Passer au contenu principal

L’économie familiale repensée

par ANGELA PEREIRA | 09 JUIN 08

Les femmes se souviendront sans doute des cours d’économie familiale du secondaire, où on apprenait à cuisiner et à coudre, entre autres activités ménagères.

Oubliez ces images d’antan; imaginez plutôt des étudiants dans un laboratoire de recherche à l’Université du Manitoba, concevant un tissu fait de polymères imperméabilisants et libérant des antibiotiques; si celui qui porte le vêtement fait une vilaine chute, le tissu contribuera à guérir ses blessures. Ces étudiants sont inscrits au programme de sciences textiles de la faculté d’écologie humaine de l’Université, où des travaux de recherche sont menés entre autres en collaboration avec la faculté de médecine.

Fait surprenant, la faculté d’écologie humaine descend directement du programme d’économie familiale de l’Université. Au secondaire, les « sciences textiles » consistaient à coudre un tablier, mais pour les étudiants de l’Université du Manitoba, il s’agit de recherche de pointe.

En 1994, 16 universités canadiennes offraient un programme de premier cycle en économie familiale ou dans des domaines connexes. Aujourd’hui, on aurait bien du mal à trouver au pays un seul programme universitaire portant ce titre. Le terme a officiellement disparu du monde universitaire canadien en novembre dernier, quand la faculté d’agriculture, de foresterie et d’économie familiale de l’Université de l’Alberta est devenue la faculté de l’agriculture et des sciences de la vie et de l’environnement.

L’Université de l’Alberta, l’Université du Manitoba et le Collège universitaire Brescia de l’Université Western Ontario ont remplacé leur programme d’économie familiale par un programme d’écologie humaine. D’autres établissements canadiens ont aussi rebaptisé leur programme : études de la famille, sciences des aliments et de la nutrition, etc.

On pourrait croire que les cours de cuisine et d’entretien ménager des programmes d’économie familiale sont irrémédiablement chose du passé, mais de l’avis de nombreux intervenants du domaine, il s’opère actuellement un véritable retour aux sources. Les origines de l’économie familiale en Amérique du Nord remontent à une série de conférences données à compter de 1899 à Lake Placid, dans l’État de New York, où des femmes universitaires discutaient du moyen d’appliquer les connaissances scientifiques au travail ménager et aux activités communautaires.

Peu après, au Canada, le premier institut pour femmes a commencé à offrir des cours d’arts ménagers, où il était question d’hygiène domestique, du prix des aliments et du carburant ainsi que des soins aux enfants. Pendant les deux guerres mondiales, les cours portaient sur la façon d’alléger le fardeau du travail ménager et d’accroître l’autonomie des femmes. Gustaaf Sevenhuysen, doyen de la faculté d’écologie humaine de l’Université du Manitoba, se dit ébahi des retombées sociales qu’a eues cette discipline pendant cette période, en faisant entrer « les connaissances en sciences, en génie et en médecine dans les maisons des simples citoyens ».

Pourtant, les programmes d’économie familiale du secondaire, où il était surtout question de cuisine, d’entretien ménager et de couture, ont contribué à perpétuer les préjugés au sujet de ce domaine, déclenchant une crise d’identité au sein des universités canadiennes. En conséquence, de nombreux établissements ont commencé à rebaptiser leur programme « écologie humaine », même si le contenu est demeuré inchangé, explique Alicia Garcia, professeure d’écologie humaine au Collège Brescia.

Le Collège Brescia a renommé son programme en 1998, tout juste avant de voir ses taux d’inscription, qui étaient en chute libre, se remettre à monter. Le même phénomène s’est produit à l’Université du Manitoba et à l’Université de l’Alberta.

Les effectifs étudiants de ces programmes sont encore presque exclusivement féminins, mais leurs champs d’intérêt varient, de la nutrition au dessin de mode en passant par la consultation familiale, explique Janet Fast, doyenne du département d’écologie humaine de l’Université de l’Alberta. Il y a toutefois un dénominateur commun : la volonté « d’aider les gens à apprendre à améliorer leur qualité de vie […] de manière systématique ».

Selon l’Ontario Home Economics Association, les diplômés travaillent entre autres dans des domaines comme l’élaboration de politiques, le développement communautaire, l’étude des produits, la diététique, la gestion des ressources, le design textile, l’orientation financière, la nutrition, les conseils en matière de consommation. Le principal défi à relever consiste maintenant à transmettre à la population une juste image du travail des spécialistes en écologie humaine, rappelle M. Sevenhuysen, de l’Université du Manitoba, que ce soit établir un plan de repas pour une famille à faible revenu, préparer une ébauche de politique gouvernementale ou encore concevoir un tissu protecteur de haute technologie.

Rédigé par
Angela Pereira
Missing author information
COMMENTAIRES
Laisser un commentaire
University Affairs moderates all comments according to the following guidelines. If approved, comments generally appear within one business day. We may republish particularly insightful remarks in our print edition or elsewhere.

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Click to fill out a quick survey