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À mon avis

La crise économique, une occasion d’affaires?

Les universités canadiennes pourraient tirer parti d’un renforcement de leurs activités de recrutement d’étudiants étrangers en quête de qualité à un prix abordable

par LEON TRAKMAN | 09 FEV 09

Dans le contexte de la crise financière mondiale, les Canadiens auraient tort de négliger les occasions que leur procure leur système social, économique et politique exceptionnel. Bien qu’il faille s’attendre à vivre des temps difficiles, on peut profiter des avantages de la situation. Et l’enseignement supérieur fait partie de ces avantages.

La chose nous échappe parfois, mais l’enseignement supérieur est une industrie internationale majeure qui procure des revenus d’exportation aux pays capables d’attirer en grand nombre les étudiants étrangers. L’Amérique a profité de cette industrie d’exportation jusqu’à ce que les États-Unis décident, à la suite de la tragédie du World Trade Center, de fermer leurs frontières en limitant les visas. C’est ainsi que, au cours de la dernière décennie, l’Australie a réussi à canaliser une partie des gains des États-Unis.

À l’heure actuelle, la crise financière qui plonge tout le monde dans la perplexité offre au Canada la possibilité de récolter d’importants bénéfices de la balance commerciale grâce à l’excellent système d’enseignement postsecondaire dont il dispose.

La crise financière mondiale a nui au milieu universitaire et mis au jour le fait que les universités sont des « entreprises » qui « vendent » des services d’éducation et de recherche à perte, et qui s’attendent à ce que le gouvernement et les organismes de bienfaisance ou les fondations viennent combler la différence.

Les établissements, publics comme privés, ont peu de chances de bénéficier de dons de bienfaisance en temps de crise; le gouvernement, du moins celui des États-Unis, a déjà réduit le financement de l’enseignement public à un point tel que les frais sont devenus aussi élevés dans les plus prestigieuses universités d’État que dans les établissements privés.

En revanche, les universités canadiennes seront moins gravement touchées par le ralentissement économique mondial que leurs homologues étrangères, car le fardeau qu’entraîne la situation financière critique est généralement moins important ici qu’ailleurs. Par exemple, aux États-Unis, les frais de scolarité exigés dans les principales universités privées sont devenus inabordables et les frais que doivent payer les étudiants provenant d’un autre État ou de l’étranger pour fréquenter une université publique ont connu une augmentation beaucoup plus grande qu’au Canada.

Les universités canadiennes sont non seulement mieux placées que les universités des États-Unis pour profiter du marché étranger de l’exportation de l’éducation postsecondaire, elles sont aussi avantagées par rapport aux autres pays.

Les universités du Royaume-Uni s’attendent à un déficit budgétaire important puisque le gouvernement de Gordon Brown concentre tous ses efforts au soutien du secteur financier en difficulté. La situation risque d’être comparable dans beaucoup d’universités européennes. Les universités asiatiques, en pleine expansion depuis le début de l’essor économique de la Chine, se retrouvent pour leur part à court d’argent, la croissance de 10 pour cent ayant fait place à une décroissance de 10 pour cent.

Les attributs « publics » de l’enseignement universitaire sont, en comparaison, beaucoup mieux implantés au Canada que dans la plupart de nos pays concurrents. La « privatisation » des frais de scolarité se poursuivra, mais elle est modérée par la conviction que tout étudiant qualifié a droit à une formation postsecondaire de qualité, que l’enseignement supérieur n’est pas l’apanage des mieux nantis.

En outre, et ceci distingue particulièrement les établissements canadiens de ceux du reste du monde, il y a peu de risques de voir la qualité de l’éducation postsecondaire diminuer dans les universités canadiennes. Le marché international tient de plus en plus compte des possibilités de formation de grande qualité à prix abordable. Or, les universités canadiennes peuvent offrir la qualité recherchée à des prix concurrentiels. Les grands établissements universitaires canadiens sont donc bien placés pour combler les lacunes du marché international entraînées par la crise financière.

Seule l’impossibilité de reconnaître les occasions qui se présentent pourrait faire obstacle. Si les gouvernements fédéral et provinciaux réduisent le financement des universités pour faire face à la crise, le pays perdra par la même occasion la possibilité d’accroître sa part du marché mondial de l’éducation.

Ce n’est pas le moment de perdre ce qui pourrait bien représenter le meilleur marché d’exportation que nous ayons. En continuant d’offrir une excellente qualité à un coût raisonnable, le Canada pourrait, dans un monde maintenant sensible aux coûts, devenir un des principaux pays éducateurs et, ainsi, accroître son influence en plus de renflouer ses coffres.

Leon Trakman était, jusqu’à tout récemment, doyen de la faculté de droit de l’Université de Nouvelle-Galles-du-Sud à Sydney, Australie. Canadien d’origine, il a enseigné et étudié un peu partout dans les pays anglophones, y compris à l’Université Harvard, à l’Université Dalhousie et à l’Université du Cap.

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