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Les universités et les professeurs se mobilisent pour répondre à la crise des réfugiés afghans

Selon une avocate canado-afghane, l’aide d’experts du milieu universitaire de partout au pays est nécessaire pour faire face à l’urgence actuelle et à celles qui suivront.

par MATTHEW HALLIDAY | 08 OCT 21

Alors que la crise politique afghane prenait de l’ampleur cet été, Wendy Cukier, professeure d’études commerciales à l’Université Ryerson, avait une impression de déjà-vu.

Six ans plus tôt, elle avait participé au lancement d’une campagne visant à aider des gens cherchant à fuir une région du monde en crise. De concert avec des particuliers et des établissements, dont un certain nombre d’universités, Lifeline Syria a parrainé et soutenu de nombreux Syriens cherchant à fuir la guerre.

En août dernier, Mme Cukier a compris qu’il était à nouveau urgent d’agir. Avec un groupe de proches collaborateurs, dont la journaliste Sally Armstrong, la sénatrice Ratna Omidvar et Rachel Pulfer, directrice générale de l’organisme Journalists for Human Rights, elle a mis sur pied Lifeline Afghanistan en quelques jours seulement. L’initiative est basée à l’Institut de la diversité de Ryerson, où Mme Cukier est directrice des études.

Cette dernière estime que Lifeline Afghanistan est emblématique du rôle que peuvent jouer les universités dans la réponse du Canada aux urgences humanitaires. « Selon moi, les professeurs d’université sont incroyablement privilégiés et ont accès à toutes sortes de ressources, comme la permanence et la liberté de définir leurs travaux de recherches. Individuellement, ils peuvent apporter une immense contribution, et ce, sans parler de cette incroyable ressource que sont les étudiants qui sont souvent très passionnés par ces enjeux. »

Leur contribution sera nécessaire. Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés estime que plus d’un demi-million de personnes pourraient fuir l’Afghanistan d’ici la fin de 2021. Le Canada s’est engagé à en accueillir 40 000, mais il reste encore du travail à faire pour permettre leur arrivée en sol canadien. Le gouvernement compte beaucoup sur l’aide des universités et des citoyens canadiens.

Un sondage informel mené par Affaires universitaires auprès d’une vingtaine d’universités de partout au pays révèle que même si la plupart d’entre elles n’ont pas encore de plan d’action à l’échelle institutionnelle pour soutenir l’effort visant à répondre à cette crise, certains mouvements commencent à prendre sérieusement forme. L’Université de Toronto aide cinq journalistes afghans à obtenir une bourse de recherche en journalisme international à l’École de santé publique Dalla Lana. Elle soutient également plusieurs étudiants et leurs familles qui ont fui l’Afghanistan, dont les identités sont pour l’instant gardées confidentielles afin de protéger leurs proches restés sur place. L’Université Carleton accueille actuellement deux boursiers afghans et a débloqué des fonds pour en accueillir un autre.

Dans la plupart des cas, les principales initiatives en cours sont toutefois dirigées par des professeurs, souvent de concert avec des partenaires communautaires. Lifeline Afghanistan en est l’exemple parfait. L’initiative cherche des possibilités de parrainage, évalue les besoins et s’efforce de préparer les nouveaux arrivants au marché du travail.

À l’Université York, un groupe de travail informel composé de membres de la Faculté des sciences de la santé, du Centre d’études sur les réfugiés et de l’Institut Dahdaleh pour la recherche en santé mondiale a vu le jour. Comme Lifeline Afghanistan, il concentre ses efforts immédiats sur les besoins des réfugiés afghans à leur arrivée au Canada et, possiblement, au sein de la collectivité de York. Cela comprend notamment la possibilité de formation.

« Certains de nos membres ont de l’expérience dans l’enseignement en ligne auprès d’autres groupes de réfugiés », explique la présidente du groupe, Farah Ahmad, professeure agrégée à la Faculté des sciences de la santé. Ceux-ci élaborent des cours visant à offrir aux réfugiés une formation universitaire « sans frontières ».

Le groupe de Mme Ahmad espère également créer des bourses d’études et mettre en place d’autres moyens de soutenir financièrement les futurs étudiants afghans. Ils travaillent en outre à l’élaboration d’un programme pour les universitaires réfugiés en partenariat avec un organisme appelé Scholars at Risk (SAR).

La section canadienne de SAR collabore avec 25 établissements postsecondaires – dont ses membres les plus récents sont l’Université de Winnipeg et l’Université de Montréal – afin de permettre aux chercheurs afghans de poursuivre leur travail ici.

SAR Canada souhaite recruter d’autres établissements afin de renforcer sa capacité à répondre aux besoins immédiats et futurs, affirme Viviana Fernandez, présidente de l’organisme. Celle-ci est en également directrice adjointe du Centre de recherche et d’enseignement sur les droits de la personne de l’Université d’Ottawa, qui chapeaute le programme SAR de l’établissement et qui est chargé de cibler les facultés et les départements en mesure d’accueillir des chercheurs.

« Malheureusement, nous constatons dernièrement de nombreuses situations qui nécessitent un effort soutenu, déclare Mme Fernandez. Le temps perdu à constituer des groupes d’intervention pourrait être considérablement réduit si l’on disposait, par exemple, de comités permanents formés d’experts provenant de grandes universités. Ceux-ci pourraient aider à organiser une réponse rapide grâce à leur expertise en matière de droit des réfugiés, d’immigration et de politique. Ces spécialistes sont déjà présents sur les campus, et ils pourraient être très utiles pour élaborer des réponses rapides et mieux adaptées. »

L’une des membres fondatrices de Lifeline Afghanistan, Hila Taraky, a fui ce pays avec sa famille lorsqu’elle était enfant. C’était en 1998, sous le précédent régime taliban. Elle ne comprend que trop bien ce que peuvent vivre les gens restés sur place. Mme Taraky, aujourd’hui avocate, estime qu’il existe un certain nombre d’obstacles à la mise en place de mesures rapides, ce qui confirme la nécessité de faire appel aux experts en la matière présents dans les universités de tout le pays.

« Nous ne pouvons pas limiter notre champ d’action à ce qui se produit actuellement, conclut Mme Taraky, joignant sa voix à celle de Mme Fernandez. Nous devons faire preuve de créativité et élaborer de nouvelles approches pour répondre à la crise actuelle ainsi qu’à celles qui suivront. »

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