L’université inclusive qui ne craint pas la liberté
« Les libertés expressives dans l’université canadienne contemporaine : Cadres juridiques et enjeux éthiques », Édition Thémis, 2024, 542 pages

Liberté de dire
Liberté de révolte du monde
Rectitude politique
Rectitude libertaire
C’est un problème philosophique sérieux qu’on nous annonce dès les premières pages de l’ouvrage coup de cœur.
Nous lisons pour comprendre, pour tenter de défaire le nœud. Des livres qui offrent le paradoxe, qui dressent la multiplicité des discours, qui dessinent les mille visages d’une même solution. Y découvrir, par les mots, l’éclat lumineux autant que la part d’ombre qui nous habitent. Accepter de concilier les deux, même dans l’impopularité de la démarche.
Nous pénétrons la cité universitaire pour cultiver ce refuge, pour fréquenter ce rempart de la liberté. La quête du savoir nous y est offerte à mains nues. On nous invite à prendre des risques, même envers nous-mêmes. À explorer des façons d’appréhender le monde, à découvrir et à orchestrer sa pensée, à défendre son opinion et à répondre aux grands enjeux qui nous interpellent.
Or ce chemin exploratoire—la danse des mots sur le papier et sur les lèvres—n’est plus ce qu’il était. L’université contemporaine est, de fait, frappée en plein cœur et son prolongement, la science et le savoir, sont menacés par des forces à la fois internes et externes. Pour la défendre, encore faut-il comprendre ce qu’il est possible de réclamer.
C’est cette tension sublime et brûlante d’actualité—la liberté des mots et la volonté de taire celui qui dit—qui est reprise à chacune des pages de l’exceptionnel ouvrage de Jean-Francois Gaudreault-DesBiens et Lea Boutrouille, en s’attardant au milieu universitaire comme point d’ancrage de cette réflexion.
Par une analyse impeccablement rigoureuse qui emprunte tantôt au droit et à la philosophie, tantôt à la poésie et à l’art, on y documente les enjeux éthiques entourant l’exercice des libertés expressives dans les universités ainsi que les cadres juridiques canadiens qui scellent leur légitimité. Et on le fait de manière soignée, précise, éclairante : la recherche doctrinale et jurisprudentielle est fouillée; les cas de figure représentent de véritables polémiques ayant déchiré les universités; les dilemmes moraux se situent dans la zone grise qui permet d’identifier le courage des vrais leaders et d’imaginer ceux et celles qui souhaitent le devenir.
En dépersonnalisant la critique, le livre permet de soulever les mécanismes de pouvoir à la fois politiques, idéologiques et juridiques qui menacent le discours des intellectuels dans nos universités canadiennes contemporaines. La lectrice ne peut rester indifférente à cette prise de réflexion collective à laquelle on nous convie.
Quel type de rapport au pouvoir souhaitons-nous entretenir lorsqu’il est question de liberté de parole? Quel est le rôle de l’université dans la production et la diffusion du savoir? Quelle indépendance l’université devrait-elle assurer à celui qui pense et à celle qui porte la force et la pertinence de ce discours? Comment garantir que les pratiques répressives du pouvoir étatique ne pénètrent pas l’arène du penseur, de la professeure, de l’étudiant au cœur de la cité universitaire? Dans le climat de polarisation qui nous caractérise, quel est l’effet de ce système de contraintes sur l’autorité du maître, l’autorité du savoir?
Si le titre du livre nous porterait à croire que nous plongeons dans un univers restreint et hermétique, celui de l’université canadienne, on nous transporte plutôt dans un microcosme. Car la cité du savoir gouverne autre chose : elle est le reflet des rapports de pouvoir qui l’encerclent et le miroir des tensions sociales qui la façonnent et lui donnent sens. Parcourir le livre, c’est donc parcourir la société, s’y retrouver, s’y positionner.
M. Gaudreault-Desbiens nous faisait déjà cadeau, en 1996, de l’excellent ouvrage « La liberté d’expression entre l’art et le droit », où il s’intéressait à la liberté d’expression politique. Nous retrouvons dans ce second ouvrage co-rédigé avec Mme Boutrouille cette même sensibilité au possible de l’expression, cette fois dans un contexte de liberté académique. Les éditions Thémis sont privilégiées de publier ce livre incontournable dont le propos juste, nécessaire, tant attendu permettra de mieux créer une cité universitaire inclusive qui ne craint pas la liberté.
[NDLR : Une erreur s’est glissée dans le titre accompagnant ce texte dans notre magazine d’avril-mai 2025. Le bon titre aurait dû être « L’université inclusive qui ne craint pas la liberté » et non « L’écriture inclusive qui ne craint pas la liberté ». Nous nous excusons pour cette confusion.]
Postes vedettes
- Directeur ou directrice – Services d’appui à la négociation avec le corps professoral (SANCP)Association canadienne du personnel administratif universitaire (ACPAU)
- Chaire de recherche du niveau 1 en multiples domainesUniversité de Sherbrooke
- Psychologie - Professeure ou professeur (psychologie clinique de l’enfant, de l’adolescent et des parents)Université de Sherbrooke
- Sciences infirmières - Professeur ou professeure (pratique avancée en sciences infirmières)Université Laval
- Sciences de l'éducation - Professeure ou professeur (didactique du français/développement langagier)Université de Moncton - Campus de Moncton
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