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L’écart entre les sexes dans le domaine des sciences à l’université

Examen des origines du tenace écart entre les hommes et les femmes en sciences, technologie, génie et mathématiques.

par HARRIET EISENKRAFT | 09 OCT 13

Emily Choy, doctorante en zoologie à l’Université du Manitoba, a rencontré peu d’obstacles en tant que femme au cours de ses études. Toutefois, lorsqu’elle envisage une carrière de professeure, un autre constat s’impose : « Aux cycles supérieurs de mon programme, la plupart de mes collègues sont des femmes, mais les professeures et les chercheuses sont très rares par la suite. »

La situation a été mise au jour en novembre 2012 par la publication d’une étude du Conseil des académies canadiennes (CAC) sur le statut des femmes en recherche, en particulier dans les disciplines où elles sont sous-représentées. Le rapport révèle que les femmes représentent environ 20 pour cent de l’ensemble des professeurs titulaires au Canada, mais seulement neuf pour cent des professeurs titulaires en sciences, en génie et en mathématiques. Le rapport soulève d’innombrables problèmes qui se posent aux chercheuses au Canada et ailleurs, concluant que « le temps à lui seul ne suffira probablement pas pour atteindre la parité » dans les plus hautes sphères universitaires.

Le rapport du CAC s’inscrit entre autres en réaction aux résultats de 2008 du Programme des chaires d’excellence en recherche du Canada (CERC) (assorties de millions de dollars en subventions) où, à l’issue d’un appel de candidatures à l’échelle internationale, aucune femme n’a été retenue parmi les 19 titulaires de ces chaires appelés à diriger des équipes partout au pays. Valerie Davidson, professeure émérite à la faculté de génie de l’Université de Guelph et membre du comité de 15 experts du CAC, se dit agacée par le résultat du concours de 2008 parce que les titulaires du programme des CERC « encadreront la prochaine génération d’étudiants et de chercheurs postdoctoraux, qui ne sera pas exposée à des modèles féminins inspirants. »

Aucun motif répréhensible n’est évoqué pour expliquer les résultats du concours. Selon Mme Davidson, les réseaux de haut niveau, parfois non officiels, sont encore composés d’hommes qui nomment à ces postes des gens qui leur ressemblent. En outre, « rien ne prouve de façon convaincante qu’ils ont suffisamment essayé de trouver des candidates. » Malheureusement, l’histoire se répète. Il y a presque 10 ans, un groupe de femmes universitaires a porté plainte devant la Commission canadienne des droits de la personne au sujet de la faible représentation des femmes dans un autre programme de recherche financé par le gouvernement, les Chaires de recherche du Canada. La plainte a été entendue en 2006.

Malgré les efforts de nombreuses personnes bien intentionnées, les préjugés insidieux demeurent très présents. Selon Samantha Brennan, professeure de philosophie à l’Université Western qui a étudié les préjugés sexistes, « il ne s’agit pas d’un préjugé contre les femmes, mais plutôt d’une série de préjugés qui s’appliquent à toutes les étapes du parcours. Chaque préjugé est de faible portée, et aucun ne constitue la totalité du problème. » Elle ajoute qu’il existe de meilleures stratégies décisionnelles en matière d’embauche, d’examen par les pairs et d’évaluations du rendement, comme les évaluations à l’aveugle ou le prolongement des périodes de mise en candidature pour les demandes de bourses. Elle explique que les préjugés surviennent le plus souvent lorsque le temps presse et que les premiers choix ne sont pas des femmes.

Consultée par le groupe d’experts du CAC, Barbara Orser, professeure de gestion à l’Université Ottawa, mentionne que les administrateurs universitaires et les gouvernements doivent suivre le dossier de près et ne pas hésiter à poser des questions. Mais les statistiques à ce sujet ne sont pas faciles à trouver au Canada. Le groupe d’experts a d’abord présumé qu’un investissement de plusieurs milliards de dollars comme les CERC devrait être accompagné d’objectifs et de critères de résultats, mais Michael Wolfson, statisticien et membre du groupe d’experts du CAC, n’a relevé aucune statistique fiable sur la plupart des facteurs, entre autres sur l’étape critique du postdoctorat.

La proportion de femmes est beaucoup plus importante pendant les études en sciences, en technologie, en génie et en médecine, mais elle décline parmi les universitaires de carrière : plus le rang est élevé, moins les femmes sont nombreuses. Les pratiques biaisées d’embauche et de promotion ne constituent qu’un aspect du problème. Les chercheuses doivent également relever les défis de la conciliation travail-famille. En effet, les femmes doivent afficher une productivité maximale en recherche alors qu’elles sont en âge de procréer, et elles participent en moyenne davantage que les hommes à l’éducation des enfants. Compte tenu de l’importance des laboratoires et du travail sur le terrain dans ces domaines, les chercheures ne peuvent pas facilement abandonner pour une année et reprendre le travail par la suite.

Une souplesse accrue par rapport aux congés de maternité et parentaux pourrait résoudre une partie des problèmes de conciliation travail-famille. Les pratiques d’embauche sont également scrutées à la loupe. Au Canada, des ingénieures et des femmes scientifiques se sont hissées aux plus hauts postes d’administration et font bouger les choses. Ilene Busch-Vishniac, ingénieure et rectrice de l’Université de la Saskatchewan, affirme : « Nous allons toujours embaucher la personne la plus qualifiée, mais je suis convaincue qu’en accueillant un groupe diversifié de candidats sur le campus, nous constaterons que les meilleurs sont ceux qui témoignent de la diversité de notre culture. »

Rédigé par
Harriet Eisenkraft
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