Qu’il s’agisse de conférences annulées, de limites imposées aux démonstrations antiavortement et aux moqueries racistes ou sexistes, ou encore de l’évocation omniprésente de Jordan Peterson et de Lindsay Shepherd, il est difficile d’ignorer les médias qui montrent à quel point la liberté d’expression, fondement d’une société libre et ouverte, fait débat au sein de l’enseignement supérieur.
Ce débat n’est bien sûr pas nouveau. Il y a 15 ans, Affaires universitaires publiait un article-couverture sur les violences qui avaient agité l’Université Concordia et entraîné l’annulation d’une conférence de Benyamin Netanyahou, alors ancien premier ministre d’Israël, consacrée à la situation des Palestiniens. Il existe ainsi des sujets sensibles qui varient selon les générations.
Si les débats sur la liberté d’expression ne datent pas d’hier, le dernier en date semble indiquer des motivations différentes. Les médias sociaux ont accéléré et facilité les interactions, mais ils ont également polarisé et simplifié à l’excès les débats selon les observateurs, jouant sur la psychologie des internautes pour générer des clics et des affrontements au lieu d’arguments solides à des problèmes complexes. Résultat : il arrive que de simples divergences de points de vue prennent de l’ampleur, fassent la une et génèrent en quelques heures des pétitions colossales.
« Il est plus facile de dénoncer que de débattre », estime Peter MacKinnon, juriste et ancien recteur de l’Université de la Saskatchewan. Dans son récent ouvrage intitulé University Commons Divided: Exploring Debate and Dissent on Campus, il se dit inquiet des menaces qui planent sur la mission première des universités : rechercher la vérité en misant sur le savoir, l’apprentissage et la découverte.
Les aspirations et les attentes des universités ont également évolué. Elles sont devenues des organisations vastes et complexes, au service de multiples intérêts ainsi que d’une population étudiante bien plus diversifiée que par le passé. Mark Mercer, professeur de philosophie à l’Université Saint Mary’s, admet que jongler avec des objectifs concurrents n’est pas nouveau. Il précise cependant que les universités d’aujourd’hui s’attachent moins à générer de nouveaux savoirs fondés sur l’esprit critique et les données probantes qu’à répondre à certains objectifs sociétaux, comme former la prochaine génération de chefs de file du milieu des affaires, politique et culturel, et leur inculquer des valeurs communautaires, à l’instar de leurs fondateurs religieux du XIXe siècle.
« Nos universités publiques commencent à bien des égards à ressembler aux universités confessionnelles investies d’une mission idéologique, la différence étant qu’elles s’emploient à former non pas de bons chrétiens, mais des personnes à l’attitude socialement acceptable en matière de diversité, de protection de l’environnement, etc. », estime M. Mercer, président de la Société pour la liberté universitaire et la recherche. Comptant 220 membres (en majorité des chercheurs canadiens), cet organisme de promotion d’intérêts se concentre sur la question connexe, mais distincte, de la liberté universitaire en matière d’enseignement, d’études et de recherche.
La plupart des universités tentent d’accueillir un plus large éventail d’étudiants, y compris des étudiants étrangers, autochtones et de première génération. Cette tendance engendre une diversification des points de vue et des expériences dans le milieu universitaire, comme les universités le souhaitent, mais elle entraîne également de nouveaux défis, remettant en cause le statu quo et obligeant les universités, pour répondre aux attentes, à veiller à ce que ces nouveaux groupes d’étudiants se sentent aussi à leur place que les autres.
« C’est une question de droits de la personne », affirme Rizza Umali, directrice générale des relations externes de l’association des étudiants aux cycles supérieurs de l’Université Memorial et représentante des étudiants racialisés pour la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants de Terre-Neuve-et-Labrador. L’automne dernier, les murs de l’Université Memorial ont été recouverts d’affiches dénonçant l’immigration et la
« domination de l’Occident par l’islam ». Étudiante en médecine d’origine philippino-chinoise, venue de Dubai, Mme Umali est la première de sa famille à poursuivre des études supérieures. Elle estime que les universités doivent veiller à ce que les étudiants « qui ont déjà dû surmonter beaucoup d’obstacles ne serait-ce que pour être admis » ne soient pas exposés à des discours haineux qui remettent en cause leur humanité. En plus de retirer sans tarder les affiches, l’Université Memorial a adopté au printemps dernier des directives exigeant la conformité des affiches à ses politiques anti-harcèlement et de respect en milieu de travail.
Alors que certains estiment que le débat sur la liberté d’expression a été récupéré par les militants de droite qui l’exploitent pour propager leurs messages discriminatoires et haineux, d’autres croient que c’est plutôt la gauche qui réclame des droits pour ses propres idées, tout en en refusant pour les idées qu’elle juge immorales. D’autres encore blâment les deux clans.
Il existe des limites juridiques à la liberté d’expression, fondées sur l’interdiction de la diffamation, de certaines formes de propos haineux et de tout ce qui contrevient au Code criminel. Les juristes et les spécialistes de la liberté d’expression jugent toutefois ces limites insuffisantes, car elles ne visent que des aspects très précis. Quant à la Charte canadienne des droits et libertés, les décisions des tribunaux concernant son application aux universités varient beaucoup.
Si les universités sont tenues de prévenir les véritables cas de discrimination et de harcèlement, « bien des choses ne sont pas considérées par la loi comme du harcèlement et de la discrimination, mais simplement comme des propos extrêmement offensants », explique James Turk, directeur du Centre pour la liberté d’expression de l’Université Ryerson. Selon lui, il est légitime de lutter contre le racisme et les autres formes de discrimination, mais il est plus efficace de le faire en argumentant qu’en se taisant.
Étudiante au doctorat à l’Université Carleton, Abigail Curlew connaît bien ce discours, mais en tant que femme transgenre, elle déplore le fait qu’il porte sur les vertus d’une théorie au lieu de tenir compte de la réalité des étudiants. « Vous ne devriez pas avoir à débattre du fait que vous existez ou non, que vous méritez ou non des droits en tant qu’être humain, explique l’étudiante en sociologie dont les travaux de recherche portent sur la surveillance. Dans la mesure où on attend constamment de vous que vous représentiez le groupe auquel vous appartenez, il devient épuisant de prendre part à ce type de débat. Ça fait toutefois partie du quotidien des personnes touchées par les inégalités. »
Selon Gregory Brophy, professeur adjoint d’anglais à l’Université Bishop’s, les défenseurs d’une liberté expression absolue manquent de réalisme en présumant qu’elle permettra à chacun d’être entendu. Quand l’Université Bishop’s a choisi Marie Henein pour s’exprimer dans le cadre d’une prestigieuse série de conférences en février 2017, M. Brophy et d’autres se sont demandé pourquoi l’Université offrait une tribune à une avocate connue pour avoir défendu avec succès l’animateur Jian Ghomeshi accusé d’agressions sexuelles.
À l’époque, l’Université Bishop’s élaborait une politique destinée à encourager le signalement des cas d’agression sexuelle et de harcèlement ainsi qu’à améliorer la prévention. Membre du groupe de travail de l’établissement sur la violence sexuelle, M. Brophy s’était alors dit qu’il aurait été plus judicieux de choisir une conférencière travaillant à transformer le système judiciaire afin de mieux servir les victimes d’agression sexuelle. L’Université Bishop’s a toutefois estimé que la présence de Mme Henein permettrait aux participants de poser des questions et de tirer les leçons, et a donc maintenu sa conférence.
La liberté d’expression est un « principe essentiel », selon M. Brophy, qui se dit toutefois « très intéressé par les faits qui conduisent les gens à s’exprimer. Je ne crois pas que le droit de s’exprimer aille de soi, et qu’il suffit de ne pas lui faire obstacle pour en faire une réalité. À mes yeux, la liberté d’expression en ce qui concerne les agressions sexuelles est d’une importance capitale. […] Qui est libre de s’exprimer? Qui est réduit au silence? »
La voie à suivre ne fait pas l’unanimité. Il existe des désaccords fondamentaux en ce qui a trait à la liberté d’expression. Faut-il en faire un principe qui a préséance sur tous les autres? À quel point les universités doivent-elles la défendre? Qui doit payer pour assurer la sécurité lors de conférences controversées? Faut-il imposer des pénalités, et lesquelles, aux personnes qui briment le droit d’autrui à s’exprimer ou à écouter librement?
Autre débat : les universités doivent-elles ou non interdire les expressions autorisées à seulement quelques pas de leurs campus? Certains soutiennent fermement que les universités ne sont pas des places publiques où quiconque peut s’exprimer sur ce qu’il veut du haut d’une tribune. Dans un article paru en janvier dans le Toronto Star, Sheldon Levy, ancien recteur de l’Université Ryerson, a qualifié de « peu judicieuse » l’idée de restreindre la liberté d’expression sur les campus, affirmant que c’est « la rigueur des débats ou des discussions » qui devrait distinguer l’université de tout autre lieu social. Pour toute idée, le vrai test tient à sa capacité à résister à un large éventail de critiques reposant sur une grande diversité de points de vue et formulées dans un environnement où règne la liberté d’expression. »
Les experts reconnaissent que les normes et les limites en matière d’expression peuvent varier en fonction du lieu et du contexte, chose que les critiques externes ne comprennent pas toujours. Le degré du caractère public d’un lieu et l’ampleur du choix dont disposent les gens de le fréquenter ou pas sont d’une importance déterminante. « En classe, les règles, les normes et les attentes sont totalement différentes de ce qu’elles sont ailleurs sur le campus », explique Richard Moon, professeur de droit à l’Université de Windsor, qui a conseillé diverses universités en matière de liberté d’expression. « Un sujet en particulier doit être abordé. Les échanges entre les enseignants et les étudiants, et les échanges entre étudiants, doivent être empreints de respect et de civisme. »
M. Moon ajoute qu’une résidence étudiante peut proscrire les propos sectaires à l’endroit de ses résidents, car il s’agit de leur domicile privé. Dans le cas des lieux ou des événements plus publics, comme les conférences, les normes sont moins strictes, mais M. Moon estime que les universités ont là encore un rôle à jouer en raison de leur mission. Ce rôle consiste à favoriser une culture fondée sur le respect mutuel et qui ne stigmatise pas les personnes ou les groupes en fonction de leur identité.
MM. Moon et MacKinnon soulignent que même si l’ensemble d’un campus n’est pas un « lieu sûr » exempt d’idées potentiellement dérangeantes, il peut abriter des espaces, comme des centres confessionnels ou culturels ou encore des bureaux d’associations, où les étudiants aux points de vue ou au parcours semblables peuvent se réunir et échanger ouvertement leurs idées et leurs expériences. M. MacKinnon précise dans son ouvrage que les problèmes surviennent lorsqu’on s’attend à ce que ce qui se passe dans ces lieux « plus privés » soit appliqué à l’ensemble d’un campus. L’ancien professeur de droit écrit que, à l’échelle d’un campus, les attentes qui vont au-delà de l’intégrité physique, du civisme et du respect mutuel sont « incompatibles » avec la liberté d’expression et constituent « une menace à la vitalité citoyenne ». Selon lui, « il est indigne d’établissements engagés dans la quête de la vérité » de considérer la liberté d’expression comme une simple question.
Les universités qui se penchent sur la liberté d’expression semblent partager un consensus selon lequel il est important d’en discuter, d’adopter une démarche proactive et de veiller à ce que tout énoncé sur la liberté d’expression précise clairement la position de l’établissement. Certaines universités des États-Unis se sont inspirées d’un énoncé élaboré à l’Université de Chicago en 2015, ou l’ont adopté sans modification.
Selon les « principes de Chicago », aucun débat ne peut être proscrit parce que les idées exprimées sont jugées « offensantes, déplacées, immorales ou erronées ». Les membres du milieu universitaire doivent être libres de se forger une opinion « en contestant ouvertement et vigoureusement les idées auxquelles ils s’opposent », et non en interdisant leur expression. Seules sont proscrites les idées qui contreviennent à la loi, sont diffamatoires, « constituent véritablement une menace ou du harcèlement », portent atteinte à la vie privée ou « sont pour d’autres motifs incompatibles avec le fonctionnement de l’université ».
Aucune université canadienne n’a adopté les principes de Chicago, même si certaines ont essayé. Comme toute chose, ces principes font l’objet de critiques, liées notamment au fait qu’ils ont été élaborés en fonction des lois américaines, et non canadiennes. Dérogeant aux principes de Chicago, un énoncé approuvé à la fin du mois de mai par le sénat de l’Université Wilfrid Laurier précise que l’établissement est déterminé à « favoriser l’excellence intellectuelle fondée sur la diversité des points de vue dans un milieu d’apprentissage
ouvert ». Cet énoncé intègre la notion de « liberté inclusive », qu’il définit comme étant la « solide protection de la liberté expression » et le « fait de permettre à tous les membres du milieu universitaire – y compris ceux susceptibles d’être marginalisés, réduits au silence ou privés de certaines possibilités – de s’exprimer, de s’interroger et d’apprendre en toute
liberté ».
L’énoncé de l’Université Wilfrid Laurier a été élaboré à la suite du scandale causé par le traitement réservé à l’assistante à l’enseignement en communication Lindsay Shepherd qui a éclaté à la fin de 2017. Mme Shepherd avait été réprimandée par son superviseur et par le chef de son programme d’études après avoir diffusé pendant son cours une vidéo montrant Jordan Peterson, un professeur de psychologie controversé à l’Université de Toronto, discuter de son opposition aux pronoms neutres. L’Université Wilfrid Laurier a par la suite présenté ses excuses à Mme Shepherd, ce qui n’a pas empêché cette dernière et M. Peterson d’engager des poursuites judiciaires distinctes à son encontre.
L’Université Wilfrid Laurier cherche des moyens de mettre en pratique son énoncé, ce que bon nombre d’établissements échouent à faire, selon Michael Kennedy. M. Kennedy est le coauteur du Campus Freedom Index, un projet du Centre de justice pour les libertés constitutionnelles situé à Calgary. Cet organisme de parrainage juridique a entre autres dirigé des contestations judiciaires au nom de groupes de lutte contre l’avortement et de défense des droits des hommes, dont les membres s’étaient vu fermer la porte d’associations étudiantes. Le Campus Freedom Index évalue chaque année la défense de la liberté d’expression par les universités canadiennes. En 2017, il n’a attribué un « A » qu’à cinq universités canadiennes sur 60. Il est courant d’observer un écart entre les politiques des universités et leur mise en oeuvre, explique M. Kennedy : « C’est bien d’adopter un énoncé musclé sur la liberté d’expression, mais encore faut-il préciser clairement qu’aucune autre politique ne peut avoir préséance. »
Liberté d’expression, ou sinon…
Le premier ministre de l’Ontario, Doug Ford, a fait savoir aux universités et aux collèges de la province qu’ils devront adopter des politiques relatives à la liberté d’expression, sous peine de voir leur financement réduit. Un communiqué émanant de son cabinet, publié le 30 août, précise que les établissements ont quatre mois, jusqu’au 1er janvier 2019, pour se conformer à cette obligation.
Le communiqué stipule que les universités et les collèges doivent élaborer et mettre en oeuvre une politique en matière de liberté d’expression « répondant à une norme minimale du gouvernement ». Cette politique devra entre autres stipuler que « bien que les membres de l’université ou du collège soient libres de critiquer et de contester les opinions exprimées sur le campus, ils ne doivent pas entraver ou empêcher la liberté d’expression d’autrui ». La politique en question devra en outre s’appliquer aux professeurs, aux étudiants, aux membres du personnel et aux « invités ».
Pour s’assurer qu’ils respectent cette obligation, les universités et les collèges devront chaque année faire part de leurs progrès au Conseil ontarien de la qualité de l’enseignement supérieur (COQES), dès septembre 2019. Le COQES est un organisme de promotion d’intérêts indépendant financé par le ministère ontarien de la Formation, des Collèges et des Universités. Les établissements d’enseignement supérieur qui ne se conformeront pas à leurs obligations concernant la liberté d’expression « pourront faire l’objet d’une réduction du financement octroyé au titre des subventions de fonctionnement ». Pour leur part, les étudiants qui contreviendront à la politique de l’établissement feront l’objet des sanctions disciplinaires prévues par celui-ci.
Dans un commentaire formulé en tant que président du Conseil des universités de l’Ontario, le principal de l’Université Queen’s, Daniel Woolf, a indiqué que « tout cadre doit assurer un équilibre entre le droit à la libre expression et le devoir des universités consistant à garantir le civisme ainsi que l’intégrité physique et la sécurité des professeurs, des étudiants et des membres du personnel ». Pour sa part, Gyllian Phillips, présidente de l’Union des associations des professeurs des universités de l’Ontario et professeure agrégée d’anglais à l’Université Nipissing, a précisé que son organisationne croit pas que ce type d’intervention soit nécessaire et qu’elle risque au contraire de nuire à la liberté d’expression en dissuadant certains membres du milieu universitaire de s’exprimer par crainte de faire l’objet de sanctions disciplinaires.
La liberté d’expression et l’inclusion ne sont pas forcément incompatibles, précise Patrick Deane, le recteur de l’Université McMaster, dont l’établissement s’est lui aussi doté de lignes directrices et de stratégies en matière de liberté d’expression. « Ces deux notions ne sont que partiellement incompatibles, dit-il. Elles peuvent l’être dans le cadre des échanges politiques quotidiens sur les campus, mais je ne vois pas pourquoi une université ne pourrait pas à la fois protéger la liberté d’expression et favoriser la diversité des échanges. »
Une culture conciliant l’une et l’autre peut subtilement être mise en place, affirme Arig al Shaibah, depuis peu vice-rectrice adjointe à l’équité et à l’inclusion de l’Université McMaster. Il faut pour cela offrir aux étudiants marginalisés un soutien et un mentorat ciblés, et leur garantir égalité et respect en tant que membres du milieu universitaire. Il faut aussi convier des étudiants aux parcours divers à discuter de manière informelle pour apprendre à se connaître.
À l’Université Bishop’s, par exemple, M. Brophy et d’autres ont organisé avant la conférence de Mme Henein une table ronde dont les participants ont discuté de questions que l’avocate n’aborderait sans doute pas. M. Brophy précise que c’était une activité « complémentaire » plutôt qu’une protestation, ajoutant qu’elle a donné lieu à une « discussion animée » parmi une quarantaine de personnes et conduit à d’autres activités.
Étant donné l’importance de maintenir la discussion sur la liberté d’expression, les universités sont étroitement surveillées par des acteurs internes et externes curieux de savoir comment elles passeront de la parole aux actes. Le chef du Parti conservateur fédéral, Andrew Scheer, a proposé que les universités soient privées de financement fédéral si elles échouent à protéger la liberté d’expression sur leur campus. Pour sa part, le nouveau premier ministre progressiste conservateur de l’Ontario, Doug Ford, a promis pendant sa campagne électorale de contraindre les universités à élaborer des politiques relatives à la liberté d’expression, sous peine de voir leur financement réduit.
L’organisation de M. Kennedy espère qu’un dossier aboutira devant la Cour suprême du Canada, afin que celle-ci précise dans quelle mesure la Charte des droits et libertés s’applique à la liberté d’expression sur les campus. D’ici là, l’organisation lancera une trousse d’outils destinée à aider les bailleurs de fonds des universités à les interroger sur la façon dont elles soutiennent la liberté d’expression.
Universités Canada a elle aussi mis à la disposition de ses membres des ressources en matière de liberté d’expression, précise Philip Landon, vice-président, Gouvernance et programmes. Elle a également tenu de nombreux ateliers sur la question et convié divers conférenciers, comme l’ancien chancelier de l’Université de Californie à Berkeley, Nicholas Dirks, qui a pris la parole lors des réunions des membres de l’association tenues en avril à Vancouver.
Compte tenu des contestations de la liberté d’expression émanant aussi bien de l’intérieur que de l’extérieur des universités, ces dernières doivent réagir et prendre les devants, affirme M. MacKinnon. Selon lui, les universités peuvent le faire et, dans bien des cas, le font déjà, mais elles doivent toutes être conscientes de leur responsabilité en la matière : « Il ne s’agit pas d’une question qui doit être régie par des codes, des règlements et des lois, comme cela commence à être le cas aux États-Unis, dit-il. Les universités doivent veiller à encadrer l’échange d’idées et le droit de chacun à s’exprimer en appelant au civisme plutôt qu’en ayant recours à des règlements. Cela relève de la responsabilité des acteurs universitaires. »