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À mon avis

Les coûts cachés de la réussite sont trop élevés pour les étudiants à faible revenu

Il y a un prix à payer pour fréquenter l’université; il y en a un autre pour réussir ses études.

par ALYSSIA FOGARTY | 24 MAR 15

Les études universitaires coûtent cher. Les frais de scolarité croissants, le coût de la vie et celui des manuels scolaires, des régimes de soins médicaux, du transport et des repas s’additionnent rapidement. Les études ont un prix élevé que tout le monde voit et dont tout le monde parle. Or, pour de nombreux étudiants déjà aux prises avec des difficultés financières, le calcul ne s’arrête pas là.

Les étudiants à faible revenu connaissent bien les coûts supplémentaires liés aux études qui ne sont jamais mentionnés dans les discussions sur les dépenses universitaires, mais qui, pourtant, constituent un facteur intrinsèque de la réussite scolaire. Ces coûts étant plus difficiles à quantifier que les autres, ils ne sont pas pris en compte dans les demandes de prêts étudiants et d’aide financière. Il y a un prix à payer pour fréquenter l’université; il y en a un autre pour réussir ses études.

Il existe deux types de coûts supplémentaires liés aux études universitaires que j’appelle « coûts de la réussite ». Le premier est celui qu’il faut payer pour participer au volet social de sa discipline, autrement dit, les coûts « sociaux ». Ils comprennent le prix d’entrée à des événements, les cotisations à des sociétés, les frais de déplacement pour assister à des congrès, ainsi que la nourriture et les boissons consommées lors de réunions mondaines. Le deuxième est la perte de revenu ou d’occasions lorsque les étudiants manquent de temps pour simultanément gagner un salaire de subsistance et acquérir de l’expérience extrascolaire et bénévole, autrement dit, les coûts en « temps ».

Les coûts sociaux et les coûts en temps sont des dépenses nécessaires pour exceller sur le plan scolaire, c’est-à-dire, connaître du succès dans sa discipline en acquérant de la familiarité et de l’assurance avec ses pairs, devenir un candidat idéal aux bourses et poursuivre ses études en participant à des projets complémentaires. L’établissement de relations avec des pairs de sa discipline dans un contexte officieux permet de renforcer son statut en tant que membre de cette discipline. On peut ainsi apprendre des expériences vécues auprès des gens du département et du programme d’études. En outre, se faire connaître comme un membre du milieu social officieux permet de se faire connaître comme un membre du milieu universitaire officiel. Côtoyer ses camarades de classe aide à acquérir l’assurance voulue pour s’exprimer pendant les discussions en classe, offrir des commentaires critiques et des points de vue opposés, participer à des groupes d’études et collaborer à des projets supplémentaires.

Compte tenu des dépenses directes liées aux études universitaires, de nombreux étudiants travaillent pendant le semestre. Dans certains cas, c’est plus de 30 heures par semaine, en conciliant souvent plusieurs emplois et une charge de cours à temps plein. Or, le type de bourses d’études, de subventions et de reconnaissances dont les étudiants à faible revenu profiteraient le plus exige un dossier concurrentiel faisant état de bénévolat et de participation à des clubs. Autrement dit, des activités non rémunérées. Dans le même ordre d’idées, pour faire partie de sociétés et assister à des événements, des congrès et des ateliers, un étudiant doit avoir une certaine quantité de temps libre à y consacrer, et ce, gratuitement.

L’étudiant doit donc choisir entre travailler pour toucher un revenu et travailler pour s’ouvrir des débouchés. L’une des options lui permet de se loger et se nourrir, tandis que l’autre lui donne les moyens d’assurer sa réussite scolaire. Souvent, pour les étudiants à faible revenu, ces options sont incompatibles.

En raison de la nature cachée des coûts de la réussite, leur incidence sur le succès scolaire est méconnue, tout comme le mérite de nombreux étudiants à faible revenu. Le monde universitaire est conçu pour les gens qui disposent de beaucoup de temps libre, et ce fait inavoué n’en demeure pas moins un facteur intrinsèque de la réussite dans ce milieu. En réalité, bon nombre d’étudiants au potentiel élevé admis à l’université n’ont pas le luxe de pouvoir sacrifier leur temps et leur revenu pour se consacrer entièrement à leurs études.

La première chose à faire pour accorder aux étudiants à faible revenu la reconnaissance qu’ils méritent consiste à cerner les défis précis que leur impose leur condition socioéconomique dans le milieu universitaire. Il faut donc déterminer les coûts de la réussite susceptibles d’avoir des répercussions considérables sur le potentiel de succès des étudiants à faible revenu. La deuxième consiste à intégrer ouvertement et expressément ces défis au discours conventionnel sur le coût des études. Il faut donc reconnaître que les coûts de la réussite sont pertinemment liés à nos préoccupations d’ordre général concernant le prix de la scolarité et des manuels scolaires.

Il importe de discuter du coût des études universitaires. Pourtant, nos discussions semblent s’arrêter aux frais d’inscription. Imaginez grappiller suffisamment d’argent pour acheter un billet d’entrée dans un parc d’attractions, pour constater que vous n’avez pas les moyens de faire quoi que ce soit une fois à l’intérieur. Il en va de même pour le milieu universitaire: il ne suffit pas d’y entrer. Nous voulons également y connaître le succès.

Mme Fogarty est étudiante à la maîtrise en philosophie à l’Université Saint Mary’s de Halifax.

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