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Un partenariat porteur d’espoir pour les étudiants étrangers quittant des pays en guerre

Une organisation dirigée par des étudiants à l’Université Wilfrid Laurier décerne des bourses d’études à des étudiants qui fuient la guerre.

par GRACE KARRAM STEPHENSON & BRUNO VOMPEAN | 12 JUIN 17

Fin avril, l’Université Wilfrid Laurier a annoncé, par la voie de son administration, qu’elle accentuerait sa contribution financière pour permettre à des étudiants originaires de pays en guerre de venir étudier dans son établissement. Il s’agit d’une grande victoire pour l’International Students Overcoming War (ISOW), une organisation dirigée par des étudiants qui décerne des bourses d’études aux étudiants étrangers dont la vie dans leur pays d’origine a été bouleversée par la violence. L’ISOW réclamait plus d’argent depuis janvier déjà, lorsque la situation d’incertitude politique aux États-Unis a fait du Canada la destination de prédilection de nombreux étudiants étrangers fuyant la guerre.

« C’est un formidable défi, commente le président de l’ISOW, Parker Beemer, étudiant de quatrième année en histoire. Comme elles ignorent où en seront les choses dans deux ans, nos ONG partenaires préfèrent orienter les étudiants vers le Canada plutôt que vers les États-Unis. »

Pour repérer les boursiers potentiels, l’ISOW et l’Université Wilfrid Laurier s’allient à des organisations éducatives à but non lucratif, dont Jusoor. Créée par un groupe d’expatriés syriens, cette organisation aide de jeunes Syriens à poursuivre leurs études à l’étranger. Conseillère stratégique principale auprès du gouvernement ontarien, Leen Al Zaibak compte parmi ses membres fondateurs. « L’an dernier, 20 de nos étudiants se sont rendus aux États-Unis, mais nous ne savons pas où envoyer nos étudiants l’automne prochain. »

Selon Mme Al Zaibak, les organisations comme l’ISOW sont des partenaires parfaits pour la gestion des bourses d’études. « Cette organisation est formidable. Elle permet aux étudiants d’entrer en relation les uns avec les autres, entre pairs. Les étudiants syriens sont accueillis à l’Université Wilfrid Laurier grâce à leurs confrères et consœurs qui y tiennent et qui recueillent des fonds nécessaires à leur venue. »

L’argent des bourses d’études décernées par l’ISOW provient en effet de trois sources : la moitié est recueillie dans le cadre d’une campagne de financement menée auprès des étudiants de l’Université Wilfrid Laurier, et le reste provient à peu près en parts égales de l’établissement lui-même et des ONG partenaires. Chaque bourse d’études est d’environ 44 000 $. Elle couvre les frais de scolarité et de subsistance des boursiers, en plus de leur permettre de retourner une fois par an dans leur pays d’origine.

La contribution financière accrue de l’Université Wilfrid Laurier permettra cet automne à l’ISOW de venir en aide à six ou sept étudiants (trois ou quatre au premier cycle, et trois à la maîtrise), comparativement à deux à l’automne 2015 et quatre en 2016.

« Pour permettre aux boursiers étrangers de faire face au coût de la vie au Canada, l’Université Wilfrid Laurier couvrira les frais de scolarité », explique Gavin Brockett, vice-doyen des arts, des affaires étudiantes et de l’apprentissage de l’établissement, dont la faculté est la principale à financer l’ISOW. Chaque étudiant coûte en moyenne 10 000 $ par année à l’établissement (variable selon les facultés).

L’idée à l’origine de la création de l’ISOW est née d’un cours d’apprentissage actif sur le conflit israélo-palestinien, donné par M. Brockett en 2013. « Pour ce cours, j’avais la possibilité exceptionnelle d’exiger des étudiants plus qu’une simple communication savante. J’ai tenu à ce qu’ils se mettent dans la peau des gens qui vivent la guerre au quotidien », explique-t-il. M. Brockett a donc demandé à ses étudiants d’étudier les conflits mondiaux à la lumière de leurs échanges avec une ONG.

C’est ce qui a fini par donner officiellement naissance à l’ISOW, en 2014. Dans le cadre d’un référendum, les étudiants de l’Université Wilfrid Laurier ont consenti à ce que chacun d’eux soit tenu de verser huit dollars pour financer la nouvelle organisation. La direction de l’ISOW se compose aujourd’hui de 19 étudiants, chargés aussi bien d’assurer la comptabilité que de rencontrer les députés. Fin avril, ils se sont rendus à Ottawa pour présenter l’ISOW à divers représentants du gouvernement fédéral.

« Je n’aurais jamais cru être intéressé un jour par l’action à but non lucratif, avoue M. Beemer, mais c’est pourtant le cas. Je consacre souvent plus de 20 heures par semaine à l’ISOW. » Fervent défenseur de l’apprentissage actif, M. Brockett veille à ce que l’expérience et les compétences acquises par les étudiants qui dirigent l’ISOW leur soient créditées.

« Ils doivent décider comment dépenser l’argent, choisir les boursiers, créer des partenariats avec les ONG. Ce n’est pas facile, précise M. Brockett. Avec les nouveaux financements, ils auront à gérer un budget d’un demi-million de dollars. »

Le soutien apporté par l’ISOW aux étudiants étrangers n’est pas uniquement financier, loin de là. Originaire de Syrie et boursière ISOW, May Mahrat poursuit une maîtrise en analyse culturelle et en théorie sociologique à l’Université Wilfrid Laurier. Malgré ses connaissances dans le domaine culturel, le fait d’étudier au Canada lui a posé bien des défis. « À mon arrivée ici, tout me semblait plus ouvert, mais je n’étais pas prête à un tel changement. La vie est bien plus lente en Syrie. »

Mme Mahrat affirme que l’appui des dirigeants de l’ISOW a contribué à sa réussite. « Ils sont pleinement conscients des différences et des sensibilités culturelles. Ils en tiennent compte et sont pour nous comme des amis. J’ai fini par développer un sentiment d’appartenance à la collectivité canadienne. Je tiens maintenant à faire quelque chose pour elle, et pour l’ISOW. »

Malgré les efforts financiers de l’Université Wilfrid Laurier, l’ISOW croule sous les demandes de bourses d’études. Compte tenu de l’instabilité politique aux États-Unis, l’organisation et sa partenaire Jusoor espèrent que de plus en plus d’établissements canadiens s’engageront à aider financièrement les étudiants étrangers venus de pays en guerre. « L’aide humanitaire en tous genres abonde, souligne Mme Al Zaibak, mais personne ne se concentre sur les étudiants dont les études ont été interrompues par la guerre. En Syrie, après six ans de conflit armé, certains enfants n’ont connu que la guerre. C’est une génération perdue. »

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