Survivre à votre première année dans un poste menant à la permanence
C'est important d'établir votre réseau de soutien, fixez-vous des limites, ayez votre propre vision de la réussite.
Cet article est commandité par le programme des Chercheurs mondiaux ICRA-Azrieli, qui offre financement, mentorat et soutien aux chercheurs en début de carrière pour les aider à bâtir leur réseau et à acquérir des compétences essentielles.
Accéder à un poste menant à la permanence est un peu comme devenir parent. Vous aurez beau tout prévoir en vue du grand jour et des mois à venir, les imprévus et les intérêts concurrents ne manqueront pas. Toute planification est plus ou moins vaine. Chaque bébé est différent, et chacun doit apprendre par lui-même l’art d’être parent. Il en va de même après avoir obtenu un poste menant à la permanence : on fait de son mieux en espérant que tout se passe bien, mais ce qui doit arriver arrivera.
Je suis bien placée pour comparer les deux expériences, car j’ai donné naissance à ma fille trois jours après avoir défendu ma thèse de doctorat – ce fut la semaine la plus productive de ma vie! J’ai accédé à mon premier poste menant à la permanence alors que ma fille n’avait que sept mois. Bien que j’aie eu la chance d’avoir un conjoint très prévenant, qui m’a beaucoup aidée pendant cette période un peu folle, ma première année à ce poste fut difficile.
Je me vois encore courant sur le campus pour aller enseigner après avoir quitté avant la fin un atelier consacré à la rédaction de subventions. J’avais à tort présumé que nous aurions droit à une pause-déjeuner […] plutôt qu’à un sac de croustilles pour 12 professeurs. Je suis arrivée en classe suant à grosses gouttes, affamée. Ce jour-là, pendant que j’écrivais un code informatique devant 160 étudiants, il est clairement apparu que j’avais fait une erreur. En temps normal, j’en aurais fait profiter mon enseignement, mais j’étais si affamée et sous pression que j’ai paniqué. Les étudiants sont devenus de plus en plus bruyants à mesure que je tentais désespérément de repérer mon erreur. Le cours a pris fin juste au moment où je l’avais repérée. Revenir en classe après cet épisode a été difficile. En pareil cas pourtant, comme quand on est parent, pas question de baisser les bras. Chaque jour, il faut faire de son mieux, en espérant s’améliorer avec le temps. Quand je repense à cette première année, je me dis que trois choses m’ont relativement facilité la tâche. D’où les trois conseils que voici :
Établissez votre réseau de soutien
À qui pouvez-vous faire appel pour du soutien? Qui pouvez-vous appeler s’il vous arrive d’écrire du code bogué devant 160 personnes? Renseignez-vous sur les programmes de mentorat de votre établissement et profitez-en. Tournez-vous vers les chercheurs de votre discipline, ou vers les diplômés de votre promotion. Planifiez. Entrez les coordonnées de vos soutiens potentiels sur votre téléphone. Personnellement, j’ai eu la chance d’avoir un mentor sensationnel, mais aussi de trouver des soutiens non officiels au sein de mon établissement, rencontrés lors d’activités sociales sur le campus – en particulier à la séance d’orientation destinée aux nouveaux professeurs. N’hésitez pas à prendre part à ce type d’activités. Vous y ferez la connaissance de gens qui se heurtent aux mêmes problèmes que vous, dans le même contexte.
Fixez-vous des limites
Le fait d’être mère d’un jeune enfant m’a conduite à gérer mes horaires de travail avec bien plus de rigueur. Il m’est bien sûr arrivé de travailler le soir et la fin de semaine (en particulier la première année), mais je ne le fais pas à la légère. Si, par exemple, je consacre quelques heures d’un dimanche à rédiger une demande de subvention, je me concentre pleinement sur cette tâche. Attention : nul besoin d’avoir un enfant pour adopter une telle attitude. Votre temps de repos est tout aussi important que votre temps de travail. Il vous régénère et vous permet de mieux vous concentrer quand vous reprenez le travail.
Ayez votre propre vision de la réussite
La vie universitaire est pleine de revers, qui prennent souvent la forme de critiques négatives sur un article, de demandes de subvention refusées, ou encore d’évaluations médiocres de votre enseignement. Fixez vos propres objectifs, sans espérer les félicitations de quiconque. En parvenant par exemple à être fier d’un article dès sa soumission, sans attendre qu’il soit accepté, vous multiplierez les occasions de vous réjouir. Après tout, bien des facteurs entrent en jeu dans le système d’évaluation des articles (voir cet article de Computer Science si vous aimez les statistiques). Certains jours, les choses tournent en votre faveur, d’autres jours, pas du tout. Faites de votre travail une récompense en soi.
Tout ça est bien sûr plus facile à dire qu’à faire. Il y a des semaines où j’arrive à me fixer des limites et à rester positive malgré le rejet d’un article, mais bien souvent je n’y parviens pas. Certaines choses m’ont vraiment aidée : considérer mon poste menant à la permanence comme un postdoctorat de sept ans, apprécier dès le départ ma chance d’avoir obtenu ce poste et attendre d’avoir obtenu la permanence pour me permettre d’avoir du plaisir. Un poste menant à la permanence est une chose formidable, mais aucun poste ne mérite que l’on perde de vue ce qui est important pour soi.
Alona Fyshe est professeure adjointe au département d’informatique de la University of Victoria, ainsi que chercheuse mondiale ICRA-Azrieli. Elle est titulaire d’un baccalauréat et d’une maîtrise en sciences informatiques de la University of Alberta, ainsi que d’un doctorat en apprentissage machine de l’Université Carnegie Mellon. Mme Fyshe utilise l’apprentissage machine pour comprendre, à partir de gros volumes de textes et de données de neuro-imagerie, comment les gens combinent mentalement les mots pour créer une signification complexe.
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