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Une voie d’immigration rouverte pour les étudiant.e.s provenant de l’étranger

Les étudiant.e.s souhaitant immigrer au Québec pourront recourir plus facilement au Programme de l’expérience québécoise, qui accélère l’obtention de la résidence permanente.

par JEAN-FRANÇOIS VENNE | 02 FEV 24

Le gouvernement du Québec réservait une belle surprise aux étudiant.e.s provenant de l’étranger dans sa planification de l’immigration pour 2024 et 2025, dévoilée en novembre dernier. Il a en effet rouvert largement l’accès au volet diplômés du Québec du Programme de l’expérience québécoise (PEQ), du moins pour les étudiant.e.s inscrit.e.s à des programmes francophones.

Le PEQ représente une sorte de voie rapide d’immigration au Québec. Il permet d’obtenir le Certificat de sélection du Québec en quelques semaines, plutôt que d’attendre plusieurs mois. Ce certificat est obligatoire pour recevoir un statut de résident permanent.

Une série de revirements

En 2019, le gouvernement du Québec avait suspendu le volet diplômés du PEQ. En novembre de la même année, il avait annoncé son intention d’en réserver l’accès aux étudiant.e.s inscrit.e.s dans des domaines de formation touchés par une pénurie de main-d’œuvre.

Devant le tollé généralisé que sa décision avait suscité, le gouvernement était revenu aux anciennes règles du programme, sans toutefois renoncer à le réformer. En mai 2020, il ajoutait certaines conditions d’admissibilité : les étudiant.e.s devraient démontrer une expérience de travail à temps plein d’au moins un an au Québec. Le délai de traitement passait quant à lui de 20 jours à six mois. Ces changements avaient provoqué une nouvelle levée de boucliers.

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« La réforme avait entraîné une chute radicale des demandes au PEQ malgré une forte croissance du nombre des étudiants provenant de l’étranger, ce qui nous inquiétait », raconte Catherine Bibeau-Lorrain, porte-parole de l’Union étudiante du Québec, qui exigeait l’annulation de ces modifications.

De son côté, le recteur de l’Université du Québec à Trois-Rivières, Christian Blanchette, constatait qu’après la réforme du PEQ, des diplômé.e.s de son établissement songeaient à s’installer ailleurs au Canada, pour obtenir leur résidence permanente plus rapidement. « Nous risquions de perdre des gens qualifiés et déjà bien intégrés au Québec, alors que nous vivons une grosse pénurie de main-d’œuvre », souligne-t-il.

Tous ces soubresauts ont amené le gouvernement à organiser une consultation parlementaire sur une nouvelle réforme du PEQ. Le gouvernement a dévoilé les plus récentes règles d’admission en novembre 2023. « Pendant les consultations et au cours d’une tournée que j’ai effectuée en région, beaucoup d’intervenants nous ont demandé de rendre le PEQ plus accessible, ce que nous avons fait », explique Christine Fréchette, ministre québécoise de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration.

Le gouvernement a délaissé l’obligation d’avoir travaillé un an au Québec ou encore d’y occuper un emploi au moment de la demande. Il a aussi élargi l’accès à tous les domaines d’études, pas seulement ceux jugés prioritaires.

Une comptabilité séparée

De plus, les personnes sélectionnées dans ce volet du PEQ seront acceptées au fur et à mesure que leurs demandes de résidence permanente seront présentées au fédéral. Les quelque 6 500 demandes attendues par le gouvernement pour 2024 ne compteront donc pas dans la cible annuelle de 50 000 immigrant.e.s.

« Ces diplômés représentent une immigration idéale, car il n’y a pas d’enjeux de reconnaissance de diplôme; ils ont déjà vécu au Québec, ce qui améliore les chances de rétention; ils sont prêts à intégrer le marché du travail et plusieurs ont étudié en région et pourraient y demeurer », souligne la ministre.

L’admission en continu solutionne aussi le problème qui avait incité le gouvernement du Québec à revoir le volet diplômés du PEQ en 2019. Celui-ci était tellement attrayant qu’il générait un déséquilibre par rapport aux candidat.e.s du programme des travailleurs et travailleuses qualifié.e.s.

Lorsque le plafond des immigrant.e.s était atteint pour une année, on y retrouvait trop d’étudiant.e.s passé.e.s par le PEQ et pas suffisamment de travailleurs et travailleuses qualifié.e.s. « En excluant les étudiants diplômés de la cible d’immigration annuelle, nous évitons de créer cette compétition entre les deux programmes », explique Mme Fréchette.

Protéger la vitalité du français

Le milieu universitaire québécois a très bien accueilli la dernière réforme du PEQ. « Nous nous sommes particulièrement réjouis que le gouvernement ait retiré l’obligation d’avoir travaillé un an au Québec et qu’il ne comptabilise plus ces diplômés dans ses cibles d’immigration », note le recteur de l’UQTR.

Il reste cependant un élément qui fait grincer des dents. À partir de novembre 2024, seul.e.s les étudiant.e.s qui ont étudié en français à temps plein pendant au moins trois ans au Québec ou ailleurs ou suivi un programme d’études au Québec dont 75 % des cours ou crédits ont été réalisés en français pourront soumettre leur candidature.

C’est un changement majeur par rapport à l’ancienne règle, qui exigeait que les candidat.e.s prouvent leur maîtrise du français (par exemple en présentant le résultat d’un test admissible). « Nous avons été surpris que les étudiants qui ont étudié en anglais soient exclus du PEQ, sans avoir la chance de démontrer leur niveau de maîtrise du français », reconnaît Fabrice Labeau, premier vice-provost de l’Université McGill.

Il rejette l’argument du gouvernement québécois selon lequel les étudiant.e.s provenant de l’étranger ou venant d’autres provinces canadiennes inscrit.e.s à l’Université McGill et à l’Université Concordia ont un impact négatif sur la place du français à Montréal.

« Notre rôle consiste à attirer les meilleurs étudiants et à en convaincre certains de demeurer ici, ainsi qu’à les aider à s’intégrer et à apprendre le français, mais enrayer le déclin du français à Montréal n’est pas de notre ressort », affirme-t-il. Le gouvernement québécois s’attend au contraire à ce que les établissements anglophones contribuent davantage à la francisation de leurs étudiant.e.s, en particulier ceux et celles qui souhaitent rester au Québec et y travailler.

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L’Association québécoise des avocats et avocates en droit de l’immigration (AQAADI) a elle aussi tiqué en voyant ces changements. « Le gouvernement exclut des étudiants qui maîtrisent peut-être le français, sous prétexte qu’ils n’ont pas étudié dans cette langue, souligne Laurence Trempe, présidente de l’AQAADI. Cela exclut par exemple des étudiants provenant de l’étranger qui ont le français comme deuxième ou troisième langue, mais ont étudié en anglais. » Elle préférerait une formule dans laquelle l’étudiant.e peut démontrer ses compétences en français écrit et oral.

Mme Trempe espère surtout que le volet diplômés du PEQ se stabilisera, après avoir subi de multiples changements depuis quatre ans. « Les gens qui songent à étudier puis à s’établir ici ont besoin de visibilité à long terme », avance-t-elle.

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