Le soutien dont jouissent les parents canadiens aux cycles supérieurs varie selon l’université et l’organisme subventionnaire. Bien que certains établissements leur offrent un appui considérable, ces parents sont nombreux à devoir surmonter des difficultés incomparables pour poursuivre leurs études. L’évolution du profil de l’étudiant canadien aux cycles supérieurs exige que nous nous penchions plus sérieusement sur le rôle de la famille dans le tableau.
L’enjeu lié à l’atteinte de l’équilibre entre les responsabilités familiales et professionnelles n’est certainement pas nouveau, mais il a reçu une attention particulière dans le contexte universitaire. La question des difficultés que doivent affronter les jeunes professeurs, particulièrement les femmes, pour répondre aux exigences de la vie universitaire tout en assumant leurs responsabilités familiales, suscite la discussion. Cette discussion inclut même les chercheurs postdoctoraux, particulièrement à la lumière du récent débat portant sur leur statut (ayant pour but de déterminer s’ils sont des employés de l’université ou non).
Les étudiants aux cycles supérieurs, bien qu’ils ne soient pas des employés de l’université, sont indispensables au milieu de la recherche et doivent surmonter les mêmes obstacles que les professeurs et les chercheurs postdoctoraux, car ils travaillent à établir leur réputation dans le milieu universitaire. Il faut aussi souligner que l’âge moyen des étudiants aux cycles supérieurs, qui se situe environ entre 27 et 39 ans (pour les étudiants récemment admis à l’Université de l’Alberta et à l’Université de la Colombie-Britannique), concorde avec l’âge moyen des femmes canadiennes qui donnent naissance (qui ont en moyenne entre 28 et 30 ans).
Bien que certains aspects de la structure de soutien aux parents aux cycles supérieurs changent relativement peu d’une université canadienne à l’autre, de nombreuses caractéristiques varient. La plupart des écoles offrent un congé parental pouvant durer jusqu’à 12 mois pendant lequel les étudiants n’ont pas à effectuer de recherche ni à enseigner. Bon nombre d’écoles repoussent aussi les délais d’obtention du diplôme en fonction de la durée du congé parental.
Cependant, le soutien financier diffère considérablement d’un établissement à un autre. Certains, comme l’Université de Waterloo et l’Université de l’Alberta, offrent des prestations allant de 55 à 95 pour cent des allocations ou des bourses d’études ordinaires de l’étudiant pendant le congé parental. L’Université Wilfrid Laurier offre un certain soutien financier, mais seulement aux étudiants au doctorat. La majorité des établissements, dont l’Université de Toronto, l’Université McGill et l’Université de Calgary, n’accordent pas de congé parental payé aux étudiants aux cycles supérieurs qu’elle soutient. L’Université de l’Alberta offre aussi un service de garde subventionné à ceux qui en démontrent le besoin.
Les étudiants qui reçoivent le soutien des trois organismes subventionnaires canadiens ont droit à des congés parentaux payés qui varient. Les titulaires d’une bourse des Instituts de recherche en santé du Canada peuvent réclamer six mois de congé payé, tandis que ceux qui reçoivent une bourse du Conseil de recherche en sciences naturelles et en génie du Canada ne bénéficient que de quatre mois de soutien. Les titulaires d’une bourse du Conseil de recherches en sciences humaines ne reçoivent quant à eux aucune prestation de congé parental. Les étudiants titulaires d’une bourse des trois organismes subventionnaires qui ont droit à des prestations d’assurance-emploi (qui sont habituellement beaucoup moins élevées que les prestations liées à leur bourse) ne reçoivent aucune prestation complémentaire pendant leur congé parental.
Il importe de noter que la plupart des étudiants aux cycles supérieurs ne sont pas admissibles aux prestations d’assurance-emploi pendant leur congé parental parce que leur bourse d’études n’est pas imposable et qu’ils n’ont pas à verser de cotisations d’assurance-emploi (et qu’ils ne sont pas autorisés à le faire non plus).
J’ai eu deux enfants pendant mes études (toujours en cours) à l’Université Dalhousie. À la naissance de mon premier enfant, mes allocations étaient versées par l’université, et je n’étais pas admissible à l’aide financière de l’université ni à l’assurance-emploi. Je n’ai pris que deux semaines de congé avant de retourner aux études, essentiellement parce que je ne pouvais pas me permettre de prolonger mon congé non payé. Pendant ma deuxième grossesse, j’étais titulaire d’une bourse d’études du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, donc j’ai pu profiter de quatre mois de congé payé. Ce soutien m’a beaucoup aidée : sans fardeau financier, j’ai pu me consacrer aux premiers mois de vie de mon fils et je suis retournée aux études avec un intérêt renouvelé.
Récemment, la discussion a mis en lumière un éventail de facteurs de motivation poussant les étudiants à accéder aux cycles supérieurs, le besoin de diversifier les expériences dans les programmes d’études supérieures et la question de la valorisation des carrières postdoctorales hors campus. Le choix de fonder une famille pendant les études supérieures constitue un autre aspect de cette discussion, car elle met en évidence l’écart entre les attentes élevées à l’égard de l’engagement en recherche et le désir de l’étudiant d’atteindre un équilibre, un fait avéré chez les femmes, dont la grossesse rappelle incontestablement qu’elles ont décidé de ne pas axer leur vie uniquement sur la recherche.
Le manque d’uniformité dans les formes de soutien qui sont offertes aux parents canadiens aux cycles supérieurs dénote un manque d’égard par rapport à l’importance de soutenir les parents dans leurs études. Le fait de fonder une famille ne devrait pas constituer un obstacle à la réussite en milieu universitaire, que l’on soit professeur, chercheur postdoctoral ou étudiant aux cycles supérieurs.
Janice Allen est candidate au doctorat au département des sciences de la Terre à l’Université Dalhousie.