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Nouvelles règles visant à contrer la fraude scientifique

La modification de la politique des organismes subventionnaires prend le milieu universitaire par surprise.

par ROSANNA TAMBURRI | 06 DÉC 11

Les organismes subventionnaires de recherche fédéraux ont adopté de nouvelles règles visant à mettre un frein aux cas de fraude scientifique et ont mis sur pied un comité consultatif sur la conduite de la recherche. Dans une déclaration commune publiée le 17 novembre, les trois principaux organismes subventionnaires ont annoncé qu’ils exigeront dorénavant que tous les chercheurs qui présentent une demande de subvention remplissent un formulaire de consentement les autorisant à dévoiler publiquement leur nom s’ils commettent de « graves infractions » aux politiques des organismes subventionnaires. Ceux qui refusent de signer le formulaire verront leur demande de subvention rejetée.

Les nouvelles mesures permettront également aux organismes subventionnaires de divulguer la nature de l’infraction, le nom de l’établissement où travaillait le chercheur au moment de l’infraction et le nom de l’établissement où il travaille actuellement. L’utilisation délibérée de fonds de recherche à des fins personnelles, la publication en toute connaissance de cause de résultats de recherche fondés sur des données fabriquées et l’obtention de fonds sur la base de titres de compétences ou de qualifications inexacts sont autant d’exemples d’infractions graves.

« Pour déterminer si une infraction est grave, les organismes subventionnaires tiendront compte de la mesure dans laquelle l’infraction compromet la sécurité du public ou jetterait le discrédit sur la conduite de la recherche », peut-on lire dans la déclaration.

Les trois organismes subventionnaires – soit le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie (CRSNG), le Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH) et les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) – tiendront compte de l’expérience du chercheur, de l’existence de cas antérieurs d’infractions et d’autres facteurs pour rendre leur décision.

Au début de décembre, les trois organismes subventionnaires ont mis sur pied un comité consultatif sur la conduite responsable de la recherche ayant pour mandat « d’assurer la cohérence et l’uniformité des mesures visant à promouvoir la conduite responsable de la recherche et à traiter des allégations d’infractions aux politiques des trois organismes ». Le comité formé de huit membres est présidé par Denise Alcock, consultante en recherche sur les services de santé et ancienne doyenne de la Faculté des sciences de la santé de l’Université d’Ottawa. Les autres membres du comité sont Eddy Campbell, recteur de l’Université du Nouveau-Brunswick; Joanne Keselman, provost de l’Université du Manitoba; Susan Marlin, vice-principale adjointe à la recherche à l’Université Queen’s; Martin Letendre, directeur des affaires éthiques et juridiques chez Ethica Clinical Research Inc; Suromitra Sanatani, avocate de Victoria, Colombie-Britannique; Sumedha Chandana Wirasinghe, professeur de génie à l’Université de Calgary.

Suivant l’annonce initiale faite par les trois organismes, le ministre d’État chargé des Sciences et des Technologies, Gary Goodyear, a informé la Chambre des communes des changements apportés à la politique lors de la période de questions. « Bien que les cas d’infraction soient rares en recherche, a-t-il déclaré, il est important de veiller à la protection de l’intégrité de la recherche et des chercheurs canadiens, et c’est justement ce que nous faisons. »

Les personnes reconnues coupables d’une grave infraction verront leur nom publié sur le site Web de l’organisme subventionnaire concerné. Les nouvelles mesures s’appliquent également aux étudiants qui sollicitent une subvention.

L’annonce a pris les universités par surprise. Comme l’explique Martha Crago, vice-rectrice à la recherche à l’Université Dalhousie, en raison des lois sur la protection des renseignements personnels, les universités peuvent seulement divulguer publiquement le nom de chercheurs qui commettent des fraudes si la cause est portée devant les tribunaux. « Ces chercheurs passent d’une université à l’autre sans se faire repérer. Je trouve cela vraiment frustrant », dit-elle. Selon elle, les nouvelles mesures devraient aider à prévenir ce genre de situation, mais il reste à voir comment elles seront appliquées sans contrevenir aux lois sur la protection des renseignements personnels. Mme Crago était membre du groupe d’experts mis sur pied par le Conseil des académies canadiennes pour examiner la question de l’intégrité en recherche.

Les cas réputés de fraude scientifique sont rares au Canada selon les données des organismes subventionnaires. Si l’on en croit le rapport du groupe d’experts publié en 2010, le problème est cependant plus répandu que ce qu’indiquent ces données, car les chiffres ne tiennent pas compte de la recherche financée par le secteur privé et de la recherche qui n’entre pas dans le mandat des organismes subventionnaires. Les nouvelles mesures s’appliquent uniquement aux projets de recherche financés par les organismes subventionnaires.

Il y a eu des cas d’inconduite universitaire très médiatisés au Canada. En 2005, le chercheur Eric Poehlman de l’Université de Montréal a plaidé coupable à des accusations de falsification et de fabrication de données alors qu’il travaillait aux États-Unis. Ranjit Chandra, un professeur de l’Université Memorial, a pris sa retraite en 2002 après avoir été accusé de falsification de données.

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