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C’est scientifique!

Les sciences s’éloignent de l’enseignement magistral afin de donner aux étudiants le goût de poursuivre leurs études dans le domaine.

par MOIRA MACDONALD | 16 AOÛT 10

Shirley Tilghman, biologiste moléculaire et rectrice de l’Université Princeton, déplore le fait qu’un nombre décroissant d’étudiants soient intéressés par une carrière en sciences ou en génie. Ce qu’il faut pour ramener l’enthousiasme dans les cours de sciences, c’est renverser la « pyramide » traditionnelle, a-t-elle déclaré dans une allocution. La méthode pyramidale traditionnelle consiste à apprendre par cœur toute une liste d’éléments fondamentaux et, après plusieurs années d’études, en arriver à découvrir leur pertinence par l’entremise de la recherche.

Princeton n’est pas la seule à chercher comment attirer et maintenir un plus grand nombre d’étudiants en sciences, et comment former de meilleurs scientifiques. « Le travail ne rebute pas les étudiants […] en autant qu’ils peuvent percevoir la pertinence de ce qu’ils font », explique Carolyn Eyles, professeure au département de géographie et des sciences de la Terre de l’Université McMaster. Mme Eyles dirige un nouveau programme intégré de sciences au premier cycle, nommé iSci, qui s’adresse aux meilleurs étudiants. Le programme iSci examine des problèmes du point de vue de diverses disciplines et fait appel à de nombreuses méthodes pédagogiques novatrices de plus en plus populaires un peu partout au pays.

La nouvelle tendance se caractérise par une distanciation de la méthode d’enseignement traditionnelle cours magistral-labo, et fait appel à l’apprentissage par l’expérience : les professeurs parlent moins, les étudiants discutent et résolvent davantage de problèmes. Très tôt au cours de leur formation, avant même de maîtriser la théorie et les éléments fondamentaux du programme d’études, les étudiants sont placés devant une vue d’ensemble des grands enjeux scientifiques. Les professeurs prêtent une attention particulière à la manière dont se fait l’apprentissage et peuvent ainsi ajuster rapidement leur méthode.

L’Université Acadia, ayant remarqué que les laboratoires ne parvenaient plus à stimuler l’imagination des étudiants, a tenté toutes sortes de nouvelles méthodes depuis 14 ans. Certaines combinent cours magistraux et « labo-studios » pour enseigner les principes fondamentaux de la physique. Traditionnellement, les laboratoires de physique de première année procédaient selon une « recette » : les étudiants suivaient les instructions pour parvenir aux résultats illustrant un concept au programme.

Dans la nouvelle version du cours d’introduction à la physique, le doyen de la faculté des sciences, Peter Williams, tente de faire en sorte que les laboratoires soient l’application de la matière présentée en classe. Dans chacun des deux labos de deux heures, les étudiants doivent, avec très peu d’indications sur la manière de s’y prendre, parvenir à résoudre le problème présenté. Les étudiants ont accès à moins de contenu, convient M. Williams, mais ils retiennent mieux que dans le modèle magistral traditionnel, où le professeur « bombarde les étudiants avec la matière dans l’espoir d’atteindre la cible ».

Certains programmes novateurs donnent de très bons résultats avec de petits groupes d’excellents étudiants, mais il faut aussi trouver une façon d’attirer les autres étudiants qui ne sont pas nécessairement les premiers de classe, ajoute Glen Loppnow, professeur de chimie à l’Université de l’Alberta et titulaire du Prix 3M. M. Loppnow enseigne le cours de science interdisciplinaire et fait tout ce qu’il peut pour stimuler la réflexion des étudiants d’une classe très nombreuse. Il tente d’y parvenir par des problèmes à résoudre en classe ainsi que des travaux écrits qui comptent peu pour la note finale.

De son côté, l’Université de la Colombie-Britannique (UBC) tente de réformer la manière dont les sciences sont enseignées à tous les étudiants, grâce à la Carl Wieman Science Education Initiative, un projet quinquennal de 12 millions de dollars qui favorise le changement dans le plus grand nombre possible de départements de sciences. Lauréat d’un prix Nobel, M. Wieman croit que la manière traditionnelle d’enseigner les sciences au premier cycle est dépassée. Il cite souvent des travaux de recherche, dont une étude qui démontre que les étudiants retiennent environ 30 pour cent des nouveaux concepts enseignés dans un cours magistral traditionnel et que les méthodes d’enseignement
interactives obtiennent de bien meilleurs résultats.

L’Initiative cherche à connaître les effets de sa propre tentative de répandre le changement. Sa démarche s’inspire des sciences cognitives qui démontrent que la vraie connaissance s’acquiert par la compréhension des problèmes plutôt que par la mémorisation de concepts.

George Spiegelman, qui enseigne un cours de biologie cellulaire en première année à la UBC, affirme que ses étudiants obtiennent de meilleures notes depuis qu’il utilise la nouvelle méthode et que, malgré le fait qu’ils ont un tiers de moins de cours magistraux, leur capacité à résoudre des problèmes s’est grandement améliorée.

L’innovation ne peut toutefois se produire sans le concours des professeurs et de l’administration, et ce n’est pas toujours facile d’adhérer au principe dans un environnement qui accorde davantage d’importance aux succès de la recherche qu’à l’amélioration de l’enseignement.

Rédigé par
Moira MacDonald
Moira MacDonald est journaliste à Toronto.
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