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Les universitaires américains au Canada

Ils ont traversé la frontière lorsque Bush était président des États-Unis, et certains n’ont aucune intention de retourner

par DANIEL DROLET | 23 FEV 09

En 2005, peu après la réélection de George Bush à la présidence des États-Unis, Affaires universitaires a publié un article sur des universitaires américains récemment établis au Canada, attirés non seulement par les emplois, mais aussi par les positions plus libérales du pays.

Quatre ans plus tard, ces universitaires sont toujours au Canada. Ils souhaitent tous rester malgré l’élection de Barack Obama aux États-Unis et le financement de la recherche moins certain au Canada. En outre, bien qu’il ne s’agisse pas d’une enquête scientifique, ces universitaires disent n’avoir entendu parler d’aucun collègue d’origine américaine qui souhaite retourner aux États-Unis.

« Nous sommes des Canadiens heureux, et ne connaissons aucun ex-Américain qui parle de retourner là-bas », confie A. Michael Allcott, directeur du programme international de l’Université Trent. M. Allcott est arrivé au Canada en 2003 pour rejoindre son conjoint originaire de l’Europe orientale qui n’avait pas obtenu la permission juridique de rester aux États-Unis.

« Ici, mon conjoint et moi, mariés entre personnes de même sexe, sommes protégés par les droits de la personne et, malgré l’élection d’Obama, nous n’entrevoyons pas cette possibilité aux États-Unis », explique M. Allcott, devenu citoyen canadien en décembre dernier.

Rick Halpern, maintenant principal du Nouveau Collège de l’Université de Toronto, a lui aussi obtenu récemment la citoyenneté canadienne, et lui non plus ne connaît aucun collègue désireux de retourner aux États-Unis.

Gage Averill, ethnomusicologue ayant quitté l’Université de New York pour s’installer au Canada et maintenant vice-recteur à l’enseignement et doyen à l’Université de Toronto à Mississauga, a quant à lui remarqué que des collègues américains avaient récemment cessé de s’informer des postes à pourvoir au Canada. Pour sa part, bien qu’il ait voté lors des dernières élections présidentielles américaines, il a l’intention de rester ici : « Les élections n’ont rien changé. »

Stephen Saideman, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur la sécurité internationale et les conflits ethniques à l’Université McGill, est d’accord : « Ce n’est pas la question de savoir qui est président, mais de savoir si des emplois intéressants sont offerts. »

M. Saideman, qui a quitté Lubbock, Texas, en 2002, précise que la situation économique « posera d’importants défis au marché du travail en milieu universitaire » aux États-Unis.

« Les fonds de dotation ont baissé de 40 pour cent, et même les riches établissements privés comme Harvard ou Stanford gèlent les embauches. » Les budgets de la plupart des États subissent des compressions importantes, alors les établissements publics n’embauchent plus, dit-il.

Certains font remarquer qu’on ne voit pas de profonds changements aux États-Unis.

« Il est difficile de voir si les choses ont fondamentalement changé », note Michael Bowling, professeur d’informatique à l’Université de l’Alberta qui était auparavant adjoint à la recherche à l’Université Carnegie Mellon. Il croit que, même si le Canada réduit le financement de la recherche, le pays profite d’un meilleur modèle de financement, sans compter que beaucoup de sources de financement sont provinciales, et non fédérales. Comme l’administration Obama n’a pas encore présenté de budget, il est trop tôt pour savoir ce qu’il adviendra du financement aux États-Unis.

Henry Giroux, qui a quitté une chaire fondée à l’Université d’État de la Pennsylvanie pour s’établir au Canada en 2004, croit lui aussi que rien n’a vraiment changé aux États-Unis. Son épouse et lui sont tous deux professeurs au département d’anglais et d’études culturelles de l’Université McMaster, où il a obtenu une nouvelle chaire fondée. M. Giroux, un professeur immigrant des plus expressifs par rapport aux motifs politiques qui ont justifié son départ des États-Unis il y a quatre ans, a expliqué ses raisons avec autant de véhémence, dans un courriel, ses raisons de rester au Canada :

« Premièrement, les États-Unis n’ont pas de politique nationale sur les soins de santé, ce qui me paraît barbare.

« Deuxièmement, l’orthodoxie idéologique qui a saisi le pays sous la présidence de Bush est encore bien vivante au sein du Parti républicain, et je ne crois pas qu’Obama pourra modifier considérablement la nature des problèmes politiques, sociaux et économiques avec lesquels le pays est aux prises tant que ces intégristes auront une influence décisive sur les politiques gouvernementales.

« Troisièmement, je crois que l’idéologie postélectorale d’Obama est non seulement une concession à la droite, mais aussi une erreur monumentale qui ne laisse entrevoir rien de bon pour une réforme importante.

« Quatrièmement, Bush nous a entraînés en Irak, et Obama semble vouloir nous entraîner dans une autre guerre désastreuse en Afghanistan.

« Malgré tout l’optimisme qu’a fait naître l’élection d’Obama, je crois que la réalité nous rattrapera très vite et que cela n’augure rien de bon. »

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