Cet article est un sommaire de l’article « Resetting the relationship between faculty, administrators and their boards ».
On a beaucoup parlé du nombre alarmant de recteurs qui n’avaient pas achevé leur premier mandat. Cependant, un recteur ne dirige pas seul; on n’a accordé que peu d’attention au palier suivant de l’administration universitaire, à savoir les provosts, les vice-provosts et les doyens. De même, on n’a pas fait de commentaires sur la relation générale entre les professeurs, l’administration universitaire et le conseil d’administration. Nous devons pourtant nous y attarder : les enjeux sont beaucoup trop grands pour continuer à ignorer le fossé grandissant entre ces groupes.
Parlons d’abord du corps professoral. Leurs membres et leurs associations font plus que jamais part de leur mécontentement à l’égard des administrateurs de haut rang. Au cours des trois dernières années, les associations de professeurs des universités canadiennes ont participé à au moins 10 votes de défiance contre des recteurs, des provosts, des présidents de conseil d’administration, des conseils d’administration et des équipes de direction. Cependant, ces votes n’ont pas vraiment de poids, alors que le discours moralisateur du « eux contre nous » qui accompagne ces votes est particulièrement dommageable.
La structure de gouvernance partagée des universités accorde déjà des pouvoirs d’influence considérable aux professeurs s’ils décident d’en faire usage. Plutôt que d’assister aux rencontres des conseils des professeurs et du sénat, les membres du corps professoral s’en remettent de plus en plus au conseil de direction de leur association. Les associations créées pour réclamer des conditions d’emploi justes semblent pour leur part vouloir assumer un rôle de gestion élargi. Jusqu’à maintenant, elles n’ont réussi qu’à exacerber les problèmes de crédibilité et de confiance entre les professeurs et les administrateurs universitaires de haut rang. Ce faisant, les professeurs affaiblissent leurs principaux défenseurs et alliés lors des discussions avec les conseils d’administration, les gouvernements et le public, c’est-à-dire le recteur et le provost.
Les administrateurs universitaires entament leur carrière hors des rangs universitaires avec le mandat d’aller au-delà des besoins et des préjugés d’une discipline. Ils sont tenus de gérer les ressources de façon responsable et de guider la planification et l’élaboration de politiques au sein de leur établissement. Pour ce faire, ils doivent voir l’université dans son ensemble et comprendre comment ses différents éléments interagissent pour répondre aux besoins des étudiants et de la société. Malgré tout, ils ont une part de responsabilité dans cette relation tendue. Nombre d’entre eux cachent de l’information sur les budgets et les décisions aux professeurs en affirmant qu’« ils ne comprennent pas ». Ce ne sera certainement jamais le cas si nous n’essayons pas de mieux les informer. Quant aux recteurs et aux provosts, ils ne sont pas toujours cohérents dans leur réaction au mécontentement des professeurs, ce qui nuit aux efforts pour régler les causes fondamentales de leurs griefs. Les votes de défiance continuent de se produire, probablement parce que les mauvaises communications, les exigences administratives et les consultations inefficaces entraînent un sentiment de désillusion et d’impuissance chez les professeurs.
Du côté des conseils d’administration, les gardiens de l’intérêt public en enseignement supérieur, l’accent est trop souvent mis sur les objectifs de formation professionnelle et de recherche appliquée aux dépens des besoins futurs de la société et des étudiants. Lorsque les gouvernements, les conseils d’administration et le public consacrent toute leur attention et leur financement au développement de compétences à court terme et limitent les options des étudiants, ils hypothèquent l’avenir du Canada.
On demande aux professeurs de ne plus tirer sur le messager et de participer à la résolution des problèmes financiers qui sont le lot de la plupart des universités; de se familiariser avec l’enseignement supérieur en tant que secteur; et de mettre un terme au cynisme qui accable les administrateurs universitaires. On demande aux recteurs et aux provosts de surmonter leurs différences et de s’exprimer à l’unisson; de communiquer avec les professeurs plus souvent et de façon plus efficace. On demande aux conseils d’administration de tenter de mieux comprendre le fonctionnement des universités; de prendre conscience des forces de leur établissement; et de défendre publiquement la valeur sociale de l’enseignement supérieur. J’invite les professeurs, les administrateurs et les membres des conseils d’administration à remettre les compteurs à zéro. Nous devons travailler ensemble, et nous avons besoin de parler, notamment des sujets suivants :
Financement : Nos contraintes financières sont bien réelles. Il nous faut des solutions à court terme pour fonctionner selon nos moyens, tout en obtenant des engagements publics de financement à long terme.
Liberté universitaire : Un consensus est nécessaire pour définir ce qu’elle est et ce qu’elle n’est pas tout en expliquant son importance. Nous devons transmettre cette information aux conseils d’administration et au public.
Clarification des rôles et gouvernance éclairée : La distinction entre la promotion des intérêts des employés et la gouvernance universitaire est de moins en moins claire. Les représentants d’associations de professeurs siègent aux sénats et aux comités sénatoriaux au même titre que les représentants individuels du corps professoral. En quoi est-ce différent?
Inutile de négocier, il faut seulement collaborer entre pairs pour comprendre les enjeux et les résoudre rapidement. Lancer une telle discussion ne sera pas facile. Le secteur de l’enseignement supérieur comporte tellement de groupes d’intérêts que la tâche semble presque impossible. Pour réunir tout le monde, il pourrait être approprié d’organiser une série de tables rondes parrainées par le gouvernement avec les représentants de chaque groupe. Mais avant tout, nous devons apaiser le débat.
Anciennement provost de l’Université Mount Royal, Kathryn Shailer est actuellement directrice de recherche et conseillère spéciale en études supérieures et en internationalisation au Collège d’art et de design de l’Alberta.
Quel bel article !
Nous venons de vivre un tel moment dans la vie notre jeune (~45 ans) université, l’Université du Québec à Chicoutimi. Le corps professoral, professeurs et chargés de cours, a suffisamment fait pression pour que le recteur sortant annule sa demande de renouvellement de mandat au rectorat. Étant une université publique, notre structure opérationnelle et décisionnelle est légèrement différente de celle des universités privées canadiennes. Le corps professoral doit être consulté pour toute nomination à la haute direction mais n’a pas de droit de vote direct hormis si un professeur membre du Conseil d’administration est nommé sur le comité de sélection ou de renouvellement. Donc, nous sommes maintenant au démarrage d’un processus pour trouver un nouveau recteur pouvant prendre les rennes de notre institution au printemps prochain, exercice qui ne s’avère pas des plus aisés. Nous souhaitons pouvoir trouver la perle rare pouvant rallier autant le corps professoral que le milieu régional et national. Souhaitons-nous bonne chance.