Connu comme étant celui qui a conçu l’iconique complexe Habitat 67 situé à Montréal, l’architecte israélo-canadien Moshe Safdie a donné l’entièreté de ses archives professionnelles de même que son propre appartement d’Habitat 67 à son alma mater, l’Université McGill. Avec plus de 100 000 pièces comprenant des carnets de croquis, des dessins, des maquettes et de la correspondance s’étalant sur plus de 50 ans de carrière, ces archives constitueront la plus importante collection de l’Université. Au moment de l’annonce en août dernier, M. Safdie, âgé de 84 ans, a confié aux médias canadiens que le soutien et les occasions qu’on lui a offerts alors qu’il était un jeune étudiant au Québec ont confirmé sa décision de choisir Montréal comme lieu où serait conservé l’ensemble de son œuvre.
On trouve dans ces archives l’exemplaire original de son mémoire de fin d’études de premier cycle intitulé A Case for City Living, qui a inspiré Habitat 67. L’immeuble à appartements de 12 étages, qui a servi de pavillon lors de l’Exposition universelle de 1967, est composé de 354 modules rectangulaires en béton empilés de manière irrégulière et reliés entre eux par des jardins et des terrasses. L’Université McGill compte réserver le duplex de M. Safdie, qui surplombe le fleuve Saint-Laurent, aux activités de recherche, aux programmes d’artistes en résidence, aux expositions et aux symposiums. Elle n’en est toutefois qu’aux premières étapes de planification.
« M. Safdie a dit très clairement qu’il avait envisagé de donner ses archives à l’Université Harvard ou à Israël, mais qu’il avait réalisé que l’éducation qu’il avait reçue à l’Université McGill et les gens qu’il y avait rencontrés avaient énormément compté pour lui, faisant de l’établissement l’endroit idéal [pour ses archives], affirme David Theodore, directeur de l’École d’architecture Peter Guo-hua Fu. Nous sommes ravi.e.s qu’il ait choisi l’Université McGill. »
L’Université collaborera avec l’organisation à but non lucratif Fondation Habitat 67 à la conservation et à l’entretien de l’appartement de M. Safdie. Ce sera la première fois qu’un établissement public fera partie de la communauté privée de résident.e.s de l’immeuble.
M. Theodore affirme que si les membres du conseil d’administration de l’organisation se réjouissent à l’idée que l’Université assumera certaines des responsabilités liées à la gouvernance de l’immeuble du patrimoine québécois qu’est Habitat 67, il ne faut pas oublier qu’il « s’agit du milieu de vie de toutes les autres personnes dans l’édifice ». Les deux parties « devront négocier ou apprendre à vivre ensemble ».
À l’heure actuelle, la principale préoccupation de l’Université est de veiller à ce que le « magnifique appartement » lui soit légué de bonne foi et d’honorer la volonté de M. Safdie, qui souhaite qu’il soit une ressource non seulement pour les membres de la communauté universitaire, mais aussi pour le grand public.
Du point de vue de la recherche, Habitat 67 demeure le modèle le plus célèbre d’utopies modernes de l’après-guerre ou d’édifices « qui tentaient d’imaginer le futur et la manière dont les gens vivraient ensemble ». Le fait qu’il soit encore d’actualité témoigne de la vision révolutionnaire de l’un des diplômé.e.s les plus renommé.e.s de l’Université McGill.
« Le mode de vie proposé par Habitat 67 témoigne de notre imaginaire collectif, explique M. Theodore. Même 50 ans après sa création, il semble porter cette idée utopique selon laquelle nous finirons par trouver comment vivre ensemble, et avoir une cour. » D’une certaine façon, il porte toujours cet espoir.