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L'aventure universitaire

Un message de Wonder Woman pour le milieu universitaire

L’image de la sauveuse et l’espoir décisif.

par JESSICA RIDDELL | 10 OCT 17

Alors que mon conjoint assumait seul nos responsabilités parentales, je me suis offert ma première séance d’écriture cet été. Consciente de toute l’énergie requise pour maîtriser deux indomptables bambins, j’étais déterminée à justifier ces précieux moments loin du tourbillon quotidien en produisant des pages et des pages de magnifique prose universitaire.

L’expérience a été particulièrement fantastique, mais pour des raisons bien différentes de ce que j’avais envisagé. J’ai passé cinq jours dans un chalet avec deux de mes collaborateurs préférés. Nous avons respecté notre ambitieux plan de travail, tout en nous offrant une petite gâterie : nous sommes allés voir le nouveau Wonder Woman au cinéma local. Je n’en savais au départ que peu sur la bande dessinée, mais j’en suis ressortie avec la conviction que Wonder Woman offrait un modèle à suivre pour atteindre les plus grands idéaux du milieu universitaire et, par extension, du monde.

L’auteure avec son frère, deguisés comme
Wonder Woman et Superman.

Le récit des origines de Diana, princesse de Themyscira, commence avec une voix hors champ qui met en contexte le thème général : « Je voulais sauver le monde, cet endroit magnifique. Mais plus on s’en approche, plus on voit la noirceur qui l’habite. »

Le film expose la naïveté associée à l’image de la sauveuse et à l’hypothèse sous-jacente voulant qu’il existe une distinction morale tranchée entre les « bons » et les « méchants ». Il présente l’évolution ontologique de Diana alors qu’elle fait face à une découverte troublante : sa résilience et son éventuel triomphe reposent entièrement sur sa capacité à faire preuve d’espoir décisif.

Paolo Freire, dans Pedagogy of Hope, définit l’espoir décisif comme la quête de vérité visant à donner un sens éthique au combat. Autrement dit, il prend forme dans la découverte de notre monde complexe et imparfait. Dans le secteur de l’enseignement supérieur, nous sommes conscients que nos relations avec nos étudiants et l’ensemble des gens sont complexes. Nous combattons cette complexité tout comme nous l’acceptons. Le rôle de l’espoir dans l’apprentissage est mis en lumière par Maria Popova, créatrice du blogue Brain Pickings, qui affirme que « la pensée critique sans espoir équivaut au cynisme, et l’espoir sans pensée critique n’est que naïveté ».

En regardant Wonder Woman, j’ai retenu un concept en particulier que j’aimerais mettre davantage en pratique dans le cadre de mes fonctions universitaires. Au début du film, des soldats envahissent l’île des Amazones. Alors que le combat fait rage, la générale des Amazones, Antiope, commande à l’une de ses compatriotes d’incliner son bouclier, qu’elle utilise ensuite pour se propulser haut dans les airs et ainsi anéantir la position stratégique de l’ennemi. Steve Trevor (le stéréotype du « gentil ») observe la scène depuis les plages de Themyscira. Plus tard dans le film, pendant que Diana et ses troupes en haillons essuient le feu de l’ennemi, Steve utilise, avec trois autres hommes, une porte de tank pour lancer Diana dans les airs et ainsi vaincre des tireurs d’élite et remporter la bataille.

Avance juste a 3 minutes pour la scene avec le bouclier.

Le bouclier représente l’esprit de générosité, de solidarité et d’humilité qui nous permet de pousser les autres vers de nouveaux sommets pour les amener à se surpasser. Celui qui le porte est essentiel à la victoire, mais il n’en tire aucune gloire. Il doit savoir repérer le moment où son intervention peut changer la donne. L’essayiste Rebecca Solnit, qui écrit pour le journal The Guardian, parle de l’espoir comme de « la certitude que ce que l’on fait compte, même s’il est impossible de savoir à l’avance quand et comment les retombées se manifesteront et sur qui ou quoi elles auront des conséquences. » Le porteur du bouclier est l’incarnation de l’espoir.

Nous avons tous profité de nos propres boucliers. Mon mari est un porteur de bouclier toujours présent, ravi de s’occuper de nos enfants tout en savourant discrètement mes réussites. Mes mentors, hommes et femmes, m’ont, par leur soutien, amenée plus loin que j’aurais pu le faire seule. Mes collaborateurs et mes collègues m’ont tendu la main plus souvent qu’à leur tour, que ce soit en réunion, en classe, sur des forums en ligne ou lors de réceptions du milieu de la recherche.

Juste avant de quitter Themyscira, Diana affirme ce qui suit : « Si personne ne défend le monde, je dois le faire. » Elle fait ainsi écho à la façon dont Edward Said définit l’intellectuel public, dont la « mission est de défendre les gens et les enjeux habituellement oubliés ou ignorés. » Même si nous devons réévaluer notre image du sauveur en nuançant les notions de coalition et de promotion d’intérêts, les valeurs fondamentales ne changent pas. Je suis plus que jamais consciente de mon obligation éthique à agir comme un bouclier pour mes collègues, en particulier pour les membres marginalisés et sous-représentés du milieu universitaire.

Le récit des origines de Diana est-il raconté par des mortels imparfaits, pour un public de mortels imparfaits? Oui. Le cinéma, et le milieu universitaire, doivent-ils représenter un féminisme qui va au-delà de la classe moyenne blanche? Oui. Wonder Woman nous montre que le but n’est pas de rester au sommet du mont Olympe pour regarder de haut ceux qui n’ont pas encore été illuminés, mais plutôt de se joindre au combat dans les plaines et les tranchées, soit en classe et sur le terrain. Car c’est dans la lutte que se cachent la beauté et l’espoir.

À PROPOS JESSICA RIDDELL
Jessica Riddell
Jessica Riddell est professeure au département d’anglais de l’Université Bishop’s, ainsi que titulaire de la chaire Stephen A. Jarislowsky pour l’excellence en enseignement au baccalauréat et récipiendaire du Prix national 3M d’excellence en enseignement. Elle est également directrice générale de la Maple League of Universities.
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