La plupart des Canadiens ne sont pas habitués à se soucier des températures dangereusement chaudes, mais les vagues de chaleur sont de plus en plus courantes. En 2009, plus de 150 personnes sont décédées en raison d’une vague de chaleur en Colombie-Britannique, et en 2010, plus de 280 personnes sont mortes à cause de la chaleur extrême au Québec.
C’est ainsi que commence l’article sur l’effet d’îlot thermique urbain dans l’Atlas climatique du Canada, un site Web interactif qui présente des vidéos, des cartes et des explications claires sur la réalité des changements climatiques qui touche les collectivités de partout au pays. Lancé le 4 avril dernier au Musée royal de l’Ontario, à Toronto, ce site est une initiative du Centre climatologique des prairies de l’Université de Winnipeg.
Les cartes interactives du site montrent des données sur les changements climatiques pour environ 2 000 villes, villages et régions selon des scénarios de fortes ou de faibles émissions de gaz à effet de serre. En cliquant sur Ottawa, par exemple, on découvre que, d’ici 2021, la ville devrait s’attendre à croupir sous des températures dépassant les 30 degrés Celsius pendant environ 78 jours par année selon un scénario de fortes émissions, comparativement à environ 10 jours par année entre 1976 et 2005. La ville de Vancouver, connue pour son climat tempéré, pourrait connaître 48 jours de grande chaleur par année d’ici 2021, comparativement à une moyenne d’un seul jour par année entre 1976 et 2005.
Bien qu’il soit fondé sur de solides données scientifiques provenant de 12 modèles climatiques mondiaux, le site Web entend être bien plus qu’une source d’information. « Des données sur les changements climatiques ne suffisent pas à modifier les comportements, explique le codirecteur du Centre, Ian Mauro. Nous commençons à comprendre qu’il existe tout un processus social entourant la manière dont les gens réagissent à l’information. »
Ce processus fait appel à la mise en récit pour faire prendre conscience du fait que les changements climatiques se produisent ici et maintenant. Dans l’une des vidéos, un chauffeur de camion sur des routes d’hiver au nord du Manitoba raconte que le réchauffement des températures a fait fondre les ponts de glace qui se forment sur les ruisseaux le long de sa route, le forçant à un moment donné à abattre des arbres pour remplir la rigole afin de pouvoir passer.
« On ne parle pas ici de peuples vivant dans des régions éloignées et d’un avenir lointain, poursuit M. Mauro, qui a tourné bon nombre des vidéos du site Web au cours d’une dizaine d’années alors qu’il réalisait des documentaires sur les changements climatiques. À la fois professeur de géographie à l’Université de Winnipeg et cinéaste, M. Mauro a codirigé le très influent documentaire sur l’inuktitut intitulé Qapirangajuq: Inuit Knowledge and Climate Change, en collaboration avec le cinéaste inuk primé Zacharias Kunuk.
Financé en partie par Environnement et Changement climatique Canada et la province du Manitoba, l’Atlas se veut un outil de planification pour les gouvernements et les entreprises. M. Mauro dit qu’il reçoit déjà des appels de municipalités et de groupes, entre autres d’architectes paysagistes, qui demandent si l’outil peut être utilisé à cette fin.
Mais lui et ses collègues n’ont pas terminé. L’Atlas est un processus continu et ils prévoient y ajouter des segments de réalité virtuelle, ainsi que de nouveaux sujets spécialisés portant entre autres sur le savoir autochtone et les forêts.
« Je crois que la mise en récit peut changer le monde, déclare M. Mauro. Si nous reconnaissons que l’histoire des changements climatiques peut mener notre espèce vers de graves dangers, nous pourrons faire place à la possibilité que nous avons de changer le scénario. »