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Universitaire à vie

Réflexions sur la retraite

Témoignage d’une professeure émérite qui, même à la retraite, a encore l’impression que le monde est à sa portée.

par SHARON MOORE | 27 AVRIL 23

Après 45 ans de carrière en tant qu’infirmière autorisée et psychologue, j’ai pris ma retraite et suis devenue professeure émérite en 2019. Cette décision n’a pas été prise à la légère. En fait, je ne m’y étais pas vraiment préparée : j’aimais travailler, enseigner, écrire, voyager et faire de la recherche, mais je savais que je ne voulais pas travailler à mes 70 ans. Quand j’ai rencontré ma doyenne pour « discuter de retraite », j’ai fixé une date au hasard, avec un horizon d’un an. Celle-ci est arrivée beaucoup plus vite que ce à quoi je m’attendais.

J’ai toujours cru que je comprenais en quoi consistait le vieillissement; après tout, j’entretiens un lien avec la gérontologie depuis mon enfance. Quand j’avais sept ans, mon père, un pasteur, m’amenait le dimanche après-midi dans les foyers de soins de longue durée où il faisait le service. Je jouais les hymnes au piano, j’étais la coqueluche des résident.e.s. J’avais l’impression d’être à ma place. Je crois que l’amour et l’accueil de ces aîné.e.s ont forgé les assises de ma carrière : le vieillissement et la santé mentale ont toujours été au cœur de mes activités cliniques, d’enseignement et de recherche.

Il y a eu ces expériences d’enfance. Il y a eu mon travail d’aide-soignante en foyers de soins de longue durée à la fin du secondaire et pendant mes études universitaires. Puis, il y a eu ma carrière d’enseignante, de directrice de recherche et de consultante en vieillissement et en milieux de soins de longue durée. Tout cela a nourri mon amour pour le travail auprès des aîné.e.s. Je voyais les difficultés que le vieillissement occasionne, mais j’y voyais aussi une source de joie et de possibilités. Je voulais changer notre manière de prendre soin des aîné.e.s. J’ai écrit des articles sur le vieillissement. J’ai élaboré des cours de cycles supérieurs sur le vieillissement et la santé mentale ou encore sur le vieillissement tout au long de la vie, entre autres sujets. Au fil de ces expériences, je me suis bâti une carrière en milieu clinique, ce qui donnait un sens à mon travail et me permettait de m’épanouir.

Aujourd’hui, après trois ans de retraite, je me retrouve de l’autre côté du rideau et je repense à mon passé tout en préparant l’avenir. Ces réflexions se veulent un aperçu des principes qui me guident dans mon exploration de la vieillesse.

Dans un livre récent, l’auteur Parker Palmer évoque l’essai Reuniting with Awe, écrit par son amie et collègue. Il dit qu’elle y explique merveilleusement comment sa fille de 16 mois l’aide à redécouvrir la vie à travers des yeux de jeune enfant. « Le monde est à sa portée », écrit-elle. M. Palmer explique que lui aussi, à 79 ans, a l’impression que le monde est à sa portée.

Moi aussi. J’espère ne jamais perdre ce sentiment. J’adore apprendre. Je souhaite pouvoir conserver la même attitude que cette dame de 98 ans, une participante à l’une de mes études, qui m’a dit : « J’ai encore tant à apprendre, tant de livres à lire et tant de couchers de soleil à voir. »

Maintenant que mon horaire est beaucoup moins chargé, je redécouvre la flexibilité. Je peux lire un magazine ou un livre, juste pour le plaisir, quand j’en ai envie. Je peux aller me promener à pied, en auto ou à vélo à n’importe quelle heure de la journée. À tout moment, je pourrais décider de prendre le thé ou de passer du temps avec des proches de manière impromptue. Je vis près de magnifiques montagnes, lacs, rivières et sentiers où la vue est à couper le souffle. J’ai le temps d’apprécier le lever du soleil qui annonce une autre journée.

Explorer la vieillesse, ce pays dont je suis récemment devenue citoyenne, c’est retourner sur les bancs d’école. J’en profite pour découvrir la vie dans cette nouvelle contrée et apprendre ce que je peux faire pour me montrer digne de ma nouvelle citoyenneté.

Sharon L. Moore est professeure émérite de l’Université Athabasca. 

COMMENTAIRES
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  1. Boissé Hélène / 1 mai 2023 à 13:38

    Très inspirant!

  2. Judith / 5 mai 2023 à 17:11

    Wow, une douceur à lire !!!

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