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Les recteurs passent moins d’années qu’auparavant à la tête d’une université

Une étude démontre que les recteurs sont également plus susceptibles d’être congédiés par leur conseil d’administration que par le passé.

par ROSANNA TAMBURRI | 09 OCT 13

La vie à la tête d’une grande organisation n’a jamais été facile, et une nouvelle recherche démontre que les enjeux complexes dont les recteurs doivent se saisir de nos jours pourraient même écourter l’exercice de leurs fonctions. Les recteurs sont plus susceptibles de passer moins de temps à la barre de leur établissement que leurs prédécesseurs et d’être mis à la porte par les conseils d’administration de plus en plus actifs, selon la recherche menée par David Turpin, ancien recteur de l’Université de VictoriaDavid Turpin, ancien recteur de l’Université de Victoria.

M. Turpin a commencé sa recherche sur la durée des rectorats après avoir été témoin de ce qui lui a semblé être un nombre anormalement élevé de congédiements prématurés. À partir de chiffres fournis par l’Association des universités et collèges du Canada (AUCC), M. Turpin a compilé des données sur 981 dirigeants ayant occupé le poste de recteur au cours des 224 dernières années.

Ses résultats montrent une baisse régulière de la durée moyenne du rectorat : alors qu’il était approximativement de 20 ans au milieu des années 1800, il était estimé à environ 10 ans au milieu des années 1990. (Avant 1840, on compte trop peu d’universités pour faire des comparaisons significatives, ajoute-t-il.) Comme plusieurs recteurs nommés dans les années 1990 sont toujours en poste, M. Turpin a également calculé le nombre moyen d’années en poste, ce qui lui a permis d’obtenir un résultat plus actuel : alors qu’il était de huit ans à la fin des années 1950, il est passé à environ quatre ans aujourd’hui.

(M. Turpin appelle cet élément de données le « nombre moyen d’années d’expérience » et l’a calculé en faisant la moyenne du nombre d’années accumulées par chaque dirigeant au poste de recteur de son établissement actuel.)

Il a découvert qu’entre 2006 et 2010, 12 recteurs ont quitté leur poste dans les trois années suivant leur nomination. Pourtant, quatre seulement l’ont fait de 2001 à 2005, et trois de 1996 à 2000. Des preuves empiriques suggèrent que bon nombre des récents départs hâtifs ont été demandés par les conseils d’administration, indique-t-il. D’autres pays, comme les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Australie, ont observé la même tendance.

M. Turpin, qui a passé 13 ans à la tête de l’Université de Victoria avant de quitter ses fonctions en juin dernier, a lui-même été témoin de l’évolution du rôle du recteur. Le recteur, qui auparavant était principalement un dirigeant universitaire, est devenu une sorte de président-directeur général qui doit avoir « la capacité de diriger une très grande et complexe entreprise commerciale à laquelle participent de nombreux intervenants », ce qui pourrait expliquer la tendance à écourter la durée du mandat, a-t-il révélé en entrevue. « Les entreprises commerciales, les parcs technologiques et les filiales en propriété exclusive hors campus génèrent plus d’argent qu’autrefois. »

Parallèlement, le bassin de candidats potentiels a rétréci, rendant plus difficile la tâche de trouver et d’attirer des personnes expérimentées, a-t-il observé. Les universités ayant embauché peu de professeurs dans les années 1980 et au début des années 1990 comparativement aux décennies précédentes, moins de candidats possèdent l’expérience nécessaire pour ce poste de dirigeant, souligne-t-il.

Le nouveau rôle du conseil d’administration y est aussi pour quelque chose, ajoute-t-il. Les conseils d’administration, comme ceux des entreprises, participent de plus en plus aux activités courantes des universités et se mêlent des questions de gouvernance. « En cas de problème, ils seront beaucoup plus enclins à chercher une solution que par le passé, explique-t-il. De même, certains conseils d’administration peuvent être très interventionnistes et créer des problèmes là où il n’y en a pas. Il peut arriver que des conseils d’administration dysfonctionnels s’enhardissent et souhaitent passer à l’action en congédiant le recteur, alors qu’il n’est aucunement responsable du problème. »

La nomination de candidats externes peut également expliquer le roulement à la direction des universités. Ce phénomène est plus commun depuis que les universités cherchent à élargir la gamme de candidats. « Chose intéressante, tous les recteurs partis prématurément au cours des 15 dernières années étaient des candidats externes, fait remarquer M. Turpin, ce qui démontre bien le problème de l’adaptation culturelle. Si vous venez d’ailleurs, il peut être difficile de vous adapter à la nouvelle culture. »

Par ailleurs, il n’est pas dans la tradition universitaire de trouver et de préparer des candidats internes comme le font les entreprises. « Je crois que c’est en partie attribuable à la culture de nos établissements, soutient-il. Nous entrons tous à l’université comme professeurs parce que nous aimons enseigner et faire de la recherche. Il est en quelque sorte mal vu d’aspirer à un poste de dirigeant. » Toutefois, un nombre accru d’universités met en place des programmes de développement du leadership pour les directeurs de département, les doyens et les administrateurs de haut rang, ce que M. Turpin voit comme un pas dans la bonne direction.

Plusieurs recteurs nommés récemment étaient des candidats de l’interne, fait-il remarquer, ce qui indique que les universités arrivent maintenant mieux « à former et à développer leurs propres talents ». Les conseils d’administration et les recteurs semblent également faire davantage d’efforts pour collaborer. « Les conseils d’administration consacrent plus de temps à tisser des liens avec le nouveau recteur et faire en sorte qu’il s’intègre bien au milieu universitaire », souligne-t-il. Parallèlement, les nouveaux recteurs semblent plus conscients de l’importance de consulter le conseil d’administration sur les questions de gouvernance. « Je ne serais pas étonné qu’il y ait moins de départs prématurés dans les prochaines an-nées », déclare-t-il.

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  1. Françoise Moreau-Johnson / 23 octobre 2013 à 14:14

    Est-ce que la recherche de M. Turpin est publiée?

    Merci, Françoise

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