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Une réforme du système universitaire, oui, mais de quel ordre?

par PETER RICKETTS | 09 JAN 12

Le système universitaire de l’Ontario fait encore une fois l’objet d’un examen minutieux dans le récent ouvrage Academic Reform, dont un extrait a été publié dans le numéro de décembre 2011 d’Affaires universitaires. Les auteurs de cet ouvrage proposent la création d’universités « nouveau genre » axées exclusivement sur le premier cycle et visant à répondre aux besoins de la population croissante de la région de Toronto. Cette proposition radicale se fonde toutefois sur un amalgame de prémisses discutables et sur une analyse simpliste des options envisageables.

Pour comparer les frais de fonctionnement de l’université nouveau genre proposée à ceux d’une université traditionnelle, Academic Reform se fonde sur une analyse financière simpliste qui ne tient pas compte d’une série de facteurs essentiels dans la création d’un nouvel établissement. L’analyse ignore entre autres la mise en place de la structure et de l’équipe administrative, les nouvelles infrastructures universitaires, l’embauche du corps professoral tout entier et l’élaboration des contenus de chaque programme. Par comparaison, lorsqu’on ajoute un campus à une université déjà existante, les services de soutien se mettent en place de manière progressive et s’appuient sur l’infrastructure existante. Academic Reform ne prend pas ces facteurs en considération dans son analyse.

Les auteurs de l’ouvrage soutiennent en outre qu’en offrant des salaires comparables à ceux des universités traditionnelles, les nouvelles universités seront sur un pied d’égalité avec elles pour attirer des professeurs. Or, les professeurs nouvellement embauchés par ces établissements seront des universitaires hautement qualifiés, titulaires de doctorats pour la plupart, et ne se satisferont peut-être pas d’un établissement qui refuse de les appuyer dans leurs travaux de recherche. La plupart seront à la recherche d’un emploi dans une « vraie université », mais entre-temps, ils feront pression auprès de l’administration pour obtenir du temps consacré à la recherche, du soutien administratif pour obtenir du financement externe et du soutien financier pour permettre aux étudiants de participer à leurs travaux de recherche.

C’est l’expérience qu’a connue la Colombie-Britannique avec le système des collèges universitaires. À mesure que ces établissements se développaient, créaient leurs propres programmes d’études et leurs spécialités, embauchaient d’excellents professeurs et livraient concurrence aux universités traditionnelles en matière de recrutement d’étudiants et de financement, ils sont sortis du cadre prévu par le gouvernement et ont demandé à être traités comme de « vraies universités ». La plupart des collèges universitaires sont aujourd’hui devenus des universités régionales qui accueillent principalement des étudiants au premier cycle et où des activités de recherche viennent aussi enrichir le parcours d’apprentissage.

Plutôt que de créer de nouveaux établissements, il serait préférable de répertorier un certain nombre de collèges dans la région de Toronto où offrir des programmes de deux ans en arts et science pouvant mener à un transfert en troisième année dans n’importe quelle université de l’Ontario. Une démarche semblable est mentionnée dans Academic Reform, mais elle est rejetée au profit de la création d’universités « nouveau genre ».

En adoptant un modèle comme celui de la Colombie-Britannique, l’Ontario se doterait d’un système de transfert crédible entre les collèges et les universités et qui justifierait du même coup la création du nouveau Conseil ontarien pour l’articulation et le transfert. Les étudiants inscrits au collège dans les programmes de transfert pourraient poursuivre leurs années supérieures d’études à l’université. Toutes les universités de l’Ontario pourraient se livrer concurrence pour attirer ces étudiants et ainsi contribuer à alléger le problème de la croissance de la population à Toronto. Cette solution permettrait aussi de se doter d’un système d’éducation postsecondaire intégré. Pourquoi se tourner vers une démarche risquée et coûteuse en créant des universités axées exclusivement sur l’enseignement, alors que nous disposons déjà d’une option viable qui s’appuie sur le modèle canadien éprouvé en matière d’éducation postsecondaire?

Les établissements « nouveau genre » proposés dans Academic Reform ne sont pas des universités, bien qu’on les nomme ainsi. L’Ontario et le Canada sont reconnus mondialement pour leurs systèmes universitaires de grande qualité, quelle que soit la taille de l’établissement. C’est une réputation qu’il ne faudrait pas mettre en péril.

Peter Ricketts est provost et vice-recteur à l’enseignement à l’Université Carleton.

Rédigé par
Peter Ricketts
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