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Communiquer davantage, mais pas à n’importe quel prix

par YVES LUSIGNAN | 01 DÉC 08

Si les chercheurs québécois estiment qu’ils en font déjà bien assez pour communiquer avec le public, les citoyens trouvent au contraire que ces derniers devraient être plus présents auprès des médias et en faire davantage pour mieux informer et transmettre leurs connaissances auprès de la population.

C’est ce qui ressort des résultats d’une première enquête du genre réalisée auprès des chercheurs, doublée d’un sondage auprès des citoyens, pour le compte de l’Association francophone pour le savoir (Acfas), en prévision de La grande rencontre science et société qui s’est déroulée à la mi-novembre à Montréal. Cette rencontre avait pour but, selon le président de l’Acfas Pierre Noreau, de « créer des liens, des autoroutes, une conscience des intérêts mutuels entre les citoyens et les chercheurs ».

L’enquête, réalisée au Québec en mai 2008 et à laquelle ont répondu 844 chercheurs francophones et anglophones, sur une possibilité de 6 165 (taux de réponse de 13,7 pour cent), indique que le tiers d’entre eux ont souvent accordé des entrevues dans les médias ou rédigé des textes pour des publics non spécialisés, alors que près de la moitié ont souvent participé à des activités de vulgarisation scientifique.

La plupart des chercheurs estiment que les journalistes présentent bien leurs travaux, ce qui va à l’encontre de l’idée reçue voulant que ces derniers déforment ou rapportent mal leurs propos. La majorité des chercheurs (85 pour cent) trouvent aussi tout à fait légitime que les citoyens aient un mot à dire dans les grands choix scientifiques et qu’ils prennent des moyens légitimes pour faire valoir leurs critiques.

Ces résultats font dire au professeur Yves Gingras, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en histoire et sociologie des sciences de l’Université du Québec à Montréal, que « les chercheurs ne vivent pas dans leur tour d’ivoire et participent au dialogue avec la société », même si « on ne peut pas dire qu’ils veulent en faire plus ».

En fait, les chercheurs sont prêts à en faire davantage s’il y a des incitatifs, puisque la communication dans les médias n’est pas selon eux très valorisés par les pairs, sans compter qu’ils disent avoir d’autres chats à fouetter, comme soumettre des demandes de subvention, enseigner et rédiger des articles savants lus par des spécialistes. Le principal incitatif à leurs yeux, c’est la reconnaissance lors de l’évaluation du dossier universitaire par les universités et les organismes subventionnaires. Les trois quarts des chercheurs estiment d’ailleurs que les activités de communication ne sont pas suffisamment prises en compte dans l’évaluation de leur carrière.

Puisque l’enquête recueille les perceptions des chercheurs, certaines réponses surprennent. Ainsi, la majorité se sentent tout à fait capables de présenter leurs travaux en termes simples, ce qui a soulevé un certain scepticisme chez des représentants de médias qui participaient à cette rencontre, dont la présidente-directrice générale de Télé-Québec, Michèle Fortin, qui a été surprise d’apprendre que 83 pour cent des chercheurs affirment disposer de l’expertise nécessaire pour réaliser des activités de communication et de vulgarisation des connaissances.

« Parler en public, cela s’apprend », résume M. Noreau de l’Acfas. On a même soulevé lors de La grande rencontre que les établissements d’enseignement ont une certaine obligation à former les chercheurs à l’art de communiquer.

L’enquête réalisée auprès de 1 002 citoyens en septembre 2008 révèle de son côté que les chercheurs ont la cote auprès de la population et que le capital de sympathie à leur endroit est élevé. Pas moins de 84 pour cent des Québécois disent leur faire confiance, comparativement à 59 pour cent pour les journalistes et à 20 pour cent pour les politiciens!

Les Québécois estiment, dans une proportion de 84 pour cent, que la science apporte plus de bien que de mal à la société. Même ceux qui se méfient des scientifiques disent faire confiance à la science dans une proportion de 62 pour cent.

En outre, plusieurs citoyens (68 pour cent) disent se sentir incompétents face à la complexité du discours scientifique, ce qui nous ramène à la question de la vulgarisation. Seulement 44 pour cent des citoyens pensent que les chercheurs prennent le temps de vulgariser leurs découvertes et de les transmettre au public.

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