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Responsabilités potentielles

Prendre conscience de ses compétences transférables

La cartographie des réflexions : un exercice clé pour adopter une attitude positive.

par SUE HAMPTON | 16 AOÛT 18

Imaginez une grande salle de classe où se trouvent une vingtaine d’étudiants aux cycles supérieurs d’un éventail de disciplines : génie, promotion de la santé, étude de genre et autres. Le silence règne; on entendrait voler une mouche. Chaque étudiant fixe intensément la grande feuille vierge qui recouvre sa table, un ensemble de marqueurs de différentes couleurs à portée de main. Tantôt immobile, tantôt emporté dans un élan d’écriture ou de dessin effréné, chacun vaque à sa propre affaire. Au premier coup d’œil, le silence et l’intensité pourraient porter à croire qu’un examen est en cours. Ce n’est pas le cas. Ces étudiants participent à un exercice de reflective mapping, ou cartographie des réflexions.

Utilisé dans la série d’ateliers APEX de l’Université Simon Fraser, cet exercice aide les étudiants aux cycles supérieurs à prendre conscience des compétences et de l’expérience qu’ils ont acquises, et à gagner en confiance. Les ateliers APEX ont été créés en 2013 dans le cadre d’un partenariat entre le département des études supérieures et les services d’orientation professionnelle de l’Université. Nous voulions mettre sur pied un programme intégrant une démarche constructiviste de la carrière, pour que les étudiants aux cycles supérieurs découvrent eux-mêmes les possibilités professionnelles qui s’ouvrent à eux au fil du temps. L’exercice de cartographie des réflexions est l’un des fondements du programme. Il amène les participants à tenter de donner un sens à leurs expériences professionnelles, à leurs intérêts et à leurs objectifs.

Les étudiants aux cycles supérieurs ressentent beaucoup de pression et d’anxiété par rapport à leur avenir professionnel. Ils sont souvent déchirés entre une myriade de choix et veulent suivre la voie parfaite. Le lien entre leur formation aux cycles supérieurs et les options de carrière n’est pas toujours clair, particulièrement dans ce monde de VUCA, c’est-à-dire de volatilité, d’incertitude, de complexité et d’ambiguïté. Nous, les conseillers en orientation, n’avons pas de boule de cristal et ne pouvons malheureusement pas donner de réponse précise aux étudiants. Dans le cadre des ateliers APEX, nous avons découvert que la technique de la cartographie des réflexions aidait les étudiants à reconnaître eux-mêmes leurs habiletés et talents. Cette meilleure compréhension leur donne ensuite confiance, ce qui suffit parfois à réduire leur anxiété et à leur permettre d’adopter une attitude positive.

Dès le départ, notre équipe croyait fermement que les étudiants aux cycles supérieurs étaient hautement qualifiés (contrairement à ce que la plupart des études racontent à leur sujet, à savoir que leurs compétences sont insuffisantes). Nous pensions que le problème touchait la reconnaissance et le transfert des acquis – que les étudiants ne comprenaient pas bien les compétences et connaissances qu’ils avaient acquises à l’université, ce qui les empêchait de les mettre en valeur auprès des employeurs hors de l’université. L’exercice de la cartographie des réflexions découle d’une méthode nommée River of Life (la rivière de vie), qui est utilisée en travail social et dans le milieu communautaire. Il a été adapté aux besoins de notre population d’étudiants aux cycles supérieurs. Les participants aux ateliers APEX citent souvent la cartographie des réflexions comme un exercice phare. Nous avons observé des résultats positifs chez des étudiants de toutes les disciplines. Même ceux qui résistent un peu à l’idée de se prêter au jeu apprécient habituellement l’expérience une fois que leur carte commence à prendre forme.

En quoi consiste l’exercice?

Un animateur qualifié donne le ton à l’activité. Il gère les attentes et l’anxiété des participants, qui ne sont pas habitués au volet créatif de cet exercice de cartographie conceptuelle. Chaque étudiant dispose d’une grande feuille de papier vierge et d’un ensemble de marqueurs de couleurs. Chacun travaille à sa propre table pendant toute la durée de l’exercice (d’une heure à une heure et demie). L’animateur pose des questions pour les guider tout au long de la séance, et les étudiants transposent leurs réflexions sur leur carte au fur et à mesure. L’activité est divisée en trois périodes : le présent, le passé et le futur (les objectifs). Les questions que pose l’animateur orientent les étudiants dans un remue-méninges sur leur vie, leur monde et leur expérience (leur propre contexte), pour chacune des périodes. Voici un exemple :

« Pensez à toutes les activités qui composent votre univers actuellement : emploi rémunéré, travail communautaire, travaux de recherche, rédaction, travail au sein d’associations et autres. Il y a aussi vos activités personnelles comme parent ou aidant naturel, vos loisirs et intérêts parascolaires, à l’école ou ailleurs. De quoi votre univers actuel est-il composé? Dressez la liste de ces activités sur votre feuille. »

À la suite de questions comme celles-ci, les étudiants couchent leurs réflexions sur papier. Ensuite, nous posons d’autres questions pour les amener à analyser divers aspects de leur carte. Passant du passé au présent, puis au futur, ils commencent à tracer des liens entre leurs expériences, ce qu’ils aiment et ce qu’ils savent bien faire. La carte leur permet de cibler ce qui est important pour eux en établissant des rapprochements entre les différents éléments. Les gens oublient souvent leurs expériences passées, mais cette activité les aide à faire des liens.

Avant l’exercice, les étudiants ont parfois l’impression que les emplois qu’ils ont occupés et les expériences qu’ils ont vécues sont le fruit du hasard. Ils ne voient pas toujours le lien qui les unit. Nous avons découvert qu’ils ont des idées préconçues concernant leurs expériences et croient par exemple que le travail en milieu universitaire (comme les tâches d’assistant d’enseignement ou de recherche, la participation à des comités, ou même les rôles de supervision et les articles publiés) n’a pas de valeur à l’extérieur. Nous les amenons à prendre conscience des compétences et des connaissances requises pour participer à ces activités, ainsi qu’à comprendre comment ces dernières contribuent à l’ensemble de leurs compétences. Les étudiants acquièrent beaucoup de confiance de cet exercice; ils constatent qu’ils sont plus que des étudiants (une autre idée préconçue), que leurs expériences universitaires comptent, qu’ils sont hautement qualifiés et qu’ils ont déjà jeté les bases de leur carrière (sans s’en rendre compte).

Cet exercice confirme ce que nous soupçonnions. Les étudiants aux cycles supérieurs ne manquent pas de compétences, de connaissances, ni d’expérience, mais ils ont besoin d’aide pour comprendre leurs carrières et expériences non linéaires et gagner en confiance. Ils peuvent ensuite mieux préparer leur vie professionnelle : ils rédigent de meilleurs CV, ont plus de facilité à parler de leurs compétences et talents et à écrire à ce sujet, et connaissent plus de succès dans les activités de réseautage. Nous ne pouvons pas lire l’avenir des étudiants dans une boule de cristal, mais nous pouvons améliorer leur capacité à le préparer efficacement. La plupart sauront ensuite faire le reste du chemin eux-mêmes.

À PROPOS SUE HAMPTON
Sue Hampton
Sue Hampton est conseillère pédagogique spécialisée en conception et facilitation au Centre pour l’enseignement, l’apprentissage et la technologie de l’Université de la Colombie-Britannique. Elle était auparavant coordonnatrice au développement professionnel et aux études postdoctorales à l’Université Simon Fraser.
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