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Les conférences publiques

par MOIRA MACDONALD | 12 JAN 09

Les conférences publiques contribuent grandement à affûter l’esprit, comme l’a constaté notre correspondante après avoir assisté gratuitement pendant un mois à quelques-unes d’entre elles dans les universités de Toronto

À l’ère du numérique et de l’infor-mation instantanée, ils peuvent sembler appartenir à une époque révolue. Il faut prendre le temps de s’y rendre, de trouver la bonne salle et de s’asseoir aux côtés d’inconnus, en pleine lumière.

Les conférences publiques sont pourtant très courues et permettent même de tisser des liens, comme l’a constaté la correspondante chargée d’assister pendant un mois à celles qui se tenaient dans les universités de la région de Toronto. Notre correspondante a finalement pu assister à six d’entre elles, en commençant par une table ronde sur les différences culturelles et les accommodements raisonnables organisée sur le campus du centre-ville de l’Université de Toronto.

L’exercice avait pour but d’examiner les questions soulevées par la controversée commission du gouvernement du Québec sur les accommodements raisonnables qui, en 2007 et 2008, a sillonné la province dans l’espoir d’apaiser les tensions interethniques.

Daniel Weinstock, de l’Université de Montréal, membre du comité consultatif de la commission, a ouvert le débat en déplorant le caractère « fortement politisé » de la démarche. Les quatre autres panélistes ont abordé les aspects sexospécifiques du dossier et les défis socioéconomiques qui guettent les minorités ethniques, en plus de se demander si la société canadienne actuelle n’a pas atteint les limites de l’ouverture et de la laïcité. « Un musulman peut-il vraiment croire à l’impartialité d’un juge juif? », s’est interrogée Audrey Macklin, professeure à la faculté de droit de l’Université de Toronto.

L’analyse sociologique, politique et ethnique effectuée s’est révélée riche mais très complexe, pour ne pas dire plus… Au terme de la table ronde, le modérateur a invité le public présent à se joindre aux panélistes autour d’un verre et de canapés pour une discussion à bâtons rompus, histoire d’élucider les points les plus obscurs. Pas mal pour une manifestation gratuite!

Un des grands moments du mois de notre correspondante s’est déroulé à l’Observatoire astronomique de l’Université York. Sans proposer de conférence au sens strict, les étudiants en astronomie de York ont beaucoup à apprendre aux personnes qui s’y présentent au terme du long parcours qui sépare le centre-ville de l’unique observatoire public de Toronto. Situé dans le nord-ouest de la métropole, celui-ci ouvre chaque semaine ses portes au public qui peut ainsi, pour le prix d’un billet de métro, plonger littéralement dans un autre monde.

Sous la coupole venteuse et plongée dans l’obscurité, notre correspondante a pu voir une douzaine de personnes scruter le ciel à travers deux télescopes. Deux heures durant, les étudiants ont multiplié les réglages pour leur permettre d’observer Jupiter et ses quatre plus grandes lunes, les nébuleuses de La Lyre et Dumbbell, une étoile double ainsi que la galaxie la plus proche de nous, Andromède.

Ezra Moro et son ami Robert Pestrin fréquentent l’observatoire toutes les semaines depuis un mois, y voyant une « occasion amusante » de rencontrer des gens. « J’ai hâte à l’hiver, a confié M. Moro. Les conditions d’observation sont alors idéales, et il n’y a personne! »

Notre correspondante a achevé son périple en assistant à une conférence du géant de la littérature Umberto Eco, qui a attiré quelque mille personnes, dont bon nombre de banlieusards sur le campus de Mississauga de l’Université de Toronto.

« Nous sommes des gens simples, mais nous avons soif de culture! », a déclaré Mikki Trigani, attendant avec impatience que commence l’exposé du professeur Eco sur l’histoire de la beauté et de la laideur.

Pourtant ravi de voir l’écrivain en chair et en os, le public a eu du mal à bien comprendre ses propos en raison de son fort accent italien, de sa voix parfois rocailleuse et de son débit rapide à la lecture de son exposé. Peu importe ce qu’un conférencier a à dire, s’il n’est pas outillé pour le faire, il risque de décevoir une partie de son auditoire. Ce qui a été le cas.

Toronto abrite cinq universités, dont plusieurs comptent de multiples campus. Les conférences publiques au programme ne manquent donc pas. Un soir, par exemple, notre correspondante a dû choisir entre un exposé sur l’art de la Haute Renaissance proposé par l’irrévérencieux professeur de l’École d’art et de design de l’Ontario, Francis Broun – qui affirme que Michel-Ange « ne changeait jamais de chaussettes » – et une intrigante présentation multimédia intitulée « Violence et splendeur », à l’Université Ryerson. Cela dit, chaque ville canadienne compte sans doute au moins un professeur ou un étudiant plus que désireux de partager sa passion dans le cadre d’une conférence publique et probablement conscient de l’importance de le faire.

« Une idée reçue veut qu’Internet soit une formidable mine d’information, souligne Hal Swann, qui fréquente assez régulièrement ce genre de manifestations. Mais Internet n’enseigne pas la pensée critique, contrairement aux universités. Si elles veulent réellement être perçues comme utiles, les universités doivent proposer des conférences publiques. »

Rédigé par
Moira MacDonald
Moira MacDonald est journaliste à Toronto.
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