 258 ont répondu à un sondage en ligne. Les chercheurs ont trouvé chez les participants une forte corrélation entre un degré élevé de perfectionnisme et une faible productivité. Plus les sujets sont perfectionnistes, moins grand est leur nombre total de publications, et moins souvent leur nom se trouve en tête de liste des publications à multiples auteurs. Les perfectionnistes semblent aussi recueillir un nombre moins grand de citations et publier dans des revues de moindre impact.

« Ainsi, plusieurs indices qualitatifs et quantitatifs portent à croire que, du moins dans l’échan-tillon de professeurs de psychologie qui a été étudié, le perfectionnisme nuirait à la productivité, explique M. Sherry. Il ne peut confirmer si les résultats sont applicables à d’autres disciplines, mais soupçonne qu’ils le peuvent. Le perfectionnisme est très commun chez les professeurs, les exemples abondent. »

Les professeurs qui soupçonnent être perfec-tionnistes devraient consulter, conseille M. Sherry. Le traitement le plus efficace semble être la thérapie comportementale interpersonnelle ou cognitive, ajoute-t-il.

« Ironiquement, les perfectionnistes sont souvent réticents à consulter parce qu’ils considèrent que cela équivaut à une forme d’imper-fection », dit-il. En fait, le perfectionnisme, en soi, peut être un obstacle au traitement efficace, car les personnes qui en souffrent peuvent inconsciemment saboter les étapes de leur traite-ment par leurs attentes irréalistes.

Les professeurs perfectionnistes pourraient avoir une autre raison de s’inquiéter si on considère que la recherche associe aussi le perfectionnisme à la dépression, au suicide et à diverses troubles de l’alimentation comme la boulimie, la frénésie alimentaire et l’anorexie.

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