Passer au contenu principal

Des « avatars » en salle de classe

Les collèges et les universités explorent les possibilités d’apprentissage dans un monde virtuel accessible en ligne

par UA/AU | 01 DÉC 08

Tout près de la municipalité de Belleville, en Ontario, se trouve l’île du Collège Loyalist. Divisée en quatre principaux secteurs séparés par des lagons et des étangs, elle comprend des salles de cours, un centre d’études, une aire ouverte semblable au Colisée et d’autres immeubles aux toits percés d’étranges ouvertures circulaires. Pour aller d’une classe au pub ou ailleurs sur le campus, on peut emprunter le deltaplane stationné sur le toit du café ou faire de la planche à voile depuis la plage. Toutefois, la téléportation demeure le moyen le plus rapide.

Vous l’aurez deviné, les habitants de cette île ne sont pas réels; il s’agit d’avatars. Et cette île ne se trouve pas près de Belleville, mais fait partie de Second Life, un monde virtuel créé par Linden Research inc. en 2003. Les utilisateurs choisissent leur identité parmi une liste assez limitée de noms plutôt excentriques. Pour ma part, je m’appelle Christal Garzo.

À l’origine un lieu de réseautage social et d’affaires, Second Life a lancé Campus: Second Life en 2004 à l’intention des établissements d’enseignement. Des centaines d’écoles américaines, dont les universités Harvard, Columbia et Duke, se sont rapidement inscrites afin de donner des cours en ligne. Aujourd’hui, plus de 120 écoles situées entre autres en Finlande, au Brésil, en Corée et au Royaume-Uni font partie de la florissante communauté virtuelle qui utilise Second Life aux fins de l’enseignement à distance. Vu son extraordinaire croissance, il y a lieu de se demander si l’enseigne-ment 3D en ligne remplacera un jour nos salles de classe traditionnelles, opposant ainsi la vraie vie à celle qui se déroule dans Second Life.

Il y a deux ans, le Collège Loyalist a été le premier établissement postsecondaire canadien à créer un campus virtuel dans Second Life et le cours de cyberjournalisme de Robert Washburn est devenu le premier du Collège, voire du pays, à être donné par un avatar.

En ce jeudi matin de février 2008, l’avatar du professeur Washburn explique à des étudiants de deuxième année les choix de sujets en journalisme. Cinq avatars aux noms farfelus sont assis au premier rang et un autre s’installe quelques rangs derrière.

Duncan Innis, l’avatar du professeur Washburn, s’adresse à sa classe virtuelle vêtu d’un complet et portant ses cheveux plus longs que ceux de sa version humaine. L’étudiant nommé Deerhunter se fait remarquer d’emblée, peut-être parce qu’il a levé la main avant les autres, ou en raison des cornes qu’il arbore sur son front couleur de litchi.

Puisqu’il n’y a pas de son, les mots apparaissent à l’écran comme dans une séance de clavardage. Un avatar esquisse un mouvement de frappe dans les airs pour parler. Le professeur Washburn et ses étudiants s’interrompent souvent mutuellement, puisque chacun peut taper quand il veut.

Bien entendu, enseigner avec Second life comporte ses désavantages. Marilyn Gris, directrice du recrutement des étudiants et des communications en ligne au Collège Mohawk d’arts appliqués et de technologie (qui occupe également une île dans Second Life) affirme que cet environnement offre d’importantes possibilités aux étudiants handicapés, mais mentionne également certains inconvénients, comme la forte présence de pornographie.

Heureusement, la plupart des écoles canadiennes ayant recours à Second Life sont situées loin des « mauvais quartiers ». L’île du Collège Mohawk est entourée d’autres écoles et de bibliothèques. L’Université McMaster, le Collège LaSalle et l’Université de la Saskatchewan occupent également des îles dans une partie sécuritaire de l’univers Second Life.

Les enseignants, le personnel des communications et les étudiants sont tous conscients de la courbe d’apprentissage inhérente à l’utilisation de Second Life. Selon Jason Toal, concepteur à l’Université Simon Fraser, un professeur qui souhaite enseigner avec Second Life devrait « passer au moins les premières leçons à montrer aux étudiants comment s’en servir ». Shawn McCann, cyberbibliothécaire à McMaster, abonde dans le même sens : « On ne peut pas commencer à l’utiliser immédiatement », dit-il, ajou-tant que même les utilisateurs chevronnés connaissent quelques difficultés.

Tyson Jewell (de son vrai nom), un participant virtuel au cours de journa-lisme donné par le professeur Washburn au Collège Loyalist, se dit frustré, car les étudiants qui ne peuvent s’offrir une carte vidéo perfectionnée ou une connexion Internet haute vitesse doivent quand même se déplacer pour suivre un cours dans l’univers Second Life sur un ordinateur du laboratoire d’informatique ou de la bibliothèque.

Ironiquement, Second Life se bat contre ce à quoi il doit sa grande popularité : les rapides progrès technologiques. L’Université McMaster met déjà à l’épreuve d’autres logiciels en 3D, dans le cadre de l’initiative internationale d’enseignement immersif.

Toutes les personnes interrogées pensent que les mondes virtuels comme Second Life ne remplaceront pas complètement les salles de classe traditionnelles. Elles croient cependant que les cyberclasses tridimensionnelles et les travaux en ligne se tailleront une place importante dans le paysage – bien réel – de l’enseignement au Canada.

Rédigé par
UA/AU
L'équipe d'Affaires universitaires.
COMMENTAIRES
Laisser un commentaire
University Affairs moderates all comments according to the following guidelines. If approved, comments generally appear within one business day. We may republish particularly insightful remarks in our print edition or elsewhere.

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Click to fill out a quick survey