C’est par une étude lancée en 2016 que Marie Marquis, professeure au Département de nutrition de l’Université de Montréal, a découvert un phénomène dont elle ne soupçonnait pas l’ampleur : 11 pour cent des étudiants de l’Université de Montréal (U de M) et de ses écoles affiliées disaient parfois manquer de nourriture pour des raisons monétaires. « Nous voulions comprendre les motivations alimentaires des étudiants », explique celle qui cosigne l’article (en anglais) faisant état de cette recherche plus globale dans l’International Journal of Consumer Studies. La recherche, faite en collaboration avec les Services aux étudiants de l’U de M, visait à dégager des idées pour développer des services pour les étudiants.
Un livre pour mieux manger
Composée de la nutritionniste Stéphanie Côté, d’Amélie Loiselle, étudiante à la maîtrise en nutrition, et de deux étudiantes au baccalauréat, Marie-Pier Leroux et Marie-Pierre Léger, l’équipe dirigée par Mme Marquis a bénéficié du soutien du Fonds d’amélioration de la vie étudiante pour concevoir l’outil Viens manger!. Le livre comprend des recettes nutritives à réaliser avec un minimum d’ingrédients, abordables de surcroît, sans toutefois mettre l’accent sur ces deux éléments. « Nous voulions aider au développement des compétences culinaires de bases », souligne la professeure en faisant notamment référence au fait de cuisiner davantage, d’éviter le gaspillage, de mieux planifier les repas et de partager.
La première partie du livre gratuit et téléchargeable contient des trucs pour cuisiner à petit prix, de même qu’une liste de plusieurs ressources disponibles sur le campus qui passent parfois inaperçues. Les recettes occupent la deuxième partie du livre; plusieurs d’entre elles sont également présentées sous forme de courtes vidéos afin de mieux parler aux étudiants. Jérome Roy, diplômé de l’U de M, a fait l’habillage musical des capsules gratuitement.
Des besoins changeants
Ce livre arrive à un moment où le problème d’insécurité alimentaire sur les campus canadiens devient criant. « Le profil des étudiants change, il y a de plus en plus d’étudiants internationaux et de parents. Ça amène d’autres réalités », croit Mme Marquis. Le nombre d’étudiants invoquant des raisons monétaires pour expliquer le fait qu’ils manquent parfois de nourriture est encore plus préoccupant ailleurs au Canada. Une récente étude de l’Université Memorial constatait ainsi que 40 pour cent de ses étudiants souffraient d’insécurité alimentaire. « On ne peut plus se cacher. Pour un professeur, ça veut dire qu’au moins un étudiant dans ta classe ne pourra pas manger ce soir », constate Mme Marquis.
De son côté, la Banque alimentaire de l’Université de Montréal tente de donner du répit aux plus de 800 étudiants qui y font occasionnellement appel (de 150 à 190 personnes fréquentent la Banque chaque semaine). L’équipe de Viens manger! a d’ailleurs consulté les bénévoles de la Banque, entre autres pour connaître les habitudes alimentaires de ses bénéficiaires et imaginer des recettes à partir de certains ingrédients distribués.
La responsable de la Banque alimentaire, Éléa Gutierrez, voit le lancement de ce livre d’un bon œil. « Les étudiants manquent de temps et d’argent, et le livre permet d’avoir des recettes simples, rapides et bonnes pour la santé », résume-t-elle.
Un exemple d’une des recettes :