Le TDAH aux cycles supérieurs : l’importance du diagnostic
Les récits de trois étudiantes aux cycles supérieurs vivant avec le TDAH et leur expérience du processus diagnostique à l’âge adulte.
Le trouble du déficit de l’attention avec hyperactivité (TDAH) s’est ancré dans le langage populaire au cours des dernières années. Caractérisé par des symptômes envahissants et handicapants, comme l’inattention, l’hyperactivité ou l’impulsivité, ce trouble témoigne d’un cerveau pour lequel la modulation de l’attention est un véritable défi. Les symptômes du TDAH, un trouble neurodéveloppemental hétérogène, peuvent être regroupés en différentes présentations, selon leur prédominance (c.-à-d., inattention, impulsivité-hyperactivité ou mixte). Habituellement diagnostiqué dans l’enfance ou l’adolescence, le TDAH chez l’adulte est souvent négligé. Plus particulièrement, les femmes atteintes du TDAH présentent souvent des symptômes du type inattentif ou mixte, qui sont moins perturbateurs et ne sont pas immédiatement apparents.
Afin de faire la lumière sur les expériences souvent privées et cachées des étudiantes et étudiants vivant avec le TDAH, je me suis entretenue avec trois étudiantes aux cycles supérieurs pour avoir un aperçu des défis qu’elles ont dû relever, ainsi que de leur approche de la réussite scolaire et du bien-être.
À propos des personnes interviewées
Yasmin Thomas est psychothérapeute associée (PA stagiaire) à Toronto; elle a obtenu une maîtrise en éducation (psychologie du counselling) à l’Université d’Ottawa en 2024.
Zahra Nanji est étudiante en deuxième année de maîtrise en gestion des ressources naturelles à l’Université du Manitoba et travaille comme auxiliaire de recherche sur la faune sauvage pour le gouvernement du Manitoba.
Emily Chatten est psychothérapeute (PA stagiaire). Elle est titulaire d’une maîtrise en counselling de l’Université Athabasca depuis 2022.
Les débuts
Après avoir obtenu son diplôme de premier cycle, Zahra a eu le sentiment de se heurter à un mur. Elle souhaitait faire des études supérieures et acquérir une expérience professionnelle pour préciser ses centres d’intérêt, mais elle n’arrivait pas à passer à l’action. « J’ai réuni les conditions idéales pour poser ma candidature à des emplois. Puis, je me suis retrouvée assise là, avec le sentiment d’être incapable de le faire, se souvient-elle. J’avais l’impression d’être paresseuse et de ne pas être à la hauteur. » Un sentiment de futilité s’est installé chez elle, et elle a commencé à se demander « pourquoi même est-ce que j’essaie? »
Enfant, Emily n’a jamais eu de difficultés à l’école et son comportement ne présentait pas de signes évidents du TDAH. Cependant, après avoir suivi une thérapie pour la dépression et l’anxiété, sa thérapeute lui a conseillé de se faire évaluer pour le TDAH. Les résultats de l’évaluation ont révélé un TDAH léger de type mixte. Cela a aidé Emily à contextualiser ses difficultés à la maîtrise, notamment en matière de lecture et d’organisation. « Je me suis rendu compte que bon nombre de mes difficultés étaient logiques, remarque-t-elle. Personne ne pensait que j’avais un TDAH avant que je sois diagnostiquée. »
Au secondaire, Yasmin éprouvait des difficultés à commencer et à terminer ses travaux scolaires et se sentait souvent paralysée avant d’entamer un projet. Au fil des ans, son discours interne est devenu critique : « Pourquoi suis-je incapable d’y arriver comme tout le monde? » Malgré tout, elle a réussi son premier trimestre à la maîtrise sans diagnostic ni médicaments, mais cela n’a pas été sans mal. Yasmin se souvient qu’une fois, il lui a fallu huit heures pour terminer un travail qui n’aurait dû qu’en prendre deux; elle a souvent mis sa santé en péril pour respecter les échéances.
La valeur d’un diagnostic
Les personnes atteintes d’un TDAH non diagnostiqué peuvent vivre des difficultés importantes et persistantes, mais leurs symptômes peuvent être silencieux et passer inaperçus aux yeux d’autrui. Le TDAH peut demeurer caché, puisque les personnes présentant un profil inattentif ou mixte sont moins susceptibles d’avoir des comportements perturbateurs, d’être toujours en mouvement, de couper la parole ou de prendre des décisions impulsives. En l’absence d’un diagnostic précis, les symptômes risquent de ne pas être traités ou compris. Les personnes vivant avec un TDAH non diagnostiqué intériorisent souvent leurs frustrations, attribuant leurs symptômes à des défauts personnels ou à un manque d’effort. Faute de soutien approprié et de stratégies d’adaptation saines, ces personnes compromettent souvent leur santé pour respecter les échéances, sont tributaires de l’adrénaline et du stress pour se motiver et utilisent l’alcool, le cannabis et d’autres substances en guise de traitement.
Pour plusieurs, le diagnostic de TDAH valide leurs difficultés et apporte un soulagement. Grâce aux médias sociaux et à la thérapie, Zahra a compris que ses symptômes n’étaient pas forcément le reflet de son caractère ou de son potentiel. Elle a obtenu son diagnostic à l’été 2020, une expérience qu’elle décrit comme « littéralement transformatrice », « révélatrice » et « riche en émotions ».
« Je ne sais pas pourquoi je me suis laissée souffrir si longtemps, mais on ne se rend pas compte de la gravité de la situation tant qu’on n’en est pas sorti. » Elle a commencé un traitement pharmacologique à l’automne 2020 et en est maintenant à sa deuxième année de maîtrise à l’Université du Manitoba. « J’avais l’impression d’avancer dans la vie en étant privée de jambes, pour finalement en recevoir une paire… c’est un changement radical qui a une grande incidence. »
Gérer les symptômes
Pour Emily, comprendre la mesure dans laquelle le TDAH l’affectait lui a permis de mettre en œuvre des stratégies saines pour bien gérer ses symptômes. En effet, plutôt que de se forcer à accomplir des tâches en serrant les dents, elle prenait des pauses, se promenait ou faisait de l’exercice, puis elle reprenait la tâche lorsqu’elle était plus apte à le faire. La gestion de ses symptômes a également permis à Emily d’aborder le TDAH avec une approche fondée sur les forces. Dans son rôle de thérapeute, son TDAH lui a permis d’innover dans la planification des traitements et d’être plus active avec les enfants dans les thérapies fondées sur le jeu et le mouvement.
Ressources et prochaines étapes
Si vous pensez avoir un TDAH, envisagez de consulter les services de santé de votre université pour une évaluation. Yasmin a d’abord consulté en médecine familiale pour se faire évaluer, mais elle a été surprise par le manque d’expérience en matière de diagnostic du TDAH chez l’adulte. En revanche, elle a vécu une expérience positive et harmonieuse auprès des services de santé du campus, qui connaissaient bien le TDAH chez l’adulte et ses différentes manifestations. Elle a été aiguillée vers l’Adult ADHD Center, un centre spécialisé où elle a pu être évaluée gratuitement, ce qui lui a permis d’avoir accès à un traitement pharmacologique et à des accommodements. « Le diagnostic m’a permis d’être un peu plus indulgente envers moi-même, affirme Yasmin. J’ai acquis un sentiment d’efficacité personnelle et j’ai vu que je pouvais maintenir une routine et atteindre mes objectifs. »
Postes vedettes
- Medécine- Professeur.e et coordonnateur.rice du programme en santé mentaleUniversité de l’Ontario Français
- Médecine - Professeur(e) adjoint(e) (communication en sciences de la santé)Université d'Ottawa
- Chaire de recherche du Canada, niveau 2 en génie électrique (Professeur(e))Polytechnique Québec
- Doyen(ne), Faculté de médecine et des sciences de la santéUniversité de Sherbrooke
- Littératures - Professeur(e) (Littérature(s) d'expression française)Université de Moncton
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