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Des dirigeants d’universités israéliennes et allemandes exposent à Ottawa leurs points de vue sur l’innovation

par ROSANNA TAMBURRI | 20 NOV 14

Selon les conférenciers qui ont pris la parole lors d’un récent dialogue sur l’innovation, les liens de longue date qui existent entre les universités et l’industrie manufacturière en Israël et en Allemagne ont contribué de manière déterminante à stimuler la recherche-développement dans ces pays, dont la puissance est reconnue en matière de hautes technologies et d’industrie manufacturière.

Intitulée « Maximiser le système d’innovation du Canada : Points de vue de l’étranger » , la conférence organisée par l’Association des universités et collèges du Canada (AUCC) s’est tenue sur trois jours à la fin d’octobre à Ottawa. Des conférenciers venus d’Allemagne et d’Israël, ainsi que de conférenciers canadiens participaient à ce dialogue qui a attiré des recteurs, des fonctionnaires et des dignitaires canadiens.

« Les universités ne sont pas des structures abstraites, a déclaré en entrevue Peretz Lavie, recteur de l’Institut de technologie israélien Technion lors de la conférence. Personnellement, j’estime qu’elles ont pour mission de servir à la fois l’humanité, le pays où elles se trouvent et la société. »

Fondé avant même la naissance d’Israël, Technion a toujours eu pour mandat de répondre aux besoins de l’État. À l’origine une école d’ingénieurs, le Technion s’est graduellement mué en université de recherche. Au milieu des années 1960, Israël cherchant à disposer de radars à infrarouges pour détecter les missiles, le Technion s’est doté d’un institut de microélectronique pour mettre au point de tels radars. En 1990, à la suite de l’arrivée d’un million d’immigrants juifs en provenance de l’ex-Union soviétique, l’établissement a multiplié les admissions. Ces immigrés très instruits ont par la suite grandement contribué à l’émergence du secteur israélien des nouvelles technologies.

Depuis une vingtaine d’années, le secteur de nouvelles technologies est devenu le moteur de la croissance économique d’Israël et a donné naissance à des milliers de PME. Aucun pays ne consacre aujourd’hui une plus grande part de son produit intérieur brut à la recherche-développement qu’Israël, selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Les collaborations entre les universités et l’industrie sont essentielles à la prospérité d’Israël. Le solide esprit d’entrepreneuriat et le goût du risque observés dans ce pays, en particulier chez les jeunes, ont également contribué à faire de lui un « incubateur d’entreprises », selon Manuel Trajtenberg, président du comité de planification et de budgétisation du Conseil de l’enseignement supérieur israélien et professeur d’économie à l’Université de Tel-Aviv.

En Israël, la croissance économique et l’innovation se sont toutefois concentrées dans le secteur des hautes technologies, sans entraîner de retombées vers les autres secteurs de l’économie, et les disparités socioéconomiques se sont accrues, a déclaré M. Trajtenberg. « Les résultats à ce jour sont mitigés, a-t-il concédé dans une allocution. Le vrai défi pour nous consiste à passer d’une nation incubatrice d’entreprises à une nation dont l’économie profite à toute la société. »

Les universités doivent renforcer leurs liens avec l’industrie, le gouvernement et la population, a ajouté M. Tratjenberg, selon qui il n’existe toutefois pas de solution miracle pour favoriser l’innovation. « C’est avant tout une question d’attitude. »

En Allemagne, les universités et l’industrie ont tissé des liens dès la fondation des premières universités techniques au XIXe siècle, pour stimuler la croissance dans les régions du pays en proie au marasme économique. Selon Horst Hippler, recteur de la Conférence des recteurs allemands qui représente plus de 300 universités, un tiers du financement de la recherche effectuée dans les universités allemandes provient aujourd’hui du secteur privé. Et ce sont les PME et les entreprises familiales, ou mittlestands, qui versent la majeure partie du financement.

Les partenariats en matière de recherche ne sont toutefois pas les seuls moteurs de l’innovation en Allemagne. La mobilité entre universités, instituts de recherche et entreprises y contribue également. « La mobilité est au cœur du processus d’innovation », a expliqué M. Hippler, précisant qu’en Allemagne, il est fréquent que les titulaires de doctorat en génie travaillent pendant plusieurs années pour une entreprise avant de commencer à enseigner à l’université. Cela leur permet de se créer des contacts et des réseaux au sein de l’industrie.

Les grandes entreprises financent les chaires de recherche au sein des universités allemandes dans l’optique de combler leurs besoins en matière de recherche-développement et d’avoir accès à une main-d’œuvre qualifiée. M. Hippler a souligné l’existence en Allemagne d’une tradition de stages obligatoires désormais bien établie, apparue dans les domaines du génie et des sciences naturelles avant de se propager aux sciences humaines.

Dépendante des ressources naturelles, l’économie canadienne a connu une évolution différente qui a eu des répercussions sur la culture d’entreprise au pays, et sur les liens entre les universités et l’industrie, a pour sa part déclaré Elizabeth Cannon, rectrice de l’Université de Calgary et vice-présidente du conseil d’administration de l’AUCC, qui a aussi été doyenne d’une faculté de génie. Selon elle, le Canada doit accroître ses efforts pour renforcer les liens entre les universités et l’industrie ainsi que l’esprit d’entrepreneuriat, qui semblent inhérents aux cultures israélienne et allemande. Mme Cannon a toutefois précisé que le Canada a fait office de précurseur par la mise en place de programmes comme les chaires de recherche industrielle du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie, la Fondation canadienne pour l’innovation, les Chaires de recherche du Canada et les Chaires d’excellence en recherche du Canada. « Nous avons beaucoup de réussites à notre actif, a-t-elle souligné, mais nous devons faire plus. Les entreprises doivent considérer les universités comme des maillons de l’écosystème de l’innovation. »

« Je pense qu’un grand nombre d’éléments sont en place, a ajouté le recteur de l’Université Dalhousie, Richard Florizone. Il faut maintenant discuter avec les chefs d’entreprise pour tenter de dégager encore plus d’intérêts communs. » Plus tôt au cours du dialogue, M. Florizone avait raconté avoir été responsable d’une équipe chargée de négocier l’obtention des prêts gouvernementaux pour un projet pour le compte de l’entreprise Bombardier, une entreprise axée sur l’aérospatiale et les transports. Extrêmement étonné à l’époque de voir le gouvernement fédéral exiger qu’une université canadienne prenne part au projet, M. Florizone aujourd’hui à la tête d’une grande université, est convaincu que l’engagement des chefs d’entreprise est essentiel à la réussite du Canada en matière d’innovation. Les dirigeants d’entreprise sont généralement prêts à soutenir les universités, surtout par du financement. Reste à poursuivre les discussions avec eux pour les convaincre du bien-fondé de la recherche-développement concertée.

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