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Conseils carrière

La position assise est-elle la nouvelle cigarette?

Quelques conseils pour encourager professeurs et étudiants à bouger davantage.

par BILLY STREAN | 19 AOÛT 21

Vous avez probablement entendu dire que « rester assis est aussi mauvais que fumer ». Ces paroles viendraient de James Levine, professeur de médecine à la Clinique Mayo, qui a déclaré au LA Times que « la position assise est plus dangereuse que le tabagisme, plus meurtrière que le VIH et plus périlleuse que le parachutisme. Nous nous tuons à rester assis. »

Même si la formulation est quelque peu exagérée, il est vrai que rester longtemps assis augmente les risques d’obésité, de douleurs lombaires et cervicales, de diabète, de maladie cardiovasculaire, de thrombose veineuse profonde, de maladie d’Alzheimer, de démence, d’anxiété, de dépression et de mortalité précoce.

L’analogie avec le tabagisme résulte peut-être des conclusions de nombreuses études : les effets de la position assise prolongée ne sont pas réversibles par l’activité physique ni l’adoption de bonnes habitudes. Comme le tabagisme, le fait de rester assis nuit indubitablement à la santé, et la seule façon d’en limiter les risques est de passer quotidiennement moins de temps sur notre postérieur. Pourquoi? Parce que notre métabolisme change quand nous restons longtemps assis. Gavin Bradley, directeur d’Active Working, un groupe international qui amène les gens à passer moins de temps assis, explique une partie du processus : « Après 30 minutes en position assise, le métabolisme ralentit de 90 %. Les enzymes qui transportent le mauvais gras des artères vers les muscles – où il est “brûlé” – ralentissent. Les muscles des membres inférieurs tombent à l’arrêt. Au bout de deux heures, le taux de bon cholestérol chute de 20 %. Se lever pendant cinq minutes suffit pour remettre le métabolisme en marche. C’est si simple que c’en est presque bête. »

En tant que professeurs, nous devons trouver, pour les étudiants et pour nous-mêmes, des occasions de se lever et de bouger. En dépit des exemples donnés par Adam Ant, Bob Marley, Ben E. King, Tammy Wynette et Reel 2 Reel, voici quelques suggestions d’activités et de pratiques qui vous aideront à briser le cycle de l’apprentissage assis.

Montrer l’exemple

Puisqu’il n’y a rien de mieux que de prêcher par l’exemple, examinons d’abord comment prendre soin de soi en tant que professeur. En classe, la majorité d’entre nous donnent leur cours debout, mais l’enseignement en ligne en a incité plus d’un à s’asseoir. Un bureau à hauteur réglable, ou toute autre solution maison, vous permettra de donner votre cours debout. Comme vous le remarquerez probablement, dans cette position, votre voix porte davantage et vous êtes plus alerte.

Je vous entends déjà protester : « Mais je fais de l’exercice plusieurs fois par semaine! » Sachez que selon les études, l’activité physique, bien qu’elle soit indéniablement bénéfique, n’atténue en rien les effets néfastes de la surutilisation de votre postérieur. Le temps passé assis est un facteur de risque indépendant. Faire de l’activité physique est une excellente idée, évidemment, mais la plupart des gens n’en feront jamais assez pour contrer l’« effet de chaise ». Thomas Jefferson, Benjamin Franklin, Ernest Hemingway, Léonard de Vinci et Winston Churchill (qui a vécu jusqu’à 90 ans, sans jamais obtenir sa permanence) se tenaient tous debout à leur bureau.

Tout le monde debout

Avant de suggérer d’autres possibilités faisant appel à des notions avancées de pédagogie, commençons par la base. Au moins une fois pendant vos cours, invitez vos étudiants à se lever et à bouger. Permettez-leur de se dégourdir les jambes un moment, d’aller aux toilettes ou de manger une bouchée. Vous favoriserez leur bien-être, et ils pourront mieux se concentrer sur la matière, si vous donnez un cours magistral. En effet, diverses études indiquent que l’attention chute après 10 à 30 minutes de cours magistral. Faites preuve de créativité : mettez de la musique, faites-leur faire des exercices ou assignez-leur une tâche liée à la matière. Selon la durée du cours, donnez aux étudiants plusieurs occasions de se lever. Les experts recommandent de se lever toutes les 20 à 30 minutes et de faire une activité, peu importe laquelle, afin de prévenir les problèmes liés à l’inactivité prolongée.

Deux par deux

L’une des stratégies d’apprentissage les plus efficaces et populaires est la discussion en paires. Pour ajouter à ce chef-d’œuvre de pédagogie, demandez aux partenaires de discuter debout. Il suffit d’ajouter un « levez-vous » avant de dire « tournez-vous vers votre voisin ou votre voisine ». Pour reproduire le même effet dans un contexte d’enseignement à distance, créez des salles de discussion et invitez les paires à se lever lorsqu’ils échangent leurs idées.

Certains pourraient rechigner à changer leurs habitudes, mais l’évolution joue en votre faveur. Le puissant lien entre le postérieur et la chaise s’est développé très tard dans l’histoire de l’humanité. Nos corps ne sont pas faits pour rester enchaînés à un bureau. J’aime la façon dont le chiropraticien RJ Burr présente la chose : « Pensez-y. Avant, nous passions nos journées à chasser notre prochain repas. Aujourd’hui, nous pouvons presque nous faire livrer une pizza par un drone. Alors que le premier exemple équivaut à l’Iditarod (une course de chiens de traîneau bien connue en Alaska), le second équivaut à s’essuyer le derrière. La différence entre les deux se compare à l’effort physique fourni par un joueur et celui fourni par un spectateur lors d’un événement sportif. »

Côte à côte

La formation de lignes est un excellent moyen de faire bouger vos étudiants. Cette technique est facile à mettre en œuvre dans la classe et, avec un peu de créativité, peut être adaptée aux cours à distance. Chaque fois qu’une discussion donne lieu à différents points de vue, invitez vos étudiants à prendre littéralement position sur une ligne qui, à l’image d’un continuum, s’étire d’un bout à l’autre de la classe. Par exemple, pendant un cours de communication le trimestre dernier, la question existentielle suivante a été posée : préférez-vous les crêpes ou les gaufres? Les inconditionnels de la crêpe pouvaient illustrer leur point de vue en se tenant debout à l’avant, du côté gauche de la classe. Les férus de la gaufre, quant à eux, pouvaient affirmer leur conviction en se plaçant du côté droit. Les étudiants plus modérés pouvaient exprimer leur degré de préférence en se plaçant quelque part entre les deux. Vous pouvez aussi utiliser cette méthode pour organiser des discussions en paires ou demander aux étudiants de choisir leur camp pendant un débat.

En plus de favoriser l’apprentissage actif et la participation, vous aiderez les étudiants à éviter les douleurs lombaires, cervicales et sciatiques, ferez augmenter la dépense calorique, accélérerez la décomposition des graisses nocives dans le sang et ferez augmenter le taux de cholestérol LHD (le « bon »).

Remuons-nous

Pour ma part, j’aime rester actif, et puisque j’enseigne à la Faculté de kinésiologie, de sports et de loisirs, mes étudiants sont probablement plus enclins à l’activité physique que les autres membres du corps étudiant. Que ce soit pour prolonger la durée d’attention, augmenter le niveau d’énergie ou encourager la participation, le mouvement se révèle efficace dans de nombreux contextes. L’idéal est de pouvoir l’intégrer dans les objectifs d’apprentissage du jour, mais les courtes périodes d’activité visant simplement à détourner l’attention et à réveiller les étudiants sont aussi bénéfiques. Les professeurs peuvent laisser libre cours à leur créativité et inventer des activités adaptées à leur contexte. Les façons d’intégrer le mouvement afin d’approfondir l’apprentissage sont très nombreuses.

Se lever coûte que coûte

Selon Joan Vernikos, ancienne directrice de la division des sciences de la vie à la NASA et auteure du livre Sitting Kills, Moving Heals, l’action de se lever entraîne le mouvement des fluides, du volume et des hormones, ainsi que des contractions musculaires et une stimulation de presque tous les nerfs du corps, ce qui est grandement bénéfique. Dans les sociétés de chasseurs-cueilleurs et les sociétés agraires, l’individu moyen passait presque toute la journée à effectuer du travail musculaire de faible intensité ou des activités ambulatoires (loin de Zoom, de toute évidence). Depuis 50 ans, de nombreuses études épidémiologiques ont démontré de façon probante que la sédentarité est un important facteur de risque de décès, notamment à cause de la coronaropathie.

On ne peut contrer les effets de la position assise prolongée en faisant une demi-heure ou une heure d’activité physique par jour : il faut plutôt se lever tout au long de la journée. David Dunstan, professeur agrégé à l’Institut de cardiologie et de diabète Baker, à Melbourne, en Australie, est du même avis : « La fréquence de mouvement, et non son intensité, est le facteur le plus important à considérer. Il est inutile de faire du CrossFit à votre bureau : il suffit de se lever toutes les 20 minutes. »

Billy Strean est professeur à la Faculté de kinésiologie, de sports et de loisirs à l’Université de l’Alberta.

COMMENTAIRES
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  1. René Maréchal / 25 août 2021 à 13:27

    Bonjour,

    J’attire votre attention sur la mention de début indiquant qu’être assis est plus meurtrier que le tabagisme. Cette affirmation circule beaucoup, mais n’est pas tout à fait vrai. L’article de Vallance et al. 2018 [Vallance et al. (2018) Evaluating the Evidence on Sitting, Smoking, and Health: Is Sitting Really the New Smoking? Am J Public Health. 108(11):1478-1482.] arrive à une autre conclusion. Il est vrai que plusieurs centaines d’articles scientifiques et autres concluent que la sédentarité est aussi meurtrière que le tabagisme. Cependant, le groupe d’expert regroupé par Vallance confirme que la sédentarité génère plusieurs effets délétères sur la santé de la population, mais que pour ce qui est du risque de mortalité prématuré plus élevé, il est difficile de comparé 20% (sédentarité) à 180% (tabagisme). Ceci dit, étant un candidat au PhD qui travaille sur la sédentarité, je trouve pertinent que vous sensibilisez la population universitaire sur les méfaits pour la santé de la sédentarité.

    Merci de votre temps en espérant un meilleur éclairage.

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