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Un soir au champ de tir

Les clubs de tir apparaissent un peu partout sur les campus, mais ils sont moins controversés qu’on l’imagine.
par THERESA TAYLER
31 JAN 18

Un soir au champ de tir

Les clubs de tir apparaissent un peu partout sur les campus, mais ils sont moins controversés qu’on l’imagine.

par THERESA TAYLER | 31 JAN 18
Photos par Theresa Taylor.

Un soir l’automne dernier, en me promenant dans les couloirs étroits du centre de tir de Calgary, je suis immédiatement frappée par le bruit des balles, le vol des projectiles et un soudain déplacement d’air attribuable à l’énergie du coup de vent que provoque la balle expulsée d’un canon. Je me glisse alors contre un mur pour regarder la vingtaine de tireurs qui, à tour de rôle, visent une cible de papier. Je me demande si tout cela est sécuritaire… ou même sensé.

« C’est pire lorsque tu te tiens derrière nous », explique Chester Liu. Souriant, il me présente un pistolet du genre que John Wayne se serait volontiers attaché à la ceinture. « Pour savoir ce qui en est, il faut que tu tires. Je vais t’acheter des munitions », dit-il, en courant me chercher des balles.

Me voici en présence de membres du club de tir de l’Université de Calgary, une organisation dirigée par des étudiants. Les « agents de tir » nommés par les membres du club m’expliquent comment tirer avec différents fusils. Je suis d’abord très hésitante, convaincue que le recul provoqué par l’expulsion de la balle, jumelé aux mouvements du canon risque de me mutiler ou de me faire perdre un oeil. Ils me rassurent en m’expliquant que c’est très sécuritaire, il n’y a qu’à suivre leurs instructions à la lettre et à ne viser que la cible. C’est alors que, en très peu de temps, je découvre la passion contagieuse du groupe. Je commence à trouver ça très amusant. Non, fascinant, excitant même. Et je ne suis pas la seule!

Les clubs de tir apparaissent un peu partout sur les campus canadiens. En plus du campus de l’Université de Calgary, on trouve des clubs de tir à l’Université Carleton, à l’Institut de technologie de l’Ontario et chez son voisin le Collège Durham. Et les étudiants de l’Université Mount Royal et de l’Université de l’Alberta sont sur le point de créer leurs propres clubs.

Chester Liu, vice-président des opérations au club de l’Université de Calgary.

Cela peut avoir l’air très américain, mais de jeunes adultes canadiens éduqués sont impatients de dégainer. M. Liu, vice-président des opérations au club de l’Université de Calgary, diplômé en histoire et inscrit à un deuxième baccalauréat en éducation, affirme que son groupe a adopté une attitude plutôt canadienne en matière d’armes à feu, c’est-à-dire qu’il n’a pas de motifs politiques. « Tout ce que nous voulons c’est pratiquer et faire connaître notre passe-temps. Nous ne sommes pas un club politique, nous n’appuyons ni ne condamnons aucun parti politique, individu ou loi relative aux armes à feu », explique M. Liu. Le but premier de cette association est d’enseigner la sécurité en matière d’armes à feu aux personnes qui souhaitent s’initier à ce sport.

Kelvin Jiang, président du club de tir de l’Université Carleton et étudiant en troisième année en arts, partage ce point de vue. Il explique que le club de Carleton, qui a été rétabli en 2016 après un bref hiatus, compte une quarantaine de membres pour qui le tir est avant tout une activité sportive et amusante. « Nous nous efforçons aussi d’enseigner la sécurité dans le maniement des armes à feu et souhaitons éliminer les préjugés qui s’y rattachent, explique M. Jiang. Auparavant, le club était un peu plus politisé, on y encourageait les débats sur les lois sur les armes à feu, mais aujourd’hui, nous évitons ces débats, car nous croyons que cela fait peur aux gens. »

Deux membres du club de tir de l’Université de Calgary.

MM. Liu et Jiang disent tous deux n’avoir jamais eu à faire face à l’opposition de leurs camarades dans leurs universités respectives. « Le fait d’avoir un club de tir sur le campus ne choque plus personne, précise M. Liu. Évidemment, la question peut être controversée, car il s’agit de fusils, mais les gens ont l’esprit ouvert. Nous vivons dans un pays libre où tout le monde a droit à son opinion et peut pratiquer un passe-temps tout à fait légal. »

Cela ne veut pas dire que les dirigeants de ces clubs n’ont pas eu d’embûches à surmonter lorsqu’ils ont voulu créer des clubs de tir au sein des associations étudiantes. Les dirigeants des clubs étudiants de l’Université Carleton et de l’Université de Calgary s’entendent pour dire que toute controverse importante concernant la mise en place d’un club de tir sur un campus n’est pas due à l’expression d’opinions morales ou sociales divergentes. Les obstacles proviennent du fait que la plupart des associations étudiantes et des bureaux universitaires doivent se conformer à des règles et à des protocoles stricts dans l’administration de tous les clubs.

Chose certaine, les armes à feu des clubs de tir étudiants sont strictement interdites sur le campus. « Aucune arme à feu ne se trouve sur le campus ni même à proximité », affirme M. Jiang. Le club de Carleton possède trois armes à feu qui sont actuellement enregistrées à son nom, et qui sont entreposées en toute légalité hors campus. Lorsque M. Jiang quittera ses fonctions à la direction du club, les armes seront transférées au prochain président élu, et toujours entreposées hors campus.

Corlia Zaayman, une membre du club de tir de l’Université de Calgary.
Rédigé par
Theresa Tayler
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  1. Vincent / 2 février 2018 à 10:10

    Donc tout va bien ? Les armes, conçues pour tuer, et pour tuer des êtres humains dans les modèles militaires montrés sur les photos, n’auraient rien de politique puisque leurs fans le prétendent ! Ils banalisent l’affaire, la dépolitisent, tout comme l’article tente de le faire. 3%, soldats d’odin, atalante, et autres groupuscules politiques radicalisés et violents, prônant « la liberté politique d’être armés » croissent chaque jour, mais vous êtes incapable de voir le problème. Un jeune raciste étudiant universitaire et pratiquant de tir « sportif » a assassiné 6 musulmans il y a un an, mais il faut banaliser et dépolitiser les armes à feu comme si elles étaient de simples ballons ou des perforeuses de papier. En plus il n’y a aucune analyse genrée alors que ce qui est clair c’est la masculinité hégémonique et toxique qui ressort de cette obsession des armes, quand bien même vous montrez la photo d’une jeune femme (la journaliste ? pas de légendes !) afin de démasculiniser le problème, quand bien même il n’y a que des hommes ailleurs sur toutes les photos, et cités dans l’article. Aucune mise en perspective non plus, alors qu’il s’agit d’un « article de fond » !. Je me demande comment UA a pu laisser passer un papier d’une si piètre qualité.

    • Marc Gauthier / 7 février 2018 à 07:02

      Le tir est une discipline olympique.

    • Potvin, JF / 7 février 2018 à 07:15

      De la boisson et une auto fait beaucoups plus de victimes… donc faut t’il banalisé l’alcool et les auto ? oui tout comme les armes à feu. On dois montrer pattes blanche et suivre une formation. Des gens fou ou criminels va toujours y en avoir…

  2. Jessie Mc Nicoll / 7 février 2018 à 06:51

    C’est rafraîchissant de lire cet article. Au Québec, les lois font en sorte que ce soit interdit. Pourtant, les meilleures mesures de sécurité avec les armes à feu, c’est un entreposage adéquat, et une bonne connaissance du maniement sécuritaire.

    Belle initiative!

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