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Conseils carrière

Les charges de cours : un atout professionnel

Les charges de cours peuvent être le moyen idéal de vous propulser vers un poste permanent - à condition de savoir les utiliser

par CAROLYN STEELE | 11 FEV 08

Entre l’examen de synthèse et le poste menant à la permanence, les charges de cours représentent un passage presque obligé. Certains universitaires craignent à juste titre de se faire prendre dans la ronde des charges de cours, mais pour nombre d’entre eux, elles sont en fait l’occasion de se tailler un avantage décisif dans ce qui constitue pour la main-d’œuvre d’aujourd’hui l’un des cheminements professionnels les plus compétitifs.

La tendance préoccupante qui consiste à recourir à des chargés de cours pour combler l’écart grandissant entre le nombre d’inscriptions dans les universités et le niveau de financement des établissements jouit d’une attention considérable, bien que les chiffres qui permettraient de la quantifier demeurent flous pour le Canada. Tout le monde a déjà entendu parler de titulaires de doctorat qui, pour survivre, acceptent à gauche et à droite des contrats d’enseignement qui finissent par représenter plus de 100 pour cent d’une tâche normale. Ce genre de vie laisse bien évidemment peu de temps ou d’énergie pour la recherche, élément clé pour décrocher un poste permanent. Résultat : des universitaires hautement qualifiés qui se perçoivent comme les éternels seconds, perpétuels prisonniers des charges de cours.

On entend rarement parler du bon côté de cette situation, celui qui montre que l’enseignement prolongé peut parfois donner aux titulaires de doctorat une longueur d’avance dans la course aux postes permanents. En comprenant bien les attraits et les dangers d’une telle stratégie, vous pouvez choisir d’utiliser les charges de cours à votre avantage tout en vous préparant à affronter le marché extrêmement compétitif des postes menant à la permanence.

Des stratégies uniques qui feront progresser votre candidature

Diane Zorn, une doctorante en philosophie de l’éducation, s’est découvert une passion pour l’enseignement grâce à une série de contrats d’enseignement à l’Université York – plus de 30 en six ans. La théorie et la pratique de l’enseignement universitaire, et en particulier l’usage des technologies liées à Internet comme la vidéo en continu et la baladodiffusion, l’ont captivée au point de lui faire modifier le fil directeur de sa thèse afin d’explorer un concept lié à la théorie et à la pédagogie de l’éducation. Résultat : au cours des deux ou trois dernières années, elle a été en nomination pour quatre prix d’enseignement importants et a reçu, en 2007, celui que York décerne à l’occasion d’un concours ouvert à tous ses enseignants, le University-Wide Teaching Award. York est l’une des rares universités canadiennes à permettre à ses chargés de cours de faire une demande de conversion de leur statut vers celui qui mène à la permanence, et Mme Zorn compte sur la force de son dossier d’enseignement, ainsi que sur les recherches qu’elle mène dans le domaine, pour lui procurer un avantage dans le processus de conversion, qu’elle entamera l’an prochain.

Comme la plupart des chargés de cours, elle n’a pas pu publier beaucoup, les exigences de l’enseignement étant ce qu’elles sont (trois de ses articles sont actuellement sous presse), mais Mme Zorn a mis au point une stratégie en quatre points pour remédier à cette situation.

  • Elle a « travaillé son image de marque », une expression qu’elle emploie pour exprimer qu’elle a veillé activement à lier son nom à ses différents domaines de recherche, auparavant le « phénomène de l’imposteur » puis, désormais, la pédagogie de l’enseignement et la technologie. Pour ce faire, elle a participé à des colloques, effectué du réseautage et donné suite aux commentaires des gens qui ont manifesté de l’intérêt pour ses travaux, ce qui lui a valu des invitations à donner des conférences dans d’autres établissements.
  • Elle a « trouvé, utilisé et reconnu l’apport » de nombreux mentors de son domaine, dans les disciplines qu’elle souhaitait enseigner, au Centre for the Support of Teaching de York, et s’est servi des conseils d’autres personnes qui lui ont expliqué les rouages du milieu universitaire et la façon de les faire jouer à son avantage. Dans certains cas, ces relations ont mené à des collaborations avec d’autres universitaires et d’autres experts, ce qui lui a donné des occasions de plus d’accroître la portée de son influence sur le campus.
  • Mme Zorn encourage les doctorants à ne pas s’effaroucher à l’idée de faire leur autopromotion dans l’université, et son conseil est bien avisé. Quand vous connaissez quelqu’un – idéalement, un mentor ou un professeur permanent qui admire votre enseignement – ne lui demandez pas simplement une lettre de recommandation, suggérez-lui de proposer votre candidature pour un prix et facilitez-lui la tâche en lui fournissant l’information et les précisions dont il aura besoin. Un autre bon moyen : assurez-vous que vos étudiants savent comment présenter une candidature, s’ils pensent que vous, ou n’importe lequel de leurs professeurs, êtes un enseignant exceptionnel. Des enseignants dont le travail aurait plusieurs fois mérité d’être reconnu passent à côté des prix décernés, juste parce que les personnes qui pourraient proposer leur candidature ignorent comment procéder ou hésitent à faire les démarches.
  • En dernière instance, c’est votre dossier de publications qui assoira votre réputation professionnelle, mais, comme le croit Mme Zorn, le fait de mettre sous les yeux du comité de sélection votre activité savante et autres hauts faits, comme un prix d’enseignement, peut maintenir l’intérêt des membres du Comité éveillé pendant que vos articles sont soumis au processus de révision en vue de leur publication.

Quand Mme Zorn aura terminé sa thèse, elle prévoit enseigner encore une année comme chargée de cours, tout en étoffant son dossier de publications pour rendre sa candidature plus concurrentielle. Ses articles les plus récents ne seront pas sous presse au moment d’entamer les démarches de conversion, mais ils figureront de façon convaincante aux côtés de son dossier d’enseignement et rendront sa demande très attrayante. Sans l’expertise pratique et théorique que son travail de chargée de cours lui a permis d’acquérir, Mme Zorn n’aurait peut-être pas pu se distinguer nettement des concurrents en quête des mêmes postes.

Un objectif qui rapporte

Pour Fiona Whittington-Walsh, les charges de cours à la Ryerson University lui ont permis d’accroître sa confiance en elle et ses compétences de directrice de cours, tout en lui fournissant un revenu qui lui a permis de subvenir à ses besoins et à ceux de sa fille, qu’elle a élevée seule tout en faisant son doctorat. Mme Whittington-Walsh, dont le contrat d’enseignement d’une durée de deux ans prend fin en 2008, croit que son travail comme directrice de cours lui a permis de s’intégrer au milieu universitaire et donc d’être dans une position plus avantageuse pour obtenir un poste menant à la permanence (mais elle reconnaît que la charge de travail d’un poste à temps plein, jointe aux responsabilités parentales et à la rédaction d’une thèse, peut constituer une source de stress). L’expérience de Mme Whittington-Walsh met en lumière deux facteurs qu’il faut considérer au moment de décider si les charges de cours vont aider ou nuire à votre cheminement vers un poste menant à la permanence.

  • Le revenu tiré d’un contrat d’assistanat à l’enseignement sera-t-il suffisant, ou devrez-vous accepter une charge de travail supplémentaire? Cette question se pose à de nombreux candidats au doctorat, en particulier s’ils ont des enfants ou des responsabilités financières. Bien que la plupart des programmes interdisent aux étudiants à temps plein d’enseigner plus de dix heures par semaine, il pourrait être intéressant d’étudier les avantages et les inconvénients des options offertes par votre programme qui vous permettraient d’enseigner au-delà de cette limite. Vous devrez peut-être insister pour obtenir ces renseignements – les politiques des établissements ne peuvent prévoir tous les cas de figure.
  • Diriger un cours, qui vous donne un certain pouvoir décisionnel sur le contenu, les lectures, la structure et l’évaluation, a beaucoup plus de poids, aux yeux d’un comité de sélection, qu’un assistanat, où vous avez habituellement peu d’influence sur la conception du cours ou sur l’évaluation. Tous les autres facteurs étant égaux, les comités de sélection préfèrent les candidats qui sont prêts à entrer en classe avec un minimum de supervision et donneront donc leur préférence à ceux qui ont déjà dirigé plusieurs cours et obtenu des évaluations favorables, plutôt qu’à ceux qui n’ont été qu’assistants.

En résumé

Tous les candidats au doctorat ne visent pas à obtenir un poste menant à la permanence, c’est bien connu. Certains ne sont pas sûrs de vouloir aller jusqu’au bout de cette démarche, ou souhaitent explorer d’autres avenues professionnelles. Dans les deux cas, accepter des charges de cours peut s’avérer intéressant, tant du point de vue des finances que de celui de l’expérience, et cette possibilité ne devrait pas être écartée pour la seule raison qu’elle est temporaire. Quelques charges de cours vous offrent peut-être une occasion unique de découvrir un angle très différent de la culture universitaire que vous avez connue à titre d’étudiant aux cycles supérieurs. J’ai discuté avec plusieurs doctorants venus s’informer de leurs perspectives professionnelles après avoir accepté des contrats de charges de cours : leur expérience en enseignement leur avait fait voir des dessous inattendus de la vie universitaire, et ils avaient décidé que la course à la permanence s’arrêtait là pour eux. D’autres étudiants peuvent avoir des projets de création ou d’affaires qui, à eux seuls, ne leur garantissent pas un revenu suffisant. Mais en combinant ces projets à des charges de cours, ils peuvent jouir de revenus suffisants, le temps de consolider leurs assises. Certains, surtout ceux qui s’inscrivent à temps partiel au doctorat, ont déjà amorcé une carrière différente. Leurs études doctorales témoignent alors d’un intérêt profond qu’ils souhaitent cultiver grâce à l’enseignement et à la participation occasionnelle à des colloques, sans avoir à subir la pression de la course au poste permanent.

Les questions à se poser

  • Vos sources de revenus actuelles : Vous permettent-elles de subvenir à vos besoins, ou devez-vous gagner des revenus supplémentaires pour obtenir votre doctorat dans un délai raisonnable?
  • Disponibilité des charges de cours : L’offre de charges de cours est-elle importante dans votre domaine? Êtes-vous en relation avec des gens qui pourraient vous avertir des charges de cours disponibles ou recommander votre candidature pour ces emplois?
  • La qualité de l’expérience : L’enseignement est-il un domaine qui vous plaît et dans lequel vous seriez ravi d’acquérir davantage d’expérience, ou croyez-vous que cela nuirait à vos réels intérêts de recherche?
  • La progression de vos travaux : Vos recherches en vue de la thèse ou vos publications postdoctorales sont-elles suffisamment avancées pour que le fait d’accepter la responsabilité de diriger un cours ne les remette pas en cause?
  • Le soutien de votre établissement : Si vous acceptiez une charge de cours, cela aurait-il des répercussions sur votre statut dans votre université ou dans votre programme, ou aux yeux de votre directeur de thèse? Si c’est le cas, pouvez-vous gérer la situation ou devient-elle problématique?

S’il est vrai que la pénurie de postes menant à la permanence est un enjeu crucial auquel les universités canadiennes et le gouvernement devront s’attaquer, surtout dans le contexte de leur récent mandat d’augmenter le nombre d’inscriptions aux cycles supérieurs; la grande quantité de charges de cours disponibles qui en résulte n’est pas nécessairement un trou noir qu’il faut éviter à tout prix. Les charges de cours, quand elles sont bien planifiées et conjuguées à l’appui de mentors, sont une bonne occasion d’affirmer votre expertise à titre de leader dans l’enseignement universitaire, d’en connaître davantage sur la culture et les normes administratives universitaires, ou même d’explorer une autre avenue professionnelle sans couper les ponts avec la vie universitaire.

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