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Responsabilités potentielles

4 mesures pour lutter contre les inégalités de genre et la discrimination

Les étudiant.e.s aux cycles supérieurs, les postdoctorant.e.s et leurs allié.e.s peuvent agir en découvrant leurs droits, les défendant, s’exprimant et bâtissant des liens.

par CLAIRE KAMALIDDIN | 26 JUILLET 23

Statistique Canada rapportait en 2020 l’augmentation continue de la proportion des femmes qui obtiennent un poste de professeure à temps plein dans les universités canadiennes, mais le « tuyau percé » n’est pas colmaté pour autant. Si elles représentent la majorité des diplômé.e.s universitaires, leur nombre chute entre le baccalauréat, les études supérieures, le niveau postdoctoral et l’accession aux postes de professeure. Même au sein de la direction des universités, l’inégalité des genres persiste. Les organismes subventionnaires ont beau mettre de l’avant l’égalité des genres dans leurs processus de demande et leurs modèles d’études, les retombées ne se répercutent pas nécessairement sur les étudiantes et postdoctorantes, faute de mesures concrètes  pour obliger les directions à appliquer ces politiques à plus petite échelle au niveau des équipes de recherche. En outre, de manière similaire à la « taxe minoritaire » observée dans les initiatives d’équité, de diversité et d’inclusion (EDI), les femmes se retrouvent souvent chargées du travail de conception, d’élaboration et de mise en œuvre des stratégies ainsi que des analyses comparatives entre les sexes, ce qui accroît le fardeau invisible qu’elles portent en milieu professionnel.

Le cas particulier des femmes enceintes

La « pénalité de grossesse » touche les femmes du milieu universitaire au-delà des simples préjugés sexistes. Parfois, tomber enceinte est considéré comme « risqué ». Il peut arriver qu’une pression soit exercée sur les femmes enceintes,  par exemple pour les encourager à voyager à l’étranger, même si cela n’est pas recommandé pendant leur grossesse. Elles peuvent se voir contraintes d’effectuer des heures supplémentaires afin de « faire autant de travail que possible » avant de prendre leur congé parental. Elles peuvent aussi faire l’objet de commentaires manipulateurs ou se faire rabaisser par rapport à l’effet de leur grossesse et de leur congé parental sur l’avancée des projets. Elles peuvent également subir d’autres formes de discrimination, telles que de  se faire assigner des tâches restreintes, se voir retirer la reconnaissance liée à des travaux de recherche ou la responsabilité d’un projet, ou voir le sérieux de leur implication être mis en doute.

Au postdoctorat, elles doivent aussi assumer les coûts cachés nécessaires pour « se tenir à jour », comme travailler pendant leur congé (rédiger des demandes de subvention et des articles, conseiller des membres de leur laboratoire) et continuer de payer de leur poche les frais de cotisation aux associations scientifiques si elles veulent conserver leur qualité de membre et continuer à bénéficier des bourses, subventions et rabais une fois de retour de congé. En outre, les congés parentaux sont fortement tributaires de la catégorie du personnel (qu’il s’agisse d’étudiantes, d’employées ou de postdoctorantes), et ces disparités persistent même au sein de ces groupes (par exemple, pour les postdoctorantes, la disponibilité des avantages sociaux dépend de la source de financement). Ces inégalités ont des conséquences néfastes, conduisant par exemple les femmes à hésiter à poser leur candidature pour des bourses de recherche qui ne proposent pas d’avantages sociaux ou de congés parentaux.

Sensibilisation et initiatives

Dans un milieu d’études et de travail hautement contingenté, où les parcours professionnels de chacun.e dépendent de lettres de recommandation et du bouche-à-oreille, on peut facilement oublier de défendre l’égalité des genres. Néanmoins, grâce à des allié.e.s engagé.e.s sur le terrain et à certaines initiatives, il est possible d’accomplir beaucoup. Si vous êtes aux cycles supérieurs ou au postdoctorat, voici différentes mesures que vous pouvez prendre pour faire progresser la parité dans votre domaine et votre établissement. Comme il s’agit d’enjeux intersectionnels, les recommandations s’appliquent à tout le monde : allié.e.s, femmes et personnes de diverses identités de genre.

  1. Le savoir confère du pouvoir. Lisez les lois et règlements canadiens sur le sujet (par exemple, la Charte canadienne des droits et libertés, articles 15 et 18). La Charte interdit la discrimination basée sur l’orientation sexuelle, l’état civil ou la nationalité. Familiarisez-vous avec la politique sur l’égalité des genres de votre établissement, s’il en a une, et avec celle de vos subventionnaires. Informez-vous sur les politiques de dénonciation protégée et contre le harcèlement lié au genre et la discrimination de votre établissement.
  2. Faites-vous entendre. Votre association étudiante ou votre syndicat ont un rôle important à jouer pour que vous vous fassiez entendre. Des personnes représentant ces associations font souvent partie de comités importants et participent en votre nom aux discussions sur les politiques avec la direction de l’établissement. Vous pouvez aussi vous joindre au conseil d’administration de votre institut de recherche à titre d’étudiant.e ou de postdoctorant.e pour y aborder les enjeux d’égalité des genres. De plus, vous pouvez participer aux associations professionnelles, particulièrement en vous impliquant dans les groupes de travail sur l’égalité des genres ou le statut de la femme dans le secteur, par exemple.
  3. Brisez le silence. Si vous êtes témoin ou victime de discrimination, de violence ou de harcèlement liés au genre, communiquez avec les canaux compétents de votre établissement pour dénoncer les mauvais comportements et, s’il y a lieu, soutenir la victime. Il peut s’agir d’un centre de soutien pour les femmes, du bureau de la dénonciation protégée ou de votre syndicat. Si vous êtes un.e allié.e, n’oubliez pas que vous êtes en position de pouvoir et que votre soutien peut tout changer pour les personnes qui en ont besoin.
  4. Cultivez les liens. Pour susciter des changements sociaux dans le monde universitaire, cela nécessite l’engagement de tout un réseau de personnes et de ressources. Trouvez des allié.e.s. Si vous êtes un.e allié.e, joignez-vous à des groupes de défense des droits des femmes ou à des initiatives pour l’égalité des genres. Dans le domaine des STIM, divers exemples de groupes ont émergé pour soutenir les femmes. Parmi eux, on peut citer le réseau Immigrant and International Women in Science qui apporte un soutien aux femmes immigrantes dans le milieu au Canada ainsi que le Women in Academia Support Network ou encore des réseaux spécialisés tels que Women In Malaria ou Females in Mass Spectrometry. Ces associations représentent quelques exemples parmi une multitude de groupes de soutien qui existent. De plus, vous avez également la possibilité de créer votre propre réseau local afin de faciliter les discussions, organiser des formations ou offrir un soutien mutuel entre pairs.

L’égalité des genres est un droit garanti au Canada et est mis de l’avant dans les politiques des organismes subventionnaires. Que vous étudiez ou que vous soyez au postdoctorat dans un établissement canadien, je vous encourage à découvrir vos droits, à les défendre, à vous exprimer et à bâtir des liens. C’est ce qui conduira au vrai changement.

À PROPOS CLAIRE KAMALIDDIN
Claire Kamaliddin
Claire Kamaliddin est postdoctorante associée à l’Université de Calgary. Ses recherches portent sur les maladies infectieuses de la maternité et de l’enfance. Elle codirige aussi le réseau Immigrant and International Women in Science de Calgary. 
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