Au Québec, les initiatives universitaires pour préserver la santé mentale des populations étudiantes se font de plus en plus nombreuses. La pression, le stress lié à la performance et les enjeux personnels peuvent affecter profondément le bien-être mental des étudiantes, des étudiants et du personnel.
L’Université du Québec à Montréal (UQAM) a pensé aux membres de ses équipes, en mettant en place le Réseau veilleur, composé d’employées et d’employés volontaires qui s’engagent à fournir un soutien, une écoute attentive et à référer leurs collègues vers les ressources appropriées si nécessaire. « Les collègues sont bien placés pour détecter les signes de détresse, étant donné le temps qu’ils passent ensemble » explique Marjorie Laberge, psychologue et coordonnatrice du Réseau veilleur de l’UQAM.
Le succès de l’initiative se mesure par la popularité acquise auprès du personnel : plus d’un an après sa mise en place, 100 personnes ont manifesté leur intérêt pour rejoindre le réseau, et 74 d’entre-elles ont déjà été formées aux premiers soins en santé mentale de la Commission de la santé mentale du Canada et sont aptes à soutenir leurs collègues. Sur le terrain, les membres formés sont chargés d’identifier les personnes en difficulté ou en détresse psychologique, de les écouter attentivement, d’évaluer leur état et leurs besoins, et de vérifier la présence éventuelle d’idées suicidaires. Si nécessaire, ils les orientent vers des ressources d’aide professionnelle appropriées. « Nous visons à former 50 nouveaux membres du personnel cet automne, en mettant l’accent sur les services actuellement sans veilleurs », poursuit Mme Laberge.
Carl Aksynczak, ambassadeur et membre du Réseau veilleur, a rejoint l’initiative pour contribuer à sa façon au mieux-être de ses collègues. Ancien employé du secteur privé, il dit avoir côtoyé plusieurs cas de personnes ayant souffert d’un épuisement professionnel ou développé des problèmes de santé en raison d’un stress chronique subi au travail. « L’UQAM n’y échappe pas non plus : les maladies causées par un stress prolongé sont présentes dans tous les milieux. J’ai entendu parler du Réseau Veilleur, et je les ai contactés aussitôt. J’ai le sentiment que prendre soin des autres, écouter ceux qui en ont besoin, fait une différence et contribue à notre communauté », nous confie-t-il.
Mme Laberge explique que l’université dispose d’un document répertoriant les ressources disponibles : le Programme d’aide employé.es et à la famille de l’UQAM, le Centre de prévention du suicide de Montréal, les Service conseils à la vie étudiante, le service 811, ou elle-même en sa qualité de psychologue sur le campus. Elle précise que l’orientation vers des ressources privées n’est pas privilégiée, l’accent étant mis sur ces entités capables de répondre adéquatement aux besoins.
Se confier à ses collègues sur sa propre santé mentale peut susciter de l’inconfort, du malaise ou même de la crainte. C’est pourquoi l’université a établi une liste des membres du réseau par pavillon, disponible en ligne. Les employées et employés peuvent choisir de se confier à un membre qu’ils ne connaissent pas si elles et ils se sentent plus à l’aise. Les veilleurs sont tenus de respecter la confidentialité et de signer un formulaire de consentement à cet effet. Les échanges doivent se faire sur les heures de travail et dans des lieux discrets.
M. Aksynczak, qui occupe la fonction de technicien audiovisuel au carrefour d’innovation et de pédagogie universitaire de l’UQAM, pense également aux autres membres du Réseau veilleur : « Il ne faut pas s’oublier dans tout ça. Même si nous écoutons les autres, ça ne doit pas affecter notre propre vie. Il faut penser d’abord à nous-mêmes pour pouvoir aider les autres. Et tout ça est possible entre veilleurs ».
Pour le futur, le Service du développement organisationnel de l’UQAM, créateur du Réseau veilleur, a l’idée de lancer un questionnaire pour évaluer sa notoriété et son utilité. « Actuellement, nous utilisons un tableau interactif sur Teams où les membres peuvent enregistrer leurs interventions de manière anonyme » explique Mme Laberge. « Jusqu’à présent, 56 interventions ont été comptabilisées, dont certaines auprès d’étudiants, bien que le réseau soit destiné aux employés ».
En avril dernier, le Réseau veilleur a remporté le Prix du mérite dans la catégorie Équipe innovation, décerné par l’UQAM. Mme Laberge espère capitaliser sur ce succès pour nouer de nouveaux partenariats.