Donner au conseil scientifique francophone ses lettres de noblesse
Fonder les politiques publiques sur des données probantes ne suffit pas. Il faut aussi tenir compte de la langue et de la culture, c’est ce que confirme la récente création d’un réseau francophone international en conseil scientifique.
Qu’ont en commun les fonctionnaires qui rédigent des notes de breffage, les chercheurs et chercheuses universitaires appelé.e.s à intervenir en commission parlementaire et le scientifique en chef du Québec? Le conseil scientifique : le rôle de ces gens consiste à communiquer des résultats de recherche aux personnes appelées à prendre les décisions. « On les retrouve à différents niveaux hiérarchiques et dans différentes organisations. Ils appuient la mise en place de politiques publiques », explique Mathieu Ouimet, professeur au Département de science politique de l’Université Laval.
Ce spécialiste du transfert et de la mobilisation des savoirs scientifiques dans les administrations publiques pilote depuis peu le Réseau francophone international en conseil scientifique (RFICS). Comme son nom l’indique, cette nouvelle entité a pour mission de renforcer les capacités en conseil scientifique dans la francophonie par l’entremise d’activités de recherche, de formation et de partage de connaissances. Basé au Québec, le réseau est financé par les Fonds de recherche du Québec ainsi que des partenaires universitaires.
Le RFICS est l’aboutissement de discussions entamées en pleine pandémie de COVID-19, alors que le conseil scientifique en santé publique était plus que jamais sollicité. « J’avais régulièrement des discussions sur le virus avec des collègues qui font le même travail que moi dans les pays anglo-saxons, mais pas dans l’espace francophone, où il y avait clairement un besoin pour un réseau d’échanges », raconte Rémi Quirion, scientifique en chef du Québec et président du Réseau international en conseil scientifique gouvernemental (INGSA), dont le RFICS est une division.
Tenir compte de la langue en conseil scientifique est primordial. Les synthèses de connaissances faites au Royaume-Uni au plus fort de la crise sanitaire ne pouvaient juste être traduites. « Les recommandations doivent être adaptées aux différents contextes locaux, tous plus subtils les uns que les autres. On n’intervient pas au Japon comme on intervient aux États-Unis », illustre M. Quirion, qui précise par ailleurs que des démarches pour fonder des structures similaires sont en cours ailleurs dans le monde, notamment dans les pays hispaniques.
Rappelons que le premier dirigeant des Fonds de recherche du Québec a été l’instigateur d’une rencontre internationale des conseillers scientifiques. Cette réunion inédite tenue à Montréal en 2014 allait paver la voie à la création de l’INGSA, qui compte aujourd’hui plus de 5 000 membres dans 130 pays.
Tout est à faire
Le RFICS a fait l’objet d’un appel de proposition par les Fonds de recherche du Québec, comme cela avait par exemple été le cas pour l’Observatoire international sur les impacts sociétaux de l’IA et du numérique, il y a quelques années. Au terme du concours, c’est Mathieu Ouimet qui a été choisi pour diriger le réseau. Le chercheur bénéficie du soutien, pour l’Europe, de Damien Cesselin, secrétaire général administratif de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie et pour l’Afrique, de Mahaman Tidjani Alou, professeur à l’Université Abdou Moumouni de Niamey, au Niger.
« La richesse et la diversité de l’expertise réunie autour de la table sont probablement ce qui a fait pencher la balance en faveur de cette candidature », pense M. Quirion, qui n’a pas été impliqué dans les délibérations. « Je m’intéresse aux politiques publiques fondées sur les données probantes depuis ma thèse de doctorat, il y a deux décennies. C’est un champ disciplinaire immense qui existe depuis belle lurette », précise pour sa part le porteur principal du RFICS, qui a été officiellement lancé dans le cadre du forum S’informer, décider et… faire une différence, en novembre dernier.
Au moment d’écrire ces lignes, début décembre, tout était encore cependant à faire, de la mise en place de règles de régie interne au développement de partenariats stratégiques avec des organisations de la Francophonie. « Nous souhaitons être opérationnels dès le premier trimestre de 2023 », révèle M. Ouimet. Un des premiers chantiers du RFICS sera d’identifier tous les acteurs de la Francophonie impliqués de près ou de loin dans le conseil scientifique. Cette cartographie permettra ensuite de tisser des liens dans cette communauté d’intérêts.
Chose certaine, le conseil scientifique est promis à un bel avenir. « Les relations entre la science et les politiques publiques sont plus que jamais d’actualité avec, par exemple, la lutte aux changements climatiques », souligne M. Ouimet. « À l’heure actuelle, seule une poignée d’expert.e.s [du côté universitaire] sont consulté.e.s par nos décideurs et décideuses. Dans un monde idéal, il devrait y avoir des gens à l’intérieur de l’appareil public pour faire remonter l’ensemble des données probantes dans la hiérarchie », renchérit M. Quirion.
De fait, le conseil scientifique représente une voie d’intérêt, quoique méconnue pour les étudiant.e.s aux cycles supérieurs. À titre d’exemple, le gouvernement du Québec cherche d’ailleurs à recruter des agent.e.s de recherche et de planification socio-économique sur une base régulière.
Postes vedettes
- Droit - Professeur(e) remplaçant(e) (droit privé)Université d'Ottawa
- Médecine - Professeur(e) adjoint(e) (communication en sciences de la santé)Université d'Ottawa
- Chaire de recherche du Canada, niveau 2 en génie électrique (Professeur(e))Polytechnique Québec
- Medécine- Professeur.e et coordonnateur.rice du programme en santé mentaleUniversité de l’Ontario Français
- Littératures - Professeur(e) (Littérature(s) d'expression française)Université de Moncton
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