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Parole aux leaders

La valeur d’un diplôme

Un diplôme offre des possibilités, pas une garantie de succès.

par DOUG OWRAM | 07 NOV 11

Un diplôme vaut-il le temps et l’argent consacrés à son obtention? À la suite de la parution d’une énième étude sur le sujet, la question a fait la une des médias à l’échelle nationale. On s’est interrogé sur les revenus que gagnent les diplômés par rapport à la moyenne. On a souligné le fait que certains diplômes ès arts n’engendrent, par rapport aux sommes investies, qu’un rendement de quatre à six pour cent. Cela dit, les grands titres ont d’abord été consacrés au fait que 18 pour cent des diplômés touchent moins que la moitié du revenu canadien moyen.

Bien qu’alimenté par de nouvelles données, ce débat n’a rien de neuf, pas plus que les inquiétudes exprimées. Pratiquement chaque année paraît une nouvelle étude qui vante ou met en doute la valeur des diplômes. Une chose est sûre en tout cas : l’orientation vers les principaux programmes d’arts et sciences (ces études seraient-elles l’œuvre de diplômés en commerce?) est souvent décriée par rapport à d’autres choix, qu’il s’agisse d’opter pour une école de métier ou, comme le disait un commentateur, de choisir de partir s’installer à Fort McMurray.

Une partie de moi sait bien qu’il n’y a pas de fumée sans feu, qu’il est tout à fait légitime pour chacun de s’interroger sur la valeur monétaire de son diplôme. Les études sur la question présentent sans doute une pertinence accrue pour ceux qui, comme je l’évoquais dans mon dernier article, se retrouvent avec des dettes considérables une fois leur diplôme en poche. Reste qu’il y a quelque chose d’à la fois artificiel et dérangeant dans cette tentative d’établir un lien direct entre cours suivis et revenus gagnés par la suite.

En tant qu’enseignants, nous avons toujours soutenu que l’université apporte certaines compétences clés, en particulier dans le cadre des principaux programmes. Bien sûr, le contenu des cours importe, mais une fois sur le marché du travail, la plupart des diplômés en arts et sciences et dans bien d’autres domaines ne mettent guère à contribution leur savoir en biologie, en littérature ou en sciences politiques. Ils y exploitent, par contre, leur sens critique, leurs compétences en rédaction et, sans doute plus que tout, leur capacité à apprendre. Quand un individu se voit confier une tâche, son aptitude à bien gérer celle-ci, à effectuer les recherches nécessaires et à rendre compte des résultats obtenus de manière claire et convaincante est très importante. Cette aptitude est le fruit d’un processus complexe et ne se perd pas avec le temps. Il convient également de ne pas négliger les aptitudes accessoires acquises au fil du parcours universitaire, y compris en matière de gestion du temps et de travail en équipe.

En tant qu’universitaires, nous aimons croire que l’enseignement confère des atouts d’une importance fondamentale, qui dépassent les exigences du marché du travail tout en y étant inhérents. Il expose les étudiants à des points de vue nouveaux et passionnants, leur permet de côtoyer des gens d’autres cultures et d’autres pays ainsi que de prendre part à des activités nouvelles, qui vont du sport à l’action politique sur les campus.

Ne nous leurrons pas : l’université offre des possibilités et il importe à chacun de les saisir. Certains utopistes déçus évoquent une époque (ou une génération) enfuie où les étudiants étaient à la fois sérieux, mobilisés et extraordinairement futés. Or, tel n’a jamais été le cas. Les étudiants ont de tout temps affiché divers degrés de maturité, d’intelligence, de mobilisation et de sens de l’initiative. Nous pouvons leur présenter des possibilités, leur montrer comment ouvrir les portes, mais quelle que soit l’époque, c’est aux étudiants et à aux seuls qu’il incombe de saisir ces possibilités.

Ce qui précède vaut pour les années passées à l’université, et également pour la suite. Certains diplômés partent à la dérive, d’autres prospèrent. Certains ne se soucient guère de gagner beaucoup, et c’est bien leur droit. D’autres au contraire souhaitent gagner le plus possible, mais n’ont ni le sens de l’initiative ni les atouts nécessaires pour y parvenir. D’autres enfin, sans qu’ils n’en soient responsables, se retrouvent dans des situations économiques ou sociales qui les dépassent.

Malgré tout, dans tous les cas, un diplôme universitaire confère à son titulaire des atouts qui influent sur des éléments, qui vont bien au-delà du revenu annuel, en renforçant sa capacité à s’adapter et à accéder à une meilleure qualité de vie.

En tant qu’enseignants, nous pouvons prendre certaines mesures pour faire en sorte qu’un diplôme apporte le plus possible à son titulaire. Premièrement, nous pouvons concevoir des programmes d’études au contenu renforcé, qui maximisent les compétences sous-jacentes. Deuxièmement, nous pouvons faire en sorte que ces compétences sous-jacentes soient un objectif incontournable plutôt qu’accessoire. Nous devons sensibiliser les étudiants à ce qu’ils ont acquis, sans quoi comment pourraient-ils l’utiliser? Enfin, les universités doivent préparer les diplômés à la vie réelle, hors des salles de classe. La possibilité d’acquérir des compétences nouvelles (et une bonne dose d’idéalisme) au premier cycle peut être gratifiant tout en constituant un précieux ajout à son C.V.

En somme, nous avons l’obligation de proposer aux étudiants aussi bien des possibilités que des cours au contenu renforcé, mais nous ne pouvons leur laisser croire qu’un diplôme est une garantie de succès. Le diplôme n’est qu’une étape du parcours.

Doug Owram est vice-recteur adjoint du campus Okanagan de l’Université de la Colombie-Britannique. Il est aussi historien canadien et membre de la Société royale du Canada.

À PROPOS DOUG OWRAM
Doug Owram is deputy vice-chancellor of UBC Okanagan and a Canadian historian.
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