7 conseils pour prendre soin de soi

Des universitaires dévoilent leurs secrets pour se sentir bien toute l’année.

02 janvier 2020

Chaque année, nous sommes nombreux à vouloir atteindre un meilleur équilibre travail-vie personnelle et mieux gérer le stress. Et chaque année, nous sommes nombreux à échouer. Pour commencer 2020 en beauté, Affaires universitaires a posé à des employés et à des professeurs d’universités de partout au Canada la question « Comment prenez-vous soin de vous? ».


Ralentir pour en faire plus

par Ivan Joseph

Ivan Joseph.

Les dirigeants universitaires doivent prendre soin d’eux-mêmes pour la même raison que les athlètes de haut niveau : pour améliorer leur rendement. C’est cependant plus facile à dire qu’à faire. Malgré mon long passé d’athlète et d’entraîneur, j’ai moi-même succombé à l’épuisement professionnel.

En 2008, lorsque j’ai été nommé directeur des sports à l’Université Ryerson, j’étais déterminé à surpasser les attentes. J’étais toujours le dernier à partir lors d’activités. Je participais à tous les projets. J’arrivais tôt et je partais tard, très tard. Je travaillais les fins de semaine. Mes 60 heures hebdomadaires se sont transformées en 80, puis en 100 heures. Résultat? Je me suis épuisé et mon rendement en a souffert.

Dix ans plus tard, lorsque je suis arrivé à l’Université Dalhousie, j’avais appris ma leçon. Je savais qu’en prenant soin de moi, je m’assurerais d’offrir le meilleur de moi-même. Cet enseignement a porté ses fruits. Je suis maintenant plus créatif, équilibré, réfléchi, calme et concentré, et je peux faire le travail à ma façon.

Voici ce qui a fonctionné pour moi :

  • Habiter près de mon lieu de travail : à l’Université Ryerson, je passais souvent trois heures par jour dans les transports. Je peux maintenant me rendre à l’Université Dalhousie en 20 minutes à pied.
  • Faire confiance à mon équipe : la microgestion limite la créativité et la confiance. Elle vous éloigne aussi de votre liste de tâches à accomplir.
  • Me déconnecter une fois par année : chaque été, je prends deux semaines de vacances. Je disparais pour aller faire du canot en eau vive. Lorsque je reviens, j’ai fait le plein d’énergie sur les plans physique, mental, émotionnel et spirituel.
  • Me limiter à 80 heures de travail par semaine : pour un haut dirigeant, la semaine de 40 heures est une utopie. Néanmoins, si vous dépassez les 60 heures en temps normal et les 80 heures en période occupée, il est temps de revoir vos habitudes.
  • Vivre comme un Haligonien : à l’Université Dalhousie, tout le monde accorde beaucoup d’importance au travail, mais aussi au repos, une bonne habitude de la côte est que je vous recommande.

Ivan Joseph est vice-doyen aux affaires étudiantes à l’Université Dalhousie. 

Enfiler son tablier

par Hormoz Izadi

Hormoz Izadi.

Pour mon bien-être personnel et ma santé mentale, je me tourne entre autres vers les loisirs. La cuisine me passionne. Le week-end, je passe quelques heures dans la cuisine, ce qui me permet de relâcher tout le stress de ma semaine de travail à l’université. C’est en quelque sorte mon sanctuaire. J’aime aussi pratiquer des sports d’équipe, passer du temps avec ma famille, lire et écouter de la musique. Je crois que, quels que soient vos intérêts personnels, il est important pour votre bien-être d’y consacrer du temps chaque jour ou chaque semaine pour prendre du recul et évacuer le stress du travail, de l’école ou de la vie en général.

Je m’assure aussi d’avoir le soutien de proches à qui je peux demander de l’aide, des conseils ou des opinions. Je crois qu’il est essentiel de reconnaître nos limites et de faire appel à des personnes expérimentées ou qui s’y connaissent mieux que nous au besoin. Pour réduire le stress, il est également utile de savoir que nous pouvons compter sur quelques personnes compréhensives.

De plus, en tant qu’étudiant aux cycles supérieurs, j’ai trouvé une foule de possibilités et de ressources sur le campus. L’association des étudiants aux cycles supérieurs organise toutes sortes d’activités de soutien par les pairs qui favorisent la création de liens. Faire partie d’un comité a été l’une des expériences les plus agréables de mon parcours universitaire.

Hormoz Izadi est candidat au doctorat au département des sciences de la Terre à l’Université de Calgary et a fait partie du comité consultatif de mise en œuvre de la stratégie en matière de santé mentale de son université.

Cultiver son lien avec la nature

par Patty Hambler

Les feuilles couleur rouille et citrouille laissent transparaître les rayons du soleil un jour frisquet d’octobre. J’ai proposé à un ami une longue promenade en ce samedi après-midi. Nous flânons dans les méandres du Pacific Spirit Regional Park, qui entoure le campus de l’Université de la Colombie-Britannique. Nous parcourons tranquillement les sentiers en remarquant les champignons qui poussent sur l’écorce des arbres et en humant l’odeur de la terre. L’automne est ma saison préférée. Toutefois, peu importe le temps de l’année, mes promenades dans les sentiers sont essentielles à mon bien-être.

Je prends aussi soin de moi autrement : je me fais vacciner contre la grippe chaque année, je prends une pause de mes courriels pendant 24 heures au moins une fois par semaine, je bouge, j’essaie de nouvelles choses, je tente de m’éloigner de mon perfectionnisme et je passe du temps avec l’homme qui partage ma vie depuis 26 ans – une priorité pour moi. Néanmoins, pour me sentir bien, j’ai profondément besoin de sentir mon lien avec la terre et la nature. Ces promenades dans le parc me sont essentielles : elles me permettent d’entretenir mes relations avec mes proches; nous parlons de nos inquiétudes, de nos difficultés, de nos objectifs et de nos réussites. J’en profite également pour éveiller tous mes sens à la beauté qui m’entoure.

Patty Hambler.

Lorsque je me rappelle que je vis et travaille sur le territoire ancestral non cédé du peuple Musqueam, je ressens toujours de la gratitude envers ce peuple et ses ancêtres qui l’ont protégé. Je les remercie pour la chance que j’ai eue au cours des 20 dernières années de voir des aigles voler au-dessus de ma tête, de cueillir des mûres sucrées et de marcher entre les grands cèdres comme les Musqueam le font depuis des temps immémoriaux.

J’ai récemment déménagé dans la réserve Musqueam, près du campus de Vancouver. Chaque jour, en me rendant à l’arrêt d’autobus, je passe par la forêt. Le chemin est court, mais assez long pour me rappeler à quel point je suis privilégiée d’être ici.

Patty Hambler est directrice des activités de promotion et d’éducation en matière de santé à l’Université de la Colombie-Britannique.

Cesser de se culpabiliser, dire non et passer le relais

par Ethel Tungohan

Ethel Tungohan.

Avant tout, j’aimerais mentionner que je suis consciente des nombreux avantages que me procure mon poste de professeure menant à la permanence, comme la certitude de retrouver mon emploi après mon congé parental actuel (ce qui n’a pas été le cas lorsque j’ai eu ma première fille pendant que j’étais chercheuse postdoctorale). Toutefois, j’ai dû apprendre que, pour prendre soin de moi dans cette situation, je ne devais pas laisser le milieu universitaire miner mon moral.

On pourrait penser que les exigences dans le secteur sont normales, mais elles ne le sont pas. Ce sentiment d’être stressé, d’être nul, d’être le bouc émissaire ne vient pas nécessairement de vous. Soyez conscient des structures de pouvoir et des déséquilibres qui rendent la vie difficile aux universitaires, en particulier aux femmes. Cessez de vous culpabiliser.

Il est aussi important de vous trouver des groupes de soutien et des mentors à l’université et à l’extérieur. Le milieu peut être sans pitié, alors tous vos alliés seront essentiels : à l’Université York, je me suis liée d’amitié avec d’autres personnes qui ont entamé leur parcours professoral en même temps que moi et je fais partie du caucus sur l’équité; en vue du Congrès de l’Association canadienne de science politique, j’ai dirigé l’organisation du premier programme de leadership pour les femmes en science politique; de plus, dans mon travail communautaire auprès d’organisations pour les immigrants comme Gabriela Ontario, j’ai trouvé des mentors qui m’ont recentrée sur mes priorités. En outre, bien que j’aie des réserves par rapport aux médias sociaux, des mots-clics comme #AcademicTwitter, #AcademicChatter, #AcademicMama ou #PoCalsoknow m’ont aidée lorsque je me suis retrouvée seule après mon déménagement. Je clavarde aussi souvent sur Messenger avec les personnes qui me soutiennent.

Assurez-vous d’avoir un cercle de proches qui vous encouragent à dire non. Des amis qui vous aideront si, par exemple, l’on vous demande d’accepter un engagement supplémentaire malgré l’épuisement, ou de travailler de façon non rémunérée ou de vous rendre à une conférence alors que vous êtes malade. Reconnaissez qu’à certains moments, vous pouvez donner beaucoup, mais qu’à d’autres, vous devez prendre du recul afin de revenir en force. Pour remplir votre rôle dans le milieu, il vous faudra parfois demander de l’aide. Accepter une tâche aujourd’hui ne signifie pas que vous ne pourrez pas passer le relais pour prendre une pause en cas de besoin.

Ethel Tungohan est titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les politiques canadiennes en matière d’immigration, les impacts de la migration et le militantisme, et est professeure adjointe en sciences politiques et sociales à l’Université York.

Des matins qui font du bien

par Marie-Ève Tremblay

Marie-Ève Tremblay.

La discipline est très importante pour entretenir ma productivité, ma motivation et ma passion. Un élément clé de ma routine est de me coucher et de me lever tôt. J’aime écrire le matin lorsque mon esprit est clair et que je peux être seule. Dans la mesure du possible, je planifie seulement mes réunions après 9 h ou 10 h pour avoir le temps de faire des tâches importantes avant d’entreprendre ma journée de travail.

En plus d’avoir un horaire régulier, il est important pour moi de bien manger. J’ai beaucoup lu sur la nutrition, particulièrement pendant mes trois grossesses. La gestion du stress me tient tellement à cœur que mes travaux de recherche portent notamment sur les conséquences du stress chronique sur les capacités cognitives, le vieillissement, ainsi que les maladies neuropsychiatriques et neurodégénératives.

J’aime aussi faire des activités familiales – comme du bricolage, de la randonnée et des sports d’hiver –, ce qui m’aide à prendre du recul. Pour gérer mon stress au travail, j’ai désactivé toutes les notifications sur mon ordinateur, y compris celles des courriels entrants, et je laisse généralement mon téléphone en mode silencieux, ce qui m’aide à me concentrer. Je crois que le fait de ne pas avoir possédé de téléphone cellulaire pendant mes cinq premières années de laboratoire m’a aidée à trouver mon propre rythme.

Marie-Ève Tremblay est titulaire de la Chaire de recherche du Canada en plasticité neuro-immunitaire en santé et thérapie et professeure au département de médecine moléculaire de l’Université Laval.

Les limites et l’autocompassion

par David Ness

David Ness.

Lorsque je quitte le bureau, je prends toujours quelques grandes respirations, je m’étire les bras un peu et je me dis : « Ma journée de travail est terminée ». J’essaie de me distancer de ce que j’ai fait durant la journée afin d’être entièrement présent à la maison (maintenant que mes enfants sont grands, ce sont mes deux chiens qui m’accueillent avec une joie délirante). J’ai la chance d’occuper un poste où je n’ai pas à répondre à mes appels et courriels en dehors des heures ouvrables. J’essaie de maintenir cette frontière entre ma vie personnelle et professionnelle, parce que mon travail est si exigeant que j’arrive difficilement à retrouver l’équilibre et à récupérer si je le ramène à la maison.

En général, j’essaie de restreindre mon temps d’écran. J’ai vu une conférence TedTalk intéressante d’Adam Alter sur la façon dont la technologie a supprimé nos signaux d’arrêt – elle nous absorbe et nous finissons par l’utiliser plus que nous ne l’aurions voulu. La perte de temps nous stresse, car nous manquons de temps pour les tâches essentielles à notre survie, comme faire l’épicerie, dormir ou faire le ménage.

Au travail, j’essaie très fort de ne pas me culpabiliser. J’essaie de faire preuve de compassion envers les autres et envers moi-même. Kristen Neff est une excellente référence en matière d’autocompassion (self-compassion.org). Elle nous rappelle que personne n’est parfait, que nous faisons tous des erreurs parce que l’erreur est humaine et que nous devons être indulgents envers nous-mêmes lorsque nous en commettons. Nous devons bien sûr prendre nos responsabilités si nous nous sommes mal comportés ou si nous avons fait quelque chose de répréhensible, mais il n’est pas nécessaire de nous rabaisser. Ne soyez pas trop dur envers vous-même, tendez la main à l’autre et essayez de réparer les dégâts. Grâce à cette philosophie, j’ai moins peur de commettre des erreurs, car ma valeur n’est pas liée à la perception que les autres ont de moi. Même si je m’améliore sans cesse, je continuerai de faire des erreurs et la vie est beaucoup plus facile si je ne m’en veux pas.

 David Ness est directeur du centre de counseling étudiant et professeur agrégé à l’Université de Calgary.

Un cocon de livres, de musique et d’amitiés

par Sonja Boon

Quand il s’agit de prendre soin de soi, je ne suis pas le meilleur exemple. Je ne sais pas m’arrêter. Souvent, je me pousse trop loin. J’ai beaucoup plus tendance à m’en faire pour les autres – mes enfants, mes étudiants, mon conjoint, mes collègues – qu’à prendre du recul et à penser à ce dont j’ai besoin pour réussir. Pourtant, comme le fait remarquer Sara Ahmed dans Living a Feminist Life, on ne réussit pas seul : « pour survivre, nous avons besoin les uns des autres; nous devons prendre part à la survie de chacun » [traduction libre].

Sonja Boon.

Mon réseau de soutien est littéraire, théorique, musical et humain. Lorsque je me sens dériver, que j’ai de la peine, que je me dispute ou que je me sens épuisée ou dépassée par les événements, je me tourne vers les livres, la musique ou mes amis; ils me font du bien lorsque je me sens perdue. Grâce à leur soutien, je peux me retrouver. Nos relations reposent sur la confiance : je sais que je peux me fier à eux pour retrouver mon équilibre.

Mes étagères sont remplies d’ouvrages de penseurs et d’écrivains dont l’intelligence, le courage et la passion ne cessent de m’inspirer. Je tiens mes auteurs préférés près de moi et laisse leurs idées, leurs pensées, leur rage et leur joie filtrer à travers moi. Installée confortablement, je parcours avec eux des chemins familiers, passant d’une page écornée à l’autre. J’écoute. Je respire. Je laisse leurs histoires m’emporter.

Dans la « vraie vie », je compte sur l’appui de mes amies du midi. Nous nous sommes connues en 2008 : quatre chercheuses débutantes. Nous ne nous réunissons vraiment pas assez souvent, mais c’est toujours un grand bonheur de les voir. Nous rions. Nous nous plaignons. Nous chuchotons. Nous compatissons. Nous pleurons. Nous écoutons. Nous rêvons. Parfois, nous conspirons pour changer le monde.

À la maison, le soir, avant que l’épuisement ne s’empare de moi (et même parfois après qu’il m’a pris), je joue de la flûte. La musique classique m’accompagne depuis mon adolescence. Avant mon doctorat, j’en avais fait une carrière. Je ne vous surprendrai sans doute pas en vous disant que ma flûte fait partie intégrante de moi. Sans elle, je ne pourrais pas vivre. J’aurais dû le réaliser beaucoup plus tôt.

Sonja Boon est professeure agrégée en étude de la condition féminine à l’Université Memorial de Terre-Neuve. Son mémoire, What the Oceans Remember: Searching for Belonging and Home, a été publié en septembre 2019.

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